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La Bataillon de la Croix-Rousse

Titel: La Bataillon de la Croix-Rousse Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Louis Noir
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m’écouter.
    Le mot monsieur allait soulever des tempêtes si Châlier n’eut levé la main et imposé le silence.
    Une ardente curiosité s’était emparée de la foule.
    Que voulait cette jeune fille étrange   ?
    Que signifiait son poignard   ?
    Qu’avait-elle à dire   ?
    Châlier montrait un grand calme.
    – Parle, citoyenne, dit-il, nous écoutons Et à tous ceux qui l’entouraient   : – Quoique dise, quoique fasse contre moi cette femme, qu’on la laisse sortir en paix.
    Sœur Adrienne reprit d’une voix très douce   :
    – Monsieur, j’étais venue ici pour vous assassiner   ! Je croyais faire un acte de justice, je me trompais   ! Votre « sermon » (textuel) m’a éclairée. Vous êtes le Christ de Lyon et je vous ai vu passer, montant à votre calvaire. Je vous haïssais alors, aujourd’hui je donnerais ma vie pour sauver la vôtre   !
    Une tempête d’applaudissements monta de la salle et se prolongea dans les tribunes en roulements pareils au bruit du tonnerre   ; sous l’explosion de l’enthousiasme d’une foule en délire, sœur Adrienne inclina la tête et s’évanouit.
    Pendant que l’on s’empressait autour d’elle, que, sur l’ordre de Châlier on la transportait dans une salle où des femmes et un médecin lui donnaient leurs soins, il se produisit dans la salle un mouvement assez extraordinaire   : on voyait des groupes quitter précipitamment leurs bancs et sortir.
    Presque aussitôt ils étaient remplacés par des gens venus du dehors.
    Ceux qui s’en allaient étaient des royalistes.
    Pour eux, la partie était perdue   ; ils redoutaient maintenant d’être reconnus et écharpés sur place.
    Ceux qui rentraient étaient des Jacobins enchantés de pouvoir enfin pénétrer dans l’enceinte.
    On mettait les nouveaux venus au courant de ce qui s’était passé et l’on commentait l’évènement.
    Châlier, prévenu que sœur Adrienne avait repris connaissance, s’était rendu près d’elle.
    Elle lui avait rapidement raconté tout ce qui s’était passé et comment on l’avait poussée à l’assassinat.
    Dans la situation d’esprit où elle se trouvait, son cerveau, arrivé à un degré de surexcitation inouïe, jouissait d’une lucidité et d’une pénétration extraordinaire   ; une fois illuminée par la vérité, cette intelligence avait démêlé avec une rapidité de conception étonnante toute la trame de l’abbé Roubiès   : elle la dévoilait à Châlier et ne cessait de lui répéter   :
    – Prenez garde à vous   ! Votre mort est résolue.
    Peu à peu, cependant, les discours de sœur Adrienne se perdirent dans le vague et elle tomba dans l’état extatique, qu’une réaction cataleptique suivait toujours de très près.
    Tout à coup, Châlier, qui n’était jamais à court d’idées, venait d’en trouver une   ; elle était un peu théâtrale, mais elle ne manquait point de grandeur.
    – Combien de temps cette crise va-t-elle durer   ? demanda-t-il.
    – Mettons une heure, dit le médecin.
    – Docteur, mon bel ami, que l’on prépare tout pour conduire cette pauvre fille à l’asile que l’hospitalité républicaine va lui offrir.
    – Lequel   ?
    – Le plus magnifique que l’on puisse trouver dans Lyon. Si tu peux quitter la malade, viens et tu m’entendras émettre une proposition digne de l’antiquité.
    Le docteur, qui savait ne rien pouvoir pour abréger la crise, laissa sœur Adrienne aux mains de deux femmes qu’il constitua ses gardes-malades, et il suivit Châlier, curieux de connaître son idée.
    On attendait l’orateur à la tribune   : on l’y demandait   ; il était impossible qu’il n’y remontât point après cet incident dramatique.
    Il y reparut triomphant et y fut accablé par les transports des Jacobins qui avaient fait venir des fleurs, des couronnes, et qui les lui jetaient.
    Châlier n’eût point été un homme d’État s’il n’avait pas abusé de la situation, en l’exploitant à son profit.
    Il n’y manqua pas.
    Il raconta avec une verve originale et chaleureuse, en brodant éloquemment sur le thème, ce que sœur Adrienne lui avait révélé.
    Naturellement, il se posa en martyr du peuple et s’appuya sur les dangers qu’il avait courus pour prouver que les royalistes ne reculeraient plus devant rien et qu’il fallait combattre pour en finir.
    Puis, quand il eut galvanisé la salle, il l’apitoya sur le sort de cette pauvre jeune fille convertie à la

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