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La Bataillon de la Croix-Rousse

Titel: La Bataillon de la Croix-Rousse Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Louis Noir
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enchanté de son nouveau camarade.
    Il arriva à l’atelier, ravi de pouvoir taquiner son grand frère.
    – Eh bien   ! avait demandé Saint-Giles à son frère, tu l’as vu, ce fifre   ?
    – Oui.
    – Il a eu l’air content   ?
    – Oh, oui.
    – C’est bien entendu pour demain soir, à huit heures du soir, au cabaret du père Rateau   ?
    – Oui.
    – Pourvu qu’il soit exact   : je n’aime pas attendre.
    – Si, dit Ernest en souriant, il est un peu en retard, tu ne t’ennuieras pas en attendant.
    – Attendre   ! Je le répète et tu aurais dû le lui dire, je n’aime pas ça.
    Saint-Giles fronça le sourcil, il n’aimait pas poser, lui qui faisait poser les autres.
    – Oh   ! si tu attends, ce ne sera ni long ni embêtant   ! dit Ernest.
    – Pourquoi   ? demanda Saint-Giles.
    – Parce que tu causeras avec la petite baronne qui est lingère chez le père Rateau.
    – Ah   ! fit Saint-Giles   ; c’est donc pour cela qu’il a choisi ce cabaret, le plus cher de la banlieue   !
    – Oui, mais on ne vous écorchera pas.
    – Ça va me gêner un peu de recevoir les compliments de la petite baronne.
    – Tu y auras du plaisir   ; il parait qu’elle est jolie, jolie   !
    Puis clignant de l’œil   :
    – Hein   ! si tu allais en devenir amoureux, Saint-Giles.
    – Moi   ? allons donc.
    – Pourquoi pas   ? Dis, mon petit Saint-Giles, tu ne tiens pas à épouser une femme riche, toi, n’est-ce pas   ?
    – Non, mais…
    – Et si elle est belle.
    – Es-tu bête   ?
    – Si elle est bien élevée.
    – En voilà un singulier animal   ! vas-tu me marier maintenant   ?
    – Si elle est sage…
    – Mais tais-toi donc   : on dirait que tu as reçu commission de me proposer cette petite baronne.
    – Si elle te plait… continua imperturbablement Ernest.
    – Veux-tu te taire à la fin   ! Voyez-vous ce galopin se mêlant de mon mariage et de mes affaires de cœur   : je me demande en quoi cela te regarde   !
    – Je voudrais, dit ingénument Ernest, que le fifre soit mon beau-frère   : voilà   !
    – Et moi, je te mets à la porte, polisson.
    Saint-Giles le poussa dehors.
    Puis, à part lui, il dit   :
    – Mais vraiment, c’est inouï   ! Ce fifre se fait aimer de tout le monde. Ma mère elle-même m’a dit qu’elle s’intéressait à lui. Il a le charme décidément.
    Et, sachant qu’il devait voir la petite baronne, Saint-Giles n’en avait tenu que davantage à laisser Châlier faire sa rentrée sans lui.
    Il paraît que la petite baronne lui trottait dans la cervelle, car il demanda plusieurs fois à sa mère si ses habits étaient en ordre.
    Puis, il s’inquiéta d’une certaine chemise à col, genre muscadin, qui lui donnait un air tout à fait distingué.
    Puis il envoya Ernest chercher des gants et des cravates dont il assortit lui-même les nuances.
    Enfin, il ne travaillait plus du tout   ; il tracassait tout le monde et sa mère lui dit   :
    – Ne sois donc pas si énervé   ! Je comprends que le discours de rentrée de Châlier t’inquiète (on venait d’apprendre cette rentrée à l’instant), mais enfin, que veux-tu, ce n’est pas en t’enfiévrant ainsi que tu remédieras au mal.
    Ernest sourit des observations de sa mère.
    Saint-Giles lançait des regards terribles au petit bonhomme.
    Et M me  Saint-Giles impatientée disait à Ernest   :
    – Taquin, n’ennuie donc pas ton frère avec tes sourires de moquerie.
    Enfin, l’heure impatiemment attendue arriva.
    Saint-Giles superbe, muscadin jusqu’au bout des ongles (lui, un Jacobin), Saint-Giles ayant la canne plombée du tambour-major aux mains (c’était la mode du temps), l’habit long à basques tombant jusqu’au jarret, le chapeau bicorne à claque, la montre à chaîne d’or à la boutonnière, Saint-Giles en culottes et en bas de soie, avec souliers relevés en pointes, Saint-Giles parfaitement ridicule à notre point de vue moderne, superbe pour le goût du jour, fit une sortie triomphale après avoir embrassé sa mère et toute la nichée d’enfants qui s’extasiaient en le voyant si beau.
    Il avait une heure devant lui pour se rendre aux Brotteaux qui étaient le rendez-vous des viveurs de l’époque et où, chaque semaine, le décadi venu, tout Lyon se rendait pour manger une friture de goujons ou une matelote et boire du vin du Rhône.
    Ernest accompagna son frère jusqu’au commencement des rampes, et après lui avoir dit au revoir, il

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