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La Bataillon de la Croix-Rousse

Titel: La Bataillon de la Croix-Rousse Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Louis Noir
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austère avec admiration.
    – Je viens, reprit-elle, te proposer de priver les assiégés de munitions.
    – Par quel moyen   ? demanda Dubois-Crancé profondément surpris.
    – En faisant sauter l’arsenal   ! dit-il.
    Il tressaillit.
    – J’étais à Villefranche   ! dit-elle. Je me suis rappelée qu’une de mes cousines, républicaine comme moi, habite près de l’arsenal. J’ai entrevu la possibilité d’incendier cet établissement et je suis venue, laissant mes enfants à une sœur qui les élèvera si je péris.
    – Tu es mère et tu veux mourir   ? dit Dubois-Crancé.
    – Je suis républicaine   ! répondit-elle.
    Dubois-Crancé salua comme autrefois il saluait la reine.
    – Je n’ai pas le droit, dit-il, de repousser ton dévouement sublime. Mais pourras-tu pénétrer dans Lyon   ?
    – La ville, dit-elle, n’est pas encore cernée. Chaque jour des femmes de la campagne y portent des denrées   ; je ferai comme elles. Une fois dans la ville, j’y resterai. Une femme du peuple n’excite pas l’attention. L’heure venue, j’agirai.
    – Citoyenne, dit Dubois-Crancé, si tu succombes, la patrie élèvera tes enfants.
    – Elle aura trop d’autres orphelins à nourrir   ; les miens ont une petite fortune.
    – Va   ! si tu meurs, la France entière portera ton deuil.
    – Je pars…
    – Sans embrasser ton fils   ?
    – Je veux qu’il ignore ma résolution.
    Et saluant Dubois-Crancé, elle sortit.
    – Et moi, murmura-t-il, qui croyais avoir tout sacrifié à la Révolution   ! Cette femme nous écrase tous par la grandeur de son sacrifice.
    Sacrifice presque ignoré, puisque Lamartine, le plus explicite des historiens sur ce fait, ne lui consacre que cette courte phrase   :
    « Pendant la nuit du 24 au 25 août et dans la confusion du bombardement de la place Bellecour, le feu allumé par la main d’une femme, dévora l’arsenal… »
    Point de nom.
    L’histoire est oublieuse pour les humbles.
    Roubiès, après avoir fait envoyer à Kellermann la réponse insolente et mensongère dont nous avons cité les passages importants, jugea qu’il fallait frapper un coup sur l’imagination des républicains-girondins qui formaient le gros de ses bataillons.
    Le 9 au matin, il venait d’expédier la réponse qui contenait le refus de se rendre, lorsqu’il manda son secrétaire.
    Celui-ci s’était rendu à cet appel, Roubiès lui dit en souriant   :
    – Mon ami, veuillez donc me dire où en sont les préparatifs de la fête républicaine du 10 août.
    Le petit abbé, au comble de la surprise, leva la tête et murmura   :
    – La fête   ?
    – Sans doute   ! Ne vous ai-je pas expliqué qu’il fallait que cette fête fût célébrée, afin que les Girondins de nos bataillons fussent plus que jamais convaincus qu’ils se battent pour la République. Où en sont les préparatifs   ? Que fait la commission de la fête dont je vous ai nommé secrétaire   ?
    – Mais, mon père, je crois que la commission ne s’est pas réunie à cause du siège.
    – Ah   ! fit Roubiès, mon enfant, vous avez perdu un jour, c’est une faute cela. Plus que jamais, cette fête doit avoir lieu.
    – On a bombardé hier, fit le petit abbé timidement. Je pensais…
    – Vous pensiez mal   ! Auriez-vous peur par hasard   ?
    – N’étant pas soldat, j’ai peu l’habitude du bruit des armes.
    – Mon cher enfant, un prêtre doit être prêt à tout, un prêtre doit être plus brave qu’un soldat, un prêtre doit braver la mort, soit comme aumônier, soit comme pasteur pendant les épidémies, soit comme martyr.
    D’un ton sec   :
    – Pour vous aguerrir, vous irez aux redoutes. Pour le moment, asseyez-vous et écrivez.
    Le petit abbé, très troublé, prit sa plume et écrivit tout un plan, avec voies et moyens, pour la fête du lendemain.
    Roubiès, le plan écrit, le relut, l’envoya à la signature de Gilibert, président à tout faire du comité dictatorial et de là à l’imprimerie, pour que ce plan-décret fût placardé partout.
    Puis il dicta imperturbablement à son secrétaire ahuri une invitation à Kellermann d’assister à la fête du 10 août à Lyon, « pour se convaincre du républicanisme de la ville. »
    Le secrétaire n’en revenait pas.
    Mais après avoir libellé l’invitation à Kellermann, avoir mandé un trompette, l’avoir remise au dit trompette avec ordre de la porter au camp ennemi et de la présenter au président en chef

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