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La Bataillon de la Croix-Rousse

Titel: La Bataillon de la Croix-Rousse Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Louis Noir
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baronne, je suis accoutumée aux dires de M. Rateau et je n’y prête attention que lorsqu’il me donne des ordres pour la lingerie. Mais puisque mon cousin a eu la délicatesse de se mettre en retard pour me laisser l’occasion de vous voir et le temps de vous remercier, permettez-moi de vous exprimer ma gratitude. Défendre une inconnue, la première femme qui passe et qui est menacée, c’est d’un grand cœur   !
    Avec beaucoup de grâce   :
    – Voilà pourquoi, monsieur, ne pouvant aller vous rendre visite chez vous parce que… ma mère… mon père… mon oncle… leur haine si implacable contre vous que, malgré votre conduite chevaleresque, ils ne veulent pas m’accompagner, moi qui suis reconnaissante, j’ai comploté avec mon cousin de vous voir ici.
    Souriant discrètement   :
    – M. Rateau, dit-elle, n’a pas su mettre dans cette entrevue la simplicité que j’aurais souhaitée, mais peu importe. Avec vous, j’ai toute confiance et je suis sûre de votre loyauté.
    La petite baronne parlait avec une aisance et une distinction d’accent qui donnait une grande valeur à ce qu’elle disait.
    Saint-Giles était caressé délicieusement par cette musique de la forme et par ces délicatesses de la pensée.
    Il avait remarqué la grande ressemblance de la jeune fille avec le fifre   ; mais il trouvait à celle-ci un tout autre air et elle lui semblait plus grande. Il lui donnait, en outre, quatre ans de plus, ce qui est l’effet ordinaire quand une femme déguisée en homme reprend les vêtements de son sexe.
    Enfin, elle avait une élégance de manières qui manquait à ce polisson de fifre, lequel était turbulent et toujours en mouvement.
    Saint-Giles remarqua combien cette petite ouvrière semblait avoir d’ordre au milieu des piles de linge dont elle était entourée   : elle avait repris son ouvrage, et montrant un siège à l’artiste   :
    – Voulez-vous que nous causions en attendant, mon cousin   ! fit-elle. J’ai des éclaircissements à vous demander sur l’affaire du quai.
    – Mademoiselle, dit-il, je suis tout à vos ordres.
    Il était encore gêné.
    La présentation du père Rateau l’avait mis hors de lui.
    Saint-Giles n’eut pas l’ombre d’un soupçon.
    Cette petite lingère avait si bien l’air d’être chez elle, dans cette chambre. Elle remuait des piles de serviettes d’un air si naturel, elle jouait si bien son rôle que Saint-Giles y fut pris.
    Et puis le père Rateau, vieux roué, l’avait complètement dérouté en se rendant et en le rendant ridicule.
    La ressemblance du prétendu fifre et de la baronne était étonnante   : mais elle était annoncée d’avance.
    La baronne, du reste, experte en l’art de se déguiser et de se grimer, avait complètement changé sa coiffure   : elle avait su donner d’autres accents à sa physionomie.
    Ainsi elle s’était improvisé au menton un signe que l’on eût juré être naturel.
    Elle avait enlevé la teinte qui donnait à ses sourcils et à ses cils une expression plus dure, plus mâle.
    En somme, elle paraissait son âge   : en homme elle semblait un gamin.
    Mais c’était surtout l’être moral qui semblait vrai.
    Aussi, Saint-Giles n’eut aucun doute.
    Du reste, elle l’entortilla tout de suite par une série de questions sur la façon dont l’affaire du quai s’était passée sur ses blessures et sur la manière merveilleuse dont il les avait supportées, s’extasiant de le voir debout.
    Elle se fit raconter la lutte, écoutant, les yeux baissés sur son ouvrage, ce qui permit à Saint-Giles de bien la regarder.
    Il s’avoua qu’elle était charmante et que le père Rateau n’avait pas eu tous les torts, en lui recommandant la sagesse.
    Mais elle lui dit tout à coup   :
    – J’aurais bien une demande à vous poser   : je n’ose vous la faire.
    – Pourquoi donc, mademoiselle   ? fit Saint-Giles. Je suis très désireux de vous être agréable.
    – C’est que… c’est délicat… J’ai peur de froisser vos convictions politiques.
    – Oh   ! dit Saint-Giles, peu importe.
    – Il s’agit de mon cousin.
    – Ah   !
    Ce ah   ! parti malgré Saint-Giles, était une exclamation de jalousie.
    – Vous voulez, continua-t-elle, m’a dit mon cousin, faire de lui un républicain et l’emmener à la frontière.
    – Je ne vous cacherai pas que tel est mon dessein.
    – Je vous supplie de n’en rien faire.
    – Votre cousin est peut-être votre fiancé   ?

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