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La Fausta

Titel: La Fausta Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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commencèrent aussitôt à se retirer.
    La reine mère debout, appuyée à son fauteuil, les regardait s’éloigner en souriant. Lorsque le dernier d’entre eux eut disparu, elle abaissa lentement son regard sur le bracelet talismanique qu’elle portait au poignet gauche et murmura :
    — Ruggieri n’a pas menti. Ces pierres diaboliques m’ont vraiment inspiré les paroles nécessaires… Oui, ajouta-t-elle avec un grondement de haine… les paroles qui tuent ! mon fils vivra !… mon fils régnera !… Et toi, misérable Lorrain, orgueilleux imbécile… prépare-toi à mourir !…
    Alors, elle se dirigea vers la tapisserie qui masquait la baie par où M. Peretti invisible avait assisté à cette scène ; elle le trouva assis sur son fauteuil, à la même place où Ruggieri l’avait conduit. La reine Catherine de Médicis demeura debout devant ce bourgeois, comme Guise était demeuré debout devant elle.
    — Votre Sainteté a vu et entendu ? demanda la Reine.
    — Oui, ma fille, répondit M. Peretti, tout vu, tout entendu…
    q

Chapitre 14 SIXTE QUINT
    M onsieur le duc de Guise, continua le pape, vous a rappelé que dans ma première jeunesse j’ai gardé des pourceaux. En effet, le maître chez qui j’étais domestique me jugeait tellement faible d’esprit et si peu apte à tout gouvernement qu’il n’avait même pas voulu me confier les vaches de son troupeau. On me donna les pourceaux à conduire à la pâture : c’est là, ma fille, que j’ai appris à conduire les hommes…
    Sur cette parole d’une formidable amertume, Sixte Quint laissa un instant retomber son front sur sa poitrine.
    — Devenu prêtre, continua-t-il comme s’il se fût parlé à lui-même, devenu cardinal, plus je montais, plus je m’apercevais que les hommes sont des pourceaux qu’il faut mener à coups de gaule. Lorsque Grégoire XIII mourut et qu’il s’agit de le remplacer, je me rappelai soudain que l’un des pourceaux que je gardais dans la campagne de Grotte-à-Mare était parvenu à imposer une sorte de despotisme sur tout le troupeau. Pourtant, il n’était ni le plus fort ni le plus violent. Au contraire, il tâchait de passer inaperçu, et même simulait la faiblesse : tandis que les autres se battaient, lui accaparait la meilleure place. Seulement quand ses camarades voulaient l’en déloger, alors il montrait un groin si terrible qu’aucun n’osait l’approcher. C’est ainsi que je suis devenu pape, ma fille !…
    Il se mit à rire doucement, mis en gaieté par ces malicieux souvenirs.
    — Savez-vous comment m’appelaient les cardinaux du conclave ?… Ils m’appelaient l’Ane !… Oui, ma fille, l’Ane de la Marche. Et c’est pour cela qu’ils m’ont élu… Et puis, ils croyaient que j’allais mourir, tellement j’étais courbé, penché vers la terre… Jugez de leur terreur lorsque je me redressai tout à coup, une fois élu !… Ce fut une bonne farce, ma fille. Cajetan seul me devina : « Sang du Christ, s’écria-t-il, l’Ane cherchait à terre les clefs de Saint-Pierre !… » Aussi j’aime bien Cajetan. C’est un homme. Votre Guise est pleutre, madame ! Votre Guise est un pourceau, madame !
    Sixte Quint s’accommoda dans son fauteuil et répéta en grognant :
    — Un pourceau…
    Il parlait sans colère, sans tristesse, et peut-être même sans mépris. Il faisait des constatations, c’était tout.
    — Les cardinaux ! reprit-il au bout d’un silence. Beau troupeau, oui ! Savez-vous pourquoi ils me haïssent ? Parce que j’ai voulu leur rappeler la doctrine du Christ, parce que j’ai dit aux prêtres que Pierre était pauvre. Je suis un mauvais pape, puisque je ne veux pas que les vicaires du Christ vivent comme des pourceaux…
    Le vieillard eut à ce moment un éclair de malice dans les yeux.
    — A des pourceaux, dit-il, il faut une Circé : ils en ont choisi une ! Les imbéciles ! Ils se figurent que je ne sais rien ! Ils me veulent la malemort, et pas un n’a eu le courage de sa haine ; pas un n’a accepté la redoutable mission de lutter contre Sixte Quint !… Il a fallu qu’une femme s’en mêlât, et c’est dans les ténèbres que la bataille est commencée…
    Il ajouta avec une majesté violente, presque terrible, en levant son doigt dans un geste de menace…
    — Je ne crains rien, puisque Dieu est avec moi !…
    A ces mots, Sixte se leva — cette fois sans aucun gémissement, et sans le secours de sa canne. La taille

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