Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen

La Bataillon de la Croix-Rousse

Titel: La Bataillon de la Croix-Rousse Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Louis Noir
Vom Netzwerk:
qu’Adrienne vous gêne, n’est-ce pas   ! Voilà ce que vous voulez dire   ?
    – Sans doute, elle peut bien avoir une abbaye, et moi une autre.
    – Ma mère, vous vous trompez, Adrienne survivante vous éclipse totalement, vous n’êtes plus rien, pas même son ombre   ! Quel mérite aurez-vous   ?
    – Mais…
    – Celui d’avoir inspiré le meurtre   ! peu de chose   ! On fera la remarque que vous auriez aussi bien pu frapper que cette jeune fille.
    Haussant les épaules   :
    – Irez-vous publier que nous avons poussé cette jeune fille au meurtre avec des peines et des soins infinis   ?
    – Mais enfin, c’est quelque chose cela   ! fit la supérieure.
    – Moins que rien, pire que rien. Nous endosserions l’odieux du crime et elle en aurait toute la gloire, en ayant eu le péril.
    – C’est donc un crime   ?
    – Eh oui, pour nos adversaires politiques   !
    – Je comprends, murmura la supérieure.
    L’abbé eut l’air de penser que c’était bien heureux. Il reprit   :
    – Sœur Adrienne morte, tout change. Vous héritez d’elle   ! Elle ne vous écrase plus de sa gloire.
    Dans son projet de livrer sœur Adrienne aux vengeances des Jacobins, l’abbé était-il mû par le sentiment des intérêts généraux de son parti ou par celui de son intérêt particulier   ?
    Agissait-il comme royaliste ou comme ambitieux   ?
    Rien n’autorise à décider que l’un ou l’autre monde l’inspirait.
    Cet homme est resté une énigme impénétrable pour les historiens.
    Pour sa mère, pas de doute   : l’égoïsme seul le guidait.
    Quant à lui, on peut s’aventurer à supposer que son esprit était assez vaste pour s’élever jusqu’à la conception du dévouement à une cause, mais que son cœur y ajoutait les âpres convoitises d’un prêtre subalterne, voulant gravir à tout prix les marches du siège archiépiscopal de Lyon.
    Toujours est-il que, l’intérêt personnel ayant fait pénétrer la conviction dans l’âme de sa mère, l’abbé lui dit   :
    – Vous voyez donc bien qu’il faut une martyre.
    La supérieure approuva de la tête, mais une crainte lui vint.
    – Et si les Jacobins m’écharpaient, fit-elle, saisie tout à coup par cette appréhension.
    – Impossible   ! dit l’abbé froidement   : trente affidés bien armés seront dans le couloir   ; ils protégeront votre retraite, et, si elle était compromise, deux bataillons de garde nationale qui feront l’exercice aux flambeaux dans le voisinage (une innovation) seraient lancés à votre secours   ! Oh   ! mes mesures seront bien prises.
    – Enfin, dit-elle épouvantée, je serai néanmoins exposée.
    – Si peu   ! fit-il dédaigneusement.
    – Mais, mon ami, vous risquez mes jours bien facilement, ce me semble j’aimerais mieux me contenter de rester ce que je suis, simple supérieure d’une pauvre communauté.
    La lâcheté de sa mère révolta l’abbé.
    – Impossible   ! dit-il d’un ton sombre.
    – Pourquoi   ?
    – Pour que je sois archevêque, dit-il résolument, il faut d’abord que vous soyez abbesse et vous le serez, ma mère.
    – Mais je ne vois pas en quoi cela est nécessaire.
    Il eut un geste de mépris écrasant.
    – Vous ne voyez pas, ma mère, dit-il, que petite supérieure d’une petite communauté, vous n’êtes guère pour nos ennemis qu’une fille repentie. Petit cœur   ! Petit esprit   !
    Elle pâlit sous l’outrage.
    – Un fils, s’écria-t-elle, reprocher à sa mère son passé   !
    – Croyez-vous donc, demanda-t-il, qu’il ne me soit pas plus pénible qu’à vous de me souvenir   ! Ce passé me pèse, m’étouffe, me brûle, me dévore. J’ai tout fait pour me débarrasser de cette tunique de Nessus   ; vous avez accepté le rôle de tante   : vous me reniez pour votre fils, moi je vous reniais pour ma mère   ; mais ce subterfuge qui réussit auprès de la communauté où l’on vous croit ma tante par le sang et ma mère spirituelle, ce mensonge qui réussit pour le vulgaire, ne trompera point les hauts dignitaires de l’Église. Pour eux, vous êtes bien ma mère.
    Avec énergie   :
    – Eh bien, ce passé, il faut qu’il disparaisse sous une fortune éblouissante. Il faut que personne n’ose plus regarder dans votre vie d’autrefois   : vous en couvrirez les ombres d’une telle lumière que tous les yeux en seront éblouis.
    – En réalité, dit-elle, reculant devant cette perspective parce qu’elle ne

Weitere Kostenlose Bücher