La Bataillon de la Croix-Rousse
; la ligne des redoutes ennemies se trouvait entamée.
Bientôt les républicains allaient pouvoir armer cette redoute Panthod de canons et tirer sur les autres maisons occupées par les Lyonnais.
On fêta ce succès dans l’armée.
Lorsque Dubois-Crancé, après la déroute des assiégés, vint visiter la maison Panthod, il rencontra le gros du bataillon de la Croix-Rousse qui descendait vers les avant-postes, emportant ses blessés.
Saint-Giles ne gardait avec lui que cinquante hommes.
Dubois-Crancé, en arrivant, admira la prompte exécution des travaux de défense, donna quelques conseils exécutés sur le champ puis s’informa des morts.
– Où sont-ils ? Je veux leur faire rendre des honneurs sans précédents, dit-il.
– Ils les ont, dit Saint-Giles. Ils dorment sous les pieds de leurs amis vivants et leurs tombes se pavent de boulets…
Dubois-Crancé se prit à songer que la République française n’avait rien à envier à Sparte.
Comme on l’a vu, la maison Panthod avait été prise et conservée ; mais, à l’aube, il devint évident que la maison Nérat n’était pas tenable : du reste, l’intention de l’attaque n’était autre que de faire diversion.
L’ordre d’évacuation fut donné, lorsqu’il fut bien reconnu que Saint-Giles était inexpugnable dans la maison Panthod.
L’histoire du siège, depuis ce moment jusque vers la fin de septembre, consiste tout entière dans cette lutte sanglante sur les hauteurs de la Croix-Rousse, lutte qui avait pour but de resserrer l’ennemi en attendant les renforts amassés en Auvergne : elle offre un immense intérêt national en montrant la valeur des Lyonnais et la bravoure des républicains.
Ceux-ci avaient pour objectif l’enlèvement successif des trois maisons restées à l’ennemi.
Ils armèrent donc la maison Panthod de canons.
Ce fut un rude travail sous le feu épouvantable que les Lyonnais continuaient à diriger jour et nuit sur ce poste.
Le 3 septembre, de Précy reconnut que s’il laissait s’établir cette batterie Panthod, il perdrait les trois autres maisons-redoutes.
Il ordonna à Étienne Leroyer de reprendre cette redoute défendue par Saint-Giles.
Celui-ci n’avait voulu conserver avec lui que cinquante hommes.
« Si je suis repoussé, avait-il dit au général Dumuy, je reprendrai la redoute avec mon bataillon ; mais, en entassant plus de cinquante hommes là-dedans, j’offrirais trop de chair à canon au tir ennemi. »
– Et les pièces ? avait demandé le général.
– On ne les prendra pas, car, au premier signe d’attaque, je les renverrai.
Il avait abrité des attelages dans des caves avec rampe d’accès.
Lorsqu’il entendit venir à lui, dans la nuit du 3 septembre, les deux bataillons d’Étienne, il fit donc partir son artillerie.
Et, avec sa poignée d’hommes, il soutint l’attaque.
Le bulletin des assiégés (n° 28) rend compte ainsi de l’action :
« Avant-hier, à trois heures, il y a eu une attaque assez vive dirigée contre la maison Panthod occupée par l’ennemi ; elle a été criblée par le feu de notre artillerie. Et les canonniers de Crancé ont été obligés d’abandonner quelque temps ce poste qu’on ne tardera pas à leur enlever. »
L’espérance du bulletin ne pouvait se réaliser.
La lutte avait été incroyablement acharnée.
Leroyer avait assailli la maison pendant trois quarts d’heure avec un entêtement tel que ses muscadins finirent par s’emparer, du dehors, de presque tous les créneaux du rez-de-chaussée par lesquels ils tirèrent sur les républicains ; mais Saint-Giles avait fait transporter sur les murs ruinés une centaine d’obus que ses hommes allumèrent et lancèrent sur l’ennemi.
Celui-ci fut obligé de lâcher prise.
Il se retira avec des pertes énormes.
Il restait dans la maison trois hommes seulement sans blessures graves ou légères et il y avait vingt et un morts…
Saint-Giles n’avait eu que des égratignures.
Quelle lutte !
Quels hommes !
Lorsque Saint-Giles eut assuré la possession de la maison Panthod, il songea à sa mère morte, à ses frères et à ses sœurs orphelins.
Il écrivit donc à Villefranche à cette sœur de madame Saint-Giles, pour lui recommander les enfants en faveur desquels il fit son testament.
Leur pain était assuré : il traça pour les orphelins tout un plan d’éducation heureusement conservé par la famille.
Écrit sous le vent
Weitere Kostenlose Bücher