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La Bataillon de la Croix-Rousse

Titel: La Bataillon de la Croix-Rousse Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Louis Noir
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tapageuses.
    Il serrait les poings avec rage.
    – Jeune prêtre, continua-t-il, je la suppliais de faire une fin pour que le scandale de sa vie s’oubliant, je pusse faire mon chemin. Elle s’y refusa jusqu’à cinquante ans, m’immobilisant pendant sept ans dans une cure de campagne, avant que je pusse entrer à l’Oratoire.
    Ce temps d’obscurité avait été le plus cruel de sa vie.
    – Enfin, continua-t-il, je lui demande de montrer un peu de courage pour mettre l’anneau épiscopal à mon doigt   ; elle me refuse et prend peur lâchement. Mais je lui parle de la crosse abbatiale pour elle, j’allume son ambition et elle n’hésite pas.
    S’irritant   :
    – Non, ce n’est pas une mère   ! Non, je ne dois rien à cette femme   ! Elle m’a conçu dans la luxure   ; elle m’a enfanté dans la boue, elle m’a barré les chemins de la vie   ; je ne vois plus en elle qu’une étrangère.
    Avec résolution   :
    – Non, elle ne sera jamais abbesse   ! Et le jour où elle deviendra un obstacle, je supprimerai l’obstacle en l’envoyant comme supérieure dans un couvent colonial.
    Souriant   :
    – Mais enfin, l’espoir de la crosse abbatiale va lui donner assez d’énergie pour conduire sœur Adrienne au Club. C’est tout ce que je veux d’elle pour le moment. Après… comme après…
    Soupirant   :
    – Heureux ceux qui sont aimés par leurs mères   ! Leur cœur n’est pas fermé comme le mien à toute tendresse, à tout amour.
    Il poussa un soupir.

Une rentrée – Aspect de la salle
    En prenant la séance comme prétexte à donner à sa mère pour justifier une sortie qu’elle devait trouver prématurée, Saint-Giles n’avait pas mal choisi car, nous le savons, à cette séance, Châlier devait parler pour la première fois depuis son aventure.
    Tout Lyon attachait une grande importance à ce que dirait Châlier en telle circonstance.
    Cette séance mémorable s’ouvrit à neuf heures du soir.
    Dans la salle, il y avait un millier de personnes.
    Dehors, beaucoup de Jacobins n’avaient pu trouver place.
    La foule était houleuse et mêlée.
    À l’intérieur, où cependant l’on n’entrait qu’avec des cartes, un œil exercé aurait été étonné de voir nombre de figures très fines surmontant des Carmagnoles.
    Dans les tribunes, au milieu d’un groupe de ces Jacobins à mains blanches, deux femmes   : l’une, la supérieure du couvent, l’autre, sœur Adrienne.
    Toutes deux tricotaient comme leurs voisines.
    À Lyon, où l’on n’aime pas être en retard sur Paris et où l’on est souvent en avance sur la capitale, les Jacobins avaient imposé aux femmes qui assistaient à leurs séances, une sorte d’impôt   : on distribuait de la laine et elles tricotaient des bas pour les soldats.
    Du reste, grand bruit de voix dans la salle, car le Tout-Lyon était là, le Lyon républicain comme le Lyon royaliste   : mais les hommes de ce dernier parti étaient déguisés   : les moins connus s’étaient contentés d’endosser la blouse et la carmagnole   ; les autres s’étaient ingéniés à trouver des travestissements sûrs.
    L’abbé Roubiès, sous un déguisement de petite vieille, la baronne, grimée en galopin des rues, criaient tous deux et vendaient des journaux   ; d’autres que nous ne nommerons pas pour éviter des énumérations fastidieuses, tous les personnages importants de ce drame enfin et beaucoup d’autres assistaient à cette rentrée de Châlier, empruntant aux basses classes leurs vêtements et leurs coiffures pour ne pas être reconnus.
    Étienne, en Auvergnat, était très réussi, mais il constatait avec désespoir que la baronne ne regardait que Saint-Giles.
    À chaque instant celui-ci s’en approchait sous prétexte de lui vendre ses journaux   ; mais Saint-Giles ne faisait point attention à ce moutard.
    Avec son coup d’œil d’artiste, il avait remarqué sœur Adrienne aux tribunes et son regard ne la quittait plus, ce qui semblait agacer beaucoup la baronne.
    Elle tournait autour de l’artiste avec tant d’insistance qu’elle risquait de se faire reconnaître, mais lui, tirant son carnet, s’était mis à faire un croquis de sœur Adrienne et il le poussait au portrait autant qu’il pouvait.
    Il demandait à ses voisins   :
    – Qui est donc cette citoyenne, là-haut, près de cette vieille   ?
    – Connais pas…   ! répondit-on.
    Comme, dans une foule, rares sont les artistes capables de deviner une

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