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Journal de Jules Renard de 1893-1898

Journal de Jules Renard de 1893-1898

Titel: Journal de Jules Renard de 1893-1898 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jules Renard
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blâmeront, puisque j'en ai déjà. Et, si je me contente de ce que j'ai, les gens ne me trouveront aucun mérite à faire de l'art pour l'art, puisque je n'ai pas besoin de gagner ma vie. » Et, après ce raisonnement un peu dur, j'ai fait ce que j'ai voulu.
Il faut avoir de grosses illusions bien grasses : on a moins de peine à les nourrir.
La sauterelle de bronze. Je la mettais sur la feuille blanche où j'allais écrire. J'en arrivai à ne plus pouvoir travailler sans elle. Je la voyais vivante.
Un jour, elle me gêna. Elle était sous mon nez. Elle couvrait une ligne commencée. Je la piquai un peu fort avec ma plume.
Si je vous disais qu'elle s'envola, me croiriez-vous ?
11 septembre.
La solitude où l'on peut enfin soigner son nez avec amour.
Vraiment, amis Barrès, Paul Adam, Bernard Lazare, etc., pourquoi acceptez-vous le jugement de la foule en politique quand vous ne l'admettez pas en art ?
La règle pour faire les liaisons, c'est de ne pas avoir l'air d'un serin.
    Pour être un journaliste remarquable, il ne manque à Henri Fouquier que de l'esprit. Lemaitre en a toujours, Bergerat, quelquefois, Sarcey, souvent. Fouquier n'en a jamais.
Voici que, pendant un mois, en France, ça va sentir le « russi ».
14 septembre.
Hier, dans la forêt de Fontainebleau, j'ai croisé M. et Mme Carnot. Ils étaient en voiture. M. Carnot porta la main à son chapeau, et Mme Carnot commença de sourire. « Tiens ! » me dis-je. « Voilà des gens qui me connaissent. » Mais, comme je ne les connaissais pas, très réservé, je n'ai pas répondu.
S'enfuir dans un village pour en faire le centre du monde.
Il arriva à construire l'édifice social avec des pierres qui n'étaient pas angulaires.
15 septembre.
Il semblait dormir en écoutant les femmes, mais parfois remuait ses longues oreilles de chasseur de bêtises.
Son esprit trop tendu éclata comme une peau qui pète, et l'on aurait pu voir, au-dessus de sa tête, un léger nuage qui se dissipa dans l'air.
Serrez, serrez votre porte-plume ! Le style se lâche. La phrase s'en va comme une folle. Vous allez verser.
La seule odeur de l'encre fait mourir mes rêves.
Il faut feuilleter les mauvais livres, éplucher les bons.
    18 septembre.
Pour moi, je pense que, travailler quand on n'a pas de génie, c'est comme si on chantait.
Petites poses.
- Je ne travaille, dis-je, que tous les deux ans. Tous les deux ans, c'est assez.
- Oh ! moa, dit Moréas, je ne travaille jamais. Alors ?
Il dit encore :
- Huysmans est un philistin.
Pauvre grive nuancée, élégante et fine qu'on compare à un homme saoul !
19 septembre.
Tire, traîne ton filet : tu ramèneras peut-être dedans quelques menus bonheurs.
Les critiques ont droit à de l'indulgence, qui parlent tout le temps des autres et dont on ne parle jamais.
Les dîners de La Plume sont des casse-croûte où une cinquantaine de jeunes gens réunis se paient, pour cent sous, la tête d'un président chaque fois renouvelé.
Elle souffre.
Elle a un petit épanchement au coeur.
Ils écrivent pour ceux qui n'ont pas de Larousse.
Il aimait mieux une mauvaise théorie qu'une bonne action.
20 septembre.
- Je n'ai jamais d'entrain, dit-elle. Je symbolise l'amour qui bâille.
    21 septembre.
Le style, c'est ce qui fait dire au directeur, d'un auteur : « Oh ! c'est bien de lui, ça ! »
22 septembre.
En tombant, elle montra son derrière, et un chien qui passait se mit à hurler.
25 septembre.
Comme homme, accepter tous les devoirs, comme écrivain, s'accorder tous les droits, et même celui de se moquer de ses devoirs.
26 septembre.
Fantec, qui apprend à lire, dit à sa maman :
- Souffle-moi, tout bas, rien qu'un petit peu.
27 septembre.
Son ambition était d'écrire dans les almanachs.
29 septembre.
Oh ! on peut lui dire que c'est un garçon ! elle est si bonne mère qu'elle ne vérifiera pas !
Un mot entendu, c'est-à-dire pas naturel.
Elle n'a d'original que son odeur.
30 septembre.
Un coin du monde.
Je vis une écurie ouverte. Il y faisait noir. Elle semblait abandonnée. La litière n'était plus en paille, mais en fumier.
    La vache était sortie et paissait toute seule dans les champs.
Je vis une pauvre vieille femme. Elle était assise devant sa porte. Aveugle, elle ne roulait pas ses yeux blancs. On ne l'entendait point se plaindre, pas même respirer. Elle ne remuait pas, et pourtant elle avait un bras qui semblait encore plus immobile que le reste de son corps.
Je vis un chat qui, d'un bond, traversa la rue. Je dis que c'était un

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