Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La chapelle du Diable

La chapelle du Diable

Titel: La chapelle du Diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Tremblay
Vom Netzwerk:
de
     son oncle. Il ne pensa pas à atteler les chevaux. Empruntant le chemin éclairé
     par la lune, il courut et courut…
    Georges décida de faire le tour de la maison. Il envoya Jean-Marie du côté
     gauche tandis qu’il prenait l’autre. La neige était abondante et malgré la
     température très basse qui l’avait durcie, il était difficile pour les deux
     hommes d’avancer. Quand Georges parvint du côté ouest, il vit tout de suite le
     corps étendu, reconnut Pierre et essaya de courir dans la neige, ne réussissant
     qu’à trébucher. Il avait les mains et les pieds gelés. Il n’avait pas pris la
     peine de s’habiller. Jean-Marie, également à peine vêtu, ne put poursuivre et
     rebroussa chemin. Tremblant, désespéré, il ramassa une des couvertures
     rapportées de l’écurie et recula jusque sous la grande épinette qui bordait
     l’entrée de la maison. Il s’enveloppa de l’édredon et s’accota sur le tronc. En
     pleurant, il regarda, horrifié, la maison se consumer. Il fixait la porte
     d’entrée en priant, espérant, implorant qu’une silhouette en sorte. Georges
     réussit à se rendre près de son filleul. Des éclats de verre scintillaient dans
     la neige. Il ne se rendit pas tout de suite compte que l’enfant tenait quelque
     chose sous lui. Ce n’est qu’au moment où, doucement, il retourna Pierre que
     Georges aperçut le bébé. Avec la couverture de cheval qu’il n’avait pas lâchée,
     il recouvrit les deux seuls êtres qui semblaient s’être sortis du brasier. Assis
     dans la nuit glaciale, Hélène dans les bras, la tête de Pierre sur les genoux,
     Georges hurla.
    Longtemps, on raconterait, dans le village, après cette terrible tragédie,
     qu’on avait entendu cette longue plainte à des milles à la ronde.

    Au chevet de son fils, Julianna, inquiète, suivait à la lettre les directives
     du docteur. Les jambes de Pierre étaient gravement brûlées, de même que le bas
     de son dos. Dans un bassin d’eau bouillie, elle trempait des linges que
     Marie-Ange avait fait bouillir. Son Pierre avait perdu beaucoup de sang et le
     docteur avait dit que les prochains jours seraient cruciaux. Le curé avait donné
     les derniers sacrements. L’enfant était gravement blessé et il y avait de fortes
     chances qu’il s’ajoute à la liste de ces pauvres enfants décédés si
     tragiquement. Pour sa part, Hélène était sauvée. On parlait de miracle. Julianna
     avait encore peine à prendre conscience de l’horreur. Les paroles de son mari
     lui revenaient toujours en mémoire, tournant en un carrousel... Lorsqu’il était
     revenu de la ferme de Georges, hagard, portant Pierre dans ses bras,
     François-Xavier était entré, suivi d’Elzéar, de Jean-Marie et de Ti-Georges,
     Hélène serrée sur son cœur.
    — Où sont les autres ?
    — Y en a pas d’autres, avait-il répondu d’une voix blanche.
    « Y en a pas d’autres. Y en a pas d’autres. Y en a pas d’autres. Y en a pas
     d’autres… »
    Julianna reporta toute son attention sur son fils qui avait gémi. Il passait
     son temps à perdre conscience. Elle était fatiguée. Elle avait passé la nuit
     auprès de lui. À l’aube, le curé, le docteur et les hommes étaient retournés sur
     les lieux du drame. Les autres enfants dormaient encore sauf Yvette qui,
     réveillée par le bruit inhabituel, venait de descendre et de s’enquérir de ce
     qui se passait. Assise à côté de sa mère, elle berçait Hélène tandis que
     Marie-Ange s’affairait à découper d’autres languettes de drap qui serviraient de
     pansements propres. Yvette embrassa la petite tête aux cheveux noirs d’Hélène.
     Elle regarda son frère Pierre, allongé, blessé. Son cœur se serra. Elle l’aimait
     tant… Elle aurait dû le lui dire plus souvent. Elle ne comprenait pas trop tout
     ce qui s’était passé. Sa mère lui avait seulement dit, d’une voix étranglée par
     l’émotion, qu’il y avait eu un feu à la ferme de son oncle Georges et que Pierre
     avait été brûlé en sauvantHélène. Yvette prit son courage à
     deux mains et posa la question qui la démangeait depuis tout à l’heure :
    — Où sont les autres ?
    Julianna cessa d’éponger le front de son fils. Les larmes jaillirent de ses
     yeux. Elle murmura à sa fille la seule réponse qu’elle put.
    — Y en a pas d’autres…

    Les ruines fumaient encore. François-Xavier et Henry encadraient Ti-Georges.
     Jean-Marie et

Weitere Kostenlose Bücher