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La belle époque

La belle époque

Titel: La belle époque Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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de l'après-midi. Au moins dans les relations de voisinage, Frank Lascelles parvenait à ses fins : l'expérience vécue ensemble réduirait un peu, pendant un certain temps, le gouffre entre les classes sociales.
    Quand Marie revint avec les enfants dans l'appartement situé en haut du commerce, elle trouva Alfred affalé sur le canapé du salon, les journaux du jour étalés autour de lui.
    —    Satisfaite du grand spectacle ?
    —    Oui, plutôt, répondit la jeune femme. Tous ces amateurs se tirent bien d'affaire.
    —    Il y avait plein de chevaux, et de jolies dames en cavalières, précisa Thalie.
    —    As-tu reconnu ta tante ? Elle suivait le roi Henri IV. A tout le moins, mercredi passé, elle le suivait.
    La fillette regarda sa mère, se demandant si elle devait reconnaître un membre de la famille honnie. À la fin, elle acquiesça d'un signe de tête.
    —    Allez vous préparer pour la nuit, déclara Marie, il se fait tard.
    Ils regagnèrent leur chambre respective sans discuter. Leur mère hésita un moment, puis demanda :
    —    Tu me fais une petite place ?
    —    Bien sûr, répondit Alfred en repliant les journaux pour les mettre sur la table.
    Elle s'assit près de lui, lui glissa à l'oreille après un court silence :
    —    Il s'en va cette nuit.
    —Je sais.
    Le regard de sa femme, intrigué, et même un peu inquiet, l'amena à préciser :
    —    Mercredi, j'ai rencontré son patron déguisé en Sauvage sur les plaines d'Abraham. Au cours de la conversation, il a évoqué le départ imminent de son assistant, et le sien très proche.
    —    Tu es rentré tard.
    —    Ce gars s'est montré très bavard.
    Marie jeta un regard en coin à son époux, soupçonnant que les deux hommes n'avaient pas fait que converser. James avait évoqué le « tempérament » de son employeur.
    —    Son départ t'attriste-t-il ? murmura-t-il après un moment de silence.
    L'inquiétude passa dans les yeux de la jeune femme, puis elle répondit :
    —    Pas vraiment, la parenthèse est fermée... Tout de même un peu, reconnut-elle après une pause.
    Alfred allongea la main pour la poser sur l'épaule de son épouse, l'attirer vers lui au point que la jeune femme se trouva appuyée contre son flanc. Elle laissa reposer sa tête sur sa poitrine.
    —    Il a évoqué... l'idée que je parte avec lui.
    —    ... Avant, ou après ?
    Marie demeura un moment interdite, puis risqua :
    —    Après, au moment où nous nous sommes quittés.
    —    Dans ce cas, l'offre contenait un peu de sincérité. Avant, les hommes promettent n'importe quoi.
    Après une longue pause, son époux demanda encore :
    —    Ta réponse ?
    —    Il n'a jamais été question de cela. Pour rien au monde je n'aurais quitté ma famille... ou mon mari.
    Alfred posa sa main sur la joue de sa femme, pour approcher sa tête de lui. Ses lèvres caressèrent la tempe. Soulagée, presque légère, elle précisa encore d'un ton quasi rieur :
    —    De toute façon, je suis certaine qu'il a été très soulagé que je ne donne pas suite à cette invitation.
    Tout près d'eux, une planche du parquet craqua légèrement. La jeune femme se releva à demi pour voir Thalie à l'entrée de la pièce.
    —    Que se passe-t-il ?
    —Je viens chercher un verre d'eau. Bonne nuit.
    —    Dans un moment, j'irai vous faire la bise, avec papa. Quelques instants plus tard, Thalie gratta à la porte de son frère, l'ouvrit pour marcher jusqu'au lit.
    —    Tu en veux ? demanda-t-elle en tendant le verre. Mathieu prit une gorgée, le lui remit. Avant de s'en aller,
    la fillette dit encore :
    —    Ils se sont réconciliés. Les choses sont revenues comme avant.
    Le ton trahissait son soulagement. Doucement, elle referma la porte derrière elle.
    Le lendemain, un peu avant midi, le son de la clochette signala l'entrée d'une cliente dans le commerce de la rue de la Fabrique.
    —    Madame Picard, salua Alfred en s'approchant d'elle, la main tendue. Vous venez enfin profiter des richesses de ma petite boutique.
    —    Ce serait trahir mon époux, qui fait de moi sa vitrine ambulante.
    —    Dans ce cas ?...
    Le marchand écartait les mains pour signifier son impuissance. Elisabeth fit trois pas en direction du comptoir, derrière lequel Marie ouvrait de grands yeux surpris.
    —    Madame, puis-je vous inviter à venir dîner avec moi ? J'aurais dû téléphoner, je

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