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La Fausta

Titel: La Fausta Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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suis peut-être la seule à qui vous puissiez parler franchement… Que vous ayez ou non voulu les barricades, vous n’en êtes pas moins le vainqueur des Valois. Duc, je vous le demande : jusqu’où prétendez-vous pousser la victoire ?
    Henri de Guise, connaissant de longue date la fourberie de Catherine, avait préparé ses batteries en conséquence. Cette noble simplicité, cette netteté absolue des paroles de Catherine, cette tranquillité d’âme en pareil moment le déroutèrent, le déconcertèrent. Il chercha les motifs de cette attitude extraordinaire.
    Sa véritable pensée fut celle-ci :
    « Je suis le plus fort. La vieille reine épuisée par vingt ans de guerres sourdes ou déclarées abandonne la lutte. Si je fléchis, je perds tout le bénéfice de ma position. Si je parle en vainqueur, j’obtiens tout… et le reste ! »
    — Madame, dit-il alors, ce n’est pas moi, vous le savez, qui ai fait les barricades. C’est le peuple de Paris qu’en vain j’ai essayé d’enchaîner. Ce qui a fait lever ce peuple, madame, vous le savez aussi : c’est la folie de votre malheureux fils livrant à M. d’O et à M. d’Epernon le droit de lever d’exorbitants impôts… les bourgeois étaient las de payer, madame.
    La reine approuva d’un geste.
    — Ce qui a exaspéré Paris, continua Guise en s’échauffant, c’est, pardonnez-moi, madame, d’obéir complètement à l’ordre que vous m’avez donné d’être franc, c’est l’hypocrisie de ce roi qui tantôt se donne à la Ligue et tantôt aux huguenots, c’est sa dépravation incroyable qui le fait s’entourer de mignons, c’est enfin l’immense souffle du royaume indigné réclamant un roi, un vrai roi…
    — Et ce vrai roi… c’est vous !…
    — Moi, madame !… Moi ou un autre ! gronda Guise perdant toute mesure. L’hérésie nous envahit. Il faudra recommencer la Saint-Barthélemy !… le peuple n’a plus d’argent ; les libertés des bourgeois sont supprimées, les seigneurs sont humiliés ; il faut sauver la France…
    — Et le sauveur… c’est vous !…
    — Moi, madame… Moi… ou un autre ! Qu’importe, pourvu que l’antique renom de la France ne sombre pas à tout jamais dans le ridicule et la honte des orgies entremêlées de processions hypocrites !…
    La reine fit ce même geste d’approbation qui venait d’étonner Guise et l’avait incité à dire toute sa pensée.
    — Tout ce que vous venez de dire, fit-elle, je le pensais. Mille fois j’ai prévenu mon fils. Mille fois je l’ai supplié de renvoyer ce d’Epernon et ce François d’O. Hélas ! on ne m’a pas écoutée… N’en parlons plus : je suis trop vieille et trop fatiguée pour lutter encore. Mais j’avoue que je mourrais le désespoir dans l’âme si cette affreuse calamité m’était réservée de voir passer le trône à un hérétique… à ce Béarnais maudit qui, en ce moment même, rassemble à La Rochelle une formidable armée…
    Guise pâlit et chancela presque sous le coup terrible que Catherine venait de lui porter tout en levant au ciel ses yeux mouillés de larmes. Henri de Béarn, roi de Navarre, était le seul qui pût lui tenir tête. C’était son cauchemar.
    La reine, qui avec une prodigieuse habileté semblait admettre que le trône de France était dès lors vacant, assomma donc Henri de Guise d’un vrai coup de massue en lui rappelant soudain ce redoutable compétiteur.
    — Hélas ! continua-t-elle, qui donc est capable d’arrêter le huguenot dans sa marche à la couronne ?… Mon fils en fuite, presque proscrit, sans soldats, ne peut rien… Et vous, mon cousin, comment feriez-vous la guerre au Béarnais ? Vous n’avez pas de troupes suffisantes, et pas d’argent pour en lever !…
    Ainsi, la question n’était plus de discuter les intérêts de Guise et d’Henri III… elle était d’empêcher le Béarnais de devenir roi de France !…
    — Ah ! madame, s’écria Guise, je mettrai le royaume à feu et à sang… mais Henri de Navarre n’arrivera pas à Paris !…
    — Quelle autorité avez-vous pour conduire à bien cette entreprise ? dit Catherine. Il faudrait donc tout d’abord vous faire proclamer roi ! C’est-à-dire déposer mon fils, ce qui serait un crime abominable…
    — Quelle que soit ma répugnance à ce crime, il faudra pourtant le commettre, madame !…
    Et le duc de Guise frappa du talon le parquet. Son visage s’enflamma. Ses yeux jetèrent de

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