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La Fausta

Titel: La Fausta Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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maître qui eut à leur disposition autre chose que des coups de trique, et que ce maître, ils croyaient bien l’avoir trouvé en la personne du chevalier de Pardaillan.
    Mais si peu perspicace qu’il fût, l’ancien chantre avait fort judicieusement fait cette remarque que son ancien patron, s’il avait été au fait de cette désertion, aurait commencé par le rosser sans plus attendre, et il en avait conclu, non sans raison, que s’il ne l’avait pas fait, c’est qu’il l’ignorait. Aussi, voyant que Belgodère ne relevait sa phrase par aucun argument frappant, respira-t-il plus librement et continua-t-il avec plus d’assurance :
    — Nous avons erré plusieurs jours autour de l’auberge et ne vous voyant pas revenir, pensant que pour des raisons… excellentes sans doute… vous aviez décidé de nous quitter… comme il nous fallait vivre quand même, nous nous sommes mis en quête d’un autre maître qui… en attendant votre retour… voulût bien nous donner le gîte et la pitance…
    — Bref, dit Belgodère, vous m’avez abandonné… Et ce nouveau maître que vous cherchez, l’avez-vous trouvé ?…
    — Nous avons eu cette fortune inouïe.
    — Ah ! ah ! fit narquoisement le bohémien, il est donc vrai que la chance favorise les sacripants de ton espèce. Enfin !… Et comment se nomme ce nouveau maître que vous avez eu la bonne fortune de rencontrer !…
    Ici Croasse eut un instant la velléité de nommer Pardaillan, mais le désir légitime qu’il avait d’éblouir par sa nouvelle position fit qu’il donna la préférence au duc, dont le titre était autrement pompeux et imposant que celui, modeste, de chevalier. Aussi répondit-il avec orgueil, en se rengorgeant :
    — C’est monseigneur le duc d’Angoulême !…
    Belgodère bondit, et n’en pouvant croire ses oreilles s’exclama :
    — Tu dis ?…
    — Je dis monseigneur le duc d’Angoulême, répéta complaisamment Croasse, qui pensait avoir abasourdi son interlocuteur.
    — Peste !… fit le bohémien qui réfléchissait profondément, mes compliments… Il est honorable pour moi d’être remplacé par un duc… un fils de roi… Mes compliments, monsieur Croasse.
    Croasse, qui n’entendait pas malice, se gonflait démesurément et oubliait presque le gourdin, cependant toujours aux mains du comédien. Celui-ci, toujours ironique, reprenait :
    — Tout cela ne me dit point comment et pourquoi je vous ai rencontré si inopinément, monsieur Croasse.
    — Ah ! voilà, dit M. Croasse, qui devant cette considération soudaine qu’on lui témoignait, reprenait de plus en plus son aplomb et oubliait de plus en plus aussi la raclée en expectative, voilà… Il paraît que mon jeune maître — à ce que j’ai cru comprendre du moins par des bribes de conversations surprises de-ci de-là — mon jeune maître est amoureux…
    — Oui da !
    — D’une jeune fille qui a disparu soudainement.
    — Est-ce possible !… fit Belgodère en serrant nerveusement son bâton, geste inquiétant, qui n’eût pas échappé à l’œil perspicace de maître Croasse l’instant d’avant, mais qui passa inaperçu tant l’ancien chantre se croyait maintenant digne de respect, et par conséquent à l’abri de la correction promise.
    — C’est comme j’ai l’honneur de vous le dire, reprit-il d’un air très digne.
    — Continuez, monsieur Croasse, votre récit est d’un intérêt palpitant.
    Encouragé par ces louanges d’autant plus flatteuses qu’il y était moins habitué de la part de ce maître qu’il sentait décidément fasciné, ébloui, maté, Croasse, de sa voix caverneuse, reprit :
    — Or il y a, paraît-il, dans ce couvent une bohémienne… Belgodère tressaillit.
    — Une bohémienne qui prédit l’avenir d’une façon miraculeuse… Mon jeune maître, monseigneur le duc, est venu ici pour la consulter, pensant qu’elle pourrait lui dire, peut-être, ce qu’est devenue la jeune fille… une noble demoiselle, belle comme le jour… dont il est amoureux.
    — En sorte que c’est pour consulter cette bohémienne… qui se trouve dans un couvent… que le duc d’Angoulême est venu ici ? C’est très remarquable !… Mais vous ? Comment vous ai-je trouvé devant cette palissade… que vous aviez escaladée ?…
    Croasse toussa légèrement, ce qui produisit un bruit semblable à celui de deux chaudrons fêlés qu’on heurterait violemment.
    — Moi ? dit-il, j’avais été laissé dans le

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