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La cote 512

La cote 512

Titel: La cote 512 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Thierry Bourcy
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juste fallu aux Français changer de côté les créneaux de tir pour se trouver bien installés et prêts à se défendre. Il restait seulement ça et là quelques traces des combats, parois éboulées, étais noircis, éclats d’obus ou de grenades fichés dans les portes des abris.
    — Flachon, on peut savoir ce que vous foutez ?
    Flachon leva les yeux au ciel et fit à Célestin une mimique catastrophée. Le nouvel arrivant était un homme massif, à la voix rauque, aux gestes brusques. Il portait les galons d’adjudant et, sur son visage, la marque d’une insondable bêtise.
    — C’est notre pote Célestin, le v’là revenu, expliqua Flachon.
    Célestin se mit au garde-à-vous et salua.
    — Soldat Célestin Louise, 134 e régiment, 22 e compagnie, 3 e section.
    — Repos. Qu’est-ce qui vous est arrivé ?
    — J’ai été soufflé par une explosion. On m’a retrouvé inanimé après l’attaque d’il y a deux jours.
    — La victoire d’il y a deux jours, précisa l’adjudant en insistant bien sur le mot « victoire ». Je suis l’adjudant Charic, et c’est moi qui commande votre section, en remplacement du lieutenant de Mérange. Il faut finir de remettre en état la tranchée. On est là pour tenir la position, et je vous jure qu’on la tiendra. Allez aider les autres.
    Célestin s’arma d’une masse et rejoignit Fontaine et Flachon qui, malgré l’eau de pluie qui ruisselait et qui semblait devoir tomber toujours d’un ciel qu’on ne voyait plus, s’acharnaient à remettre d’aplomb les parois de la tranchée. Charic s’éloigna et disparut dans un abri.
    — On n’a pas gagné au change, murmura Fontaine, dépité.
    — D’où il sort, lui ? demanda Célestin.
    — Paraît qu’il vient d’un bataillon disciplinaire. Avant la guerre, un jour qu’il avait bu, il a tué deux types dans sa chambrée pendant une bagarre.
    — À mon avis, ils veulent se débarrasser de lui.
    — C’est pas bon signe pour nous.
    Célestin attendit un moment puis leur posa la question qui lui brûlait les lèvres.
    — Et Mérange, ils l’ont enterré ?
    Fontaine fit une mimique d’ignorance.
    — Faudra que tu demandes aux territoriaux, c’est eux qui s’occupent de ça. Et ils ont bien du courage parce que moi, je le ferais pas. Et puis, c’est qu’il y en a eu des morts pour sa « victoire », comme il dit, l’adjudant Charic !
    — Où est-ce que je peux les trouver, les territoriaux ?
    — Vers la fin de l’après-midi, il y en a un groupe qui passe par ici, ils réparent une voie ferrée un peu plus loin.
    La journée passa, grise et froide. Célestin fit une pause pour aller aux feuillées. Peuch vint l’y rejoindre. Les hommes n’avaient plus de honte à s’accroupir ainsi l’un près de l’autre, le pantalon baissé, sur les planches jetées en travers de la fosse à merde. Louise en profita pour interroger le paysan.
    — Tu te souviens de l’attaque de l’autre jour… Tu étais dans la deuxième vague, toi aussi ?
    — Oui. Je ne suis pas le genre à me défiler, mais je ne serai jamais le premier non plus à aller me faire descendre.
    — Tu n’as rien vu de bizarre, quand le lieutenant s’est fait tuer ?
    — Des trucs bizarres, j’ai vu que ça, des hommes qui chialaient en perdant leurs tripes, d’autres qui sautaient en l’air, la tête d’un côté, le corps de l’autre, des Boches déjà morts, mais qui tiraient encore, accrochés à leur mitrailleuse… Pourquoi que tu demandes ça ?
    — Et quand tu es monté à l’assaut, il ne restait personne dans la tranchée ?
    — Pour ça, non, le lieutenant, justement, avait l’œil sur les tire-au-flanc. Tu le sais aussi bien que moi.
    Il se soulagea, poussa un soupir d’aise puis jeta soudain à Louise un regard soupçonneux.
    — C’est vrai que tu es flic. Tu fais une enquête ?
    — Mérange a été tué d’une balle dans le dos, Peuch.
    — Et alors ? Il est comme tous les autres, il est mort pour la France. Qu’est-ce que tu vas te monter la tête !
    Il se redressa, reboutonna son pantalon et s’éloigna en lançant à Célestin :
    — Et t’endors pas, l’adjudant nous laisse même pas le temps de chier !
    Les territoriaux passèrent comme prévu juste avant la nuit, trois types sombres, leurs outils sur l’épaule, maculés de fatigue et de boue. La section de Charic s’apprêtait à dîner, mais le fourrier s’était étalé dans un boyau, le rata était

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