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La belle époque

La belle époque

Titel: La belle époque Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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contre cette «belle-mère». A ses yeux pourtant, il s'agissait d'une personne fort jolie et absolument charmante. Chaque fois que la jeune fille faisait mine de s'exprimer en ce sens, Eugénie pâlissait et murmuraient d'une voix sombre :
    —    Elise, c'est là toute la monstrueuse efficacité de cette femme à bien se faire voir. Si je pouvais parler... Mais j'ai juré à papa de me taire à jamais.
    Après cela, l'autre pouvait imaginer tomes sortes d'horreurs.
    Finalement, Élise Caron arriva chez les Picard un peu après cinq heures, vêtue d'une robe un peu poussiéreuse, pensa son hôtesse, et même des vestiges de toiles d'araignées dans ses cheveux bruns, lui sembla-t-il. Elle la conduisit dans le petit salon en la regardant de manière un peu suspecte, à tel point que la visiteuse demanda :
    —    Il y a quelque chose ? Il y a un miroir dans cette pièce ?
    —    Non, c'est juste que...
    Elle allongea la main pour promener ses doigts dans les cheveux de son amie.
    —Je me trompais, il n'y a rien.
    —    Tu sais, j'ai pris la peine de prendre un bain et de changer de vêtements, avant de venir.
    Le ton trahissait un certain agacement, aussi Eugénie décida de faire abstraction de son souci de propreté. Toutefois, elle exprima la réprobation qui la tenaillait depuis le matin :
    —    Quelle idée de te livrer à une corvée pareille !
    —    Ce n'est rien de bien méchant. Puis ma mère prétend que je dois savoir effectuer moi-même toutes les tâches dans une maison.
    —    Grand Dieu, pourquoi ? Il y a des domestiques pour cela.
    —    Elle a deux motifs. D'abord, elle affirme que l'on ne peut demander à des servantes de faire quelque chose que l'on ne peut réaliser soi-même, ne serait-ce que pour bien les superviser.
    Eugénie laissa échapper un soupir lassé, puis expliqua devant les yeux interrogateurs de son amie :
    —    Elle ferait une belle paire avec mon père. Celui-ci raconte la même chose. Edouard doit passer par tous les rayons et les services du magasin afin de connaître tous les postes de travail.
    —    Comme cela, un jour il pourra diriger l'entreprise en connaissance de cause, précisa la visiteuse. Personne ne pourra le berner.
    —    Alors qu'est-ce que cela donne d'être le grand patron, dans un beau bureau ? Son travail sera de dire aux autres quoi faire. Si tu veux mon avis, toutes ces tâches désagréables,
    c'est du temps perdu.
    Comme pour appuyer son point de vue, la jeune fille blonde allongea la main vers un guéridon, agita une petite clochette. Très vite, Jeanne arriva de la cuisine pour demander:
    —    Vous avez sonné, Mademoiselle ?
    —    Apportez-nous du thé.
    —    Nous devons manger très bientôt...
    —    Apportez-nous du thé, répéta Eugénie, une pointe d'impatience dans la voix. Avec des biscuits.
    La bonne esquissa une mauvaise révérence, se retira très vite pour aller chercher ce qu'on lui demandait. Plus tôt dans la journée, au moment de faire ses recommandations à son employée, Elisabeth aurait dû moins se soucier des facéties de son garçon et un peu plus des exigences tatillonnes de sa fille...
    —    Tu vois, décréta Eugénie, je ne comprends pas pourquoi j'apprendrais à faire du thé. Quelqu'un est là pour s'en occuper.
    —    ... Tu ne sais pas faire du thé ?
    Elise soulevait ses deux sourcils comme des accents circonflexes, hésitant entre un franc fou rire ou un visage impassible, pour ne pas heurter l'humeur facilement maussade de son amie.
    —    Là n'est pas la question. Des gens existent juste pour cela, préparer le thé ou les repas, ou faire le ménage... Quel autre motif pousse ta mère à t'apprendre à laver des rideaux? Tu as dit qu'elle en avait deux.
    —    Si je me retrouvais avec un fiancé dont la carrière démarre lentement... ou connaît des ratés, je devrais faire ma part dans la maison. La vie professionnelle d'un homme peut se révéler remplie d'aléas, autant me préparer en conséquence.
    Heureusement, le retour de la domestique, un plateau dans les mains, permit à Eugénie de revenir un peu de sa surprise. Elle versa le liquide dans les tasses, offrit du lait et du sucre, en tendit une à sa vis-à-vis avant de commenter :
    —: Voyons, cela ne se peut tout simplement pas. Tes parents ne te laisseront jamais épouser un homme qui ne saurait pas t'assurer un niveau de vie au moins égal à celui qu'ils t'offrent... A

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