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La Bataillon de la Croix-Rousse

Titel: La Bataillon de la Croix-Rousse Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Louis Noir
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République par la magie de sa parole   ; il ne se décernait bien entendu ce brevet d’éloquence qu’en termes modestes.
    Puis, célébrant les beautés de ce grand caractère de femme qui venait de s’affirmer si noble, il s’écria   :
    – Citoyens,
    « C’est une âme fière et loyale que celle de cette jeune fille.
    « Elle est digne de l’amour d’un bon citoyen, celle qui s’est révélée devant vous, assez vaillante pour tuer celui qu’on lui avait dépeint comme un monstre   : assez sincère pour avouer devant tout un peuple le crime qu’elle allait commettre de bonne fois   ; assez stoïque pour n’écouter que son cœur et proclamer la vérité sur une abominable conspiration, dont les auteurs vont la poursuivre de leur haine.
    « Cette jeune fille n’a personne au monde pour la recueillir.
    « Il lui faut un foyer.
    « Personne que moi, voué hélas à une mort prochaine et inévitable pour la protéger.
    « Il lui faut un mari.
    « Ce soir donnons-lui le foyer, demain, un chaste amour, donnons lui un mari.
    « Citoyens,
    « Faisons quelque chose de grand   : décrétons que la femme de Lyon la plus vertueuse, proclamée telle ici même, aura comme étant la plus digne, l’honneur d’adopter cette orpheline que lui confient les Jacobins de Lyon.
    « Citoyens, vous allez voter, que chacun inscrive son nom sur un bulletin et l’on comptera les voix.
    « Jamais pareil hommage en aucun temps, en aucun lieu, n’aura été rendu à une citoyenne. »
    Un homme se leva, arrêtant l’explosion des bravos par un geste.
    C’était Saint-Giles.
    – Citoyens, dit-il, je pose hardiment et fièrement la candidature de ma mère que vous ne voyez jamais à vos séances parce qu’elle élève cinq orphelins pour la patrie.
    Châlier ne s’attendait pas à trouver quelqu’un de plus grand que lui.
    Les acclamations de la salle lui prouvèrent que trouver l’idée c’était bien, mais que s’en emparer c’était mieux.
    Ce fils si sûr de la vertu de sa mère enlevait tous les suffrages du peuple et la sympathie de la foule allait à lui avec un irrésistible élan.
    Nous l’avons dit, Châlier avait les faiblesses communes à la plupart des tribuns du peuple et à presque tous les orateurs.
    Il était ombrageux pour sa popularité.
    Le triomphe de Saint-Giles ne laissa point que de l’offusquer.
    Il lui parut que l’artiste lui escamotait assez indélicatement la gloire d’avoir trouvé une idée digne de l’antiquité.
    Il écoutait avec un sourire amer ce bruit des bravos et dit au docteur   :
    – Vraiment le peuple a des distractions incroyables. Tout à l’heure, il blâmait la légèreté de Saint-Giles quand celui-ci n’écoutait pas la plus sérieuse discussion (il voulait dire   : mon discours) La brutalité de ce jeune homme frappant un enfant avait révolté la sensibilité de la foule   ; la voilà maintenant qui le porte aux nues.
    – Pas lui, dit le docteur, mais sa mère qui le mérite   !
    – Sans doute, la mère est une bonne citoyenne, reprit Châlier les lèvres pincées. Mais vois donc, citoyen, comme le fils tranche du maître. Le voilà qui rédige lui-même la proposition concernant sa mère et la jeune fille   ; il change les termes de mon projet   : il y introduit pour ma protégée le titre de « pupille de la République ».
    – C’est un mot assez bien trouvé   ! dit le docteur.
    – Soit   ! Mais, par convenance, il aurait dû en référer à moi, auteur et rédacteur du projet.
    En ce moment, Châlier se sentit tirer par la basque de son habit et il se retourna. Il vit le petit crieur que Saint-Giles avait calotté.
    Le petit bonhomme lui faisait mystérieusement signe de se taire et de le suivre. Châlier devina un allié dans ce garçon qu’il reconnut.
    – Pardon, citoyen, dit-il au docteur. Je reviens dans un instant.
    Et il sortit à la suite de la baronne.

Perfidie de femme
    C’était bien en effet un secours qui arrivait à Châlier.
    La baronne montrait bien quelque peu trop d’audace en venant ainsi s’adresser à Châlier, même sous un déguisement   : mais, outre l’insouciance inouïe avec laquelle M me  de Quercy joua mille fois sa tête pendant la Révolution, outre ce courage joyeux et narquois qui faisait le fond de sa nature, elle ne risquait pas dans cette circonstance autant qu’on aurait pu le penser.
    Non loin de là, à la lueur des torches, trois bataillons bourgeois faisaient

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