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La Fausta

Titel: La Fausta Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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gouttes sur son visage… Et ce fut ainsi qu’il atteignit la corde. Sans oser se retourner, il porta une main tremblante sur le nœud, qu’il commença à défaire… A ce moment, la condamnée, la victime poussa un soupir qui résonna dans la tête du bourreau comme la clameur des trompettes du jugement dernier. Il eut un violent recul en arrière… et il demeura immobile, ramassé sur lui-même, écoutant, luttant contre cette pensée épouvantable :
    — Elle se réveille… il faut que je la tue avant de la précipiter… Elle pourrait se sauver !…
    Il ajouta en grelottant :
    — Et puis… elle souffrirait trop… si elle se noyait tout de même… je dois tuer, non faire souffrir !…
    Alors il se retourna, avec un rauque grondement, une violence, par quoi il cherchait à s’exciter, bondit jusqu’à la condamnée, et s’agenouilla ou plutôt s’accroupit près d’elle, disposant les cordelettes de l’étranglement !…
    — Il faut qu’elle meure ! grogna-t-il, je dois agir… Encore celle-là !…
    La victime fit un mouvement… Des paroles à peine bégayées parvinrent jusqu’à l’oreille du bourreau.
    — Adieu, mère… ma mère chérie… Père ! Père !… Où es-tu ?…
    — Elle appelle sa mère, haleta le bourreau, livide d’angoisse… elle appelle son père… Comme sa voix est douce et triste… et comme elle me remue le cœur !…
    Une irrésistible curiosité s’emparait de lui ! Voir ! oh ! voir le visage de cette victime… de cette enfant étrangement vêtue comme une bohémienne… Oui… la voir !… lire peut-être sur sa figure le crime qui la condamnait. Il résistait encore à la tentation, que déjà ses doigts avaient délié le cordon qui maintenait le sac noir autour du cou, déjà il soulevait l’étoffe, déjà lui apparaissait l’adorable visage, les paupières closes sous ses longs cils, le front pur et la radieuse chevelure de Violetta… Il la contempla une longue minute, avec un indicible effarement devant cette parfaite harmonie de grâce, d’innocence et de beauté.
    — Qu’elle est belle ! fit-il dans un souffle rauque. Et elle va mourir !…
    Il devint pensif… Peu à peu, il oubliait ce qu’il faisait là et pourquoi il y était !…
    Puis, à force de la regarder, il sentit tout à coup comme un battement sourd et profond de son cœur, quelque chose qui pleurait et riait en lui, une joie délirante et une douleur prodigieuse, un bouleversement de son âme qui — si les âmes ont des yeux ! — fermait ses yeux, éblouie par un jet d’aveuglante et surhumaine clarté !…
    — Ah çà ! gronda-t-il en saisissant sa crinière de ses deux mains crispées, mais je deviens fou, moi !… Que vais-je imaginer là !… Seigneur Dieu ! Est-ce le châtiment suprême ! Vais-je sombrer dans la folie !… ce visage… oh ! ce visage !… il me rappelle… non !… c’est insensé !… l’enfant aurait cet âge-là ! elle aurait cette figure-là !… (Il eut un sanglot et un éclat de rire.) Ce sont bien ses cheveux, tout de même, ses beaux cheveux d’or… il n’y a pas à dire… c’est sa bouche… oh ! si je pouvais voir ses yeux ! (Le sanglot devint un rugissement, et le rire un râle.) Si c’était elle !… Ma fille ! hurla-t-il dans un cri terrible, en secouant la victime. Ma fille !… mon enfant !… Violetta ! Violetta !…
    Violetta ouvrit les yeux, les posa, timides et craintifs, sur le bourreau… Ce fut une seconde indescriptible, où l’on n’eût pu entendre que le souffle tragique du colosse agenouillé. Les yeux de l’enfant, soudain, s’emplirent de lumière… Elle tendit vaguement les bras, comme jadis, au pied du gibet, et avec un infini ravissement, murmura :
    — Mon père !… Mon bon petit papa Claude !…
    Claude jeta une déchirante clameur qui fit trembler les parois de la chambre.
    — Seigneur Dieu ! c’est elle ! c’est mon enfant !…
    Il se redressa et recula, comme si la joie furieuse et le doute encore l’eussent enveloppé d’un tourbillon. Ses mains énormes, secouées d’un tremblement convulsif, se tendaient vers elle, puis se reculaient vivement. Il n’osait la toucher ! Il riait et pleurait. Et il grommelait :
    — Comment, comment ! C’est mon enfant ?… Je ne suis pas fou ?… Oh !… Est-ce bien toi ?…
    L’enfant sourit divinement :
    — C’est moi, père !… C’est moi !
    Puis il se rapprocha tout d’un coup. Alors, avec une sorte

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