Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La force du bien

La force du bien

Titel: La force du bien Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marek Halter
Vom Netzwerk:
la nuit dans la grange ! Impossible de leur dire non… Sans le savoir, ils ont dormi juste au-dessus de l’abri d’Abraham et de Rachel… L’un d’entre eux nous a fait une peur atroce. Il a cru sentir des odeurs bizarres. Il s’est mis à bougonner qu’il y avait, à part ses amis et lui, des gens dans la grange ! À force d’inspecter et de fouiner partout, il a fini par découvrir… les WC qui sont juste à côté du bâtiment ; ça l’a calmé, et il s’est endormi comme les autres. Le lendemain, ils sont partis et on ne les a plus revus. »
    Maria Szczesny éprouve de la nostalgie. Elle veut quitter cette grange. Elle en revient aux repas de fête passés ensemble, à la maison :
    « Avec toutes ces épreuves, avec les jours, les semaines, les mois qui s’écoulaient, Rachel et Abraham sont devenus des amis, et puis bien plus que des amis. En fait, ils faisaient partie de la famille. Notre père lui-même, qui, au début, se méfiait un peu, leur disait : “ Si nous, nous survivons à cette guerre, eh bien, vous survivrez avec nous ! ” Plus tard, dans les années quatre-vingt, je suis allée les voir en Israël. Abraham m’a reçue en me sautant au cou et en me disant : “ Maricha ! ” Et Rachel parlait encore de la soupe de ma mère qui l’a sauvée quand elle mourait d’épuisement, là-bas, dans la forêt. »
     
    Leszek et Kazimierz ont rendu visite à Rachel et à Abraham en Israël. Eux aussi, comme Maria, ont le sentiment d’aller retrouver des proches, des parents de toujours. Le lien qui les unit est indestructible. Inutile de leur demander si, le cas échéant, ils recommenceraient : Abraham et Rachel ne sont-ils pas de la famille  ?

11.
    «  Tu aimeras ton prochain comme toi-même . » Ce précepte biblique, repris dans les Évangiles, est souvent cité par les Justes. Comme si cette antique injonction suffisait à elle seule à expliquer leur geste.
     
    Freud ne croyait pas beaucoup à cette exigence idéale. « Non seulement, disait-il, notre prochain est rarement digne de notre amour », mais au contraire, le plus souvent, il a « droit à notre hostilité, voire à notre haine ».
    Pourquoi en serait-il autrement, se demande Freud, quand ce prochain « ne paraît pas avoir pour nous la moindre affection » ? Et même, « quand cela lui est utile, il n’hésite pas à nous nuire […] pourvu qu’il y trouve un plaisir quelconque ».
    Pour Freud, l’homme est toujours tenté de satisfaire son besoin d’agression aux dépens d’autrui. Alors, s’interroge le psychanalyste, quel secours l’homme peut-il trouver en sauvant son prochain ?
    L’histoire récente semble lui donner raison, même si les hommes et les femmes que j’ai rencontrés ne se sont pas posé la question. En effet, nous prévient-il, ceux-là ont répondu à « l’instinct de vie, qui se trouve lui aussi profondément enfoui en nous, mais qui nous procure également plaisir et satisfaction ».
    J’ai toujours été fasciné par la logique implacable des analyses de Freud. Mais, dans le cas des Justes, elles ne me satisfont pas tout à fait. Il y a bien sûr l’ autre que nous aimons par désir ; et il y a aussi cet autre que nous aimons par devoir : ce devoir, nous l’avons appris à l’école, à la maison ou encore à l’église. Il constitue le surmoi freudien. Mais quel est ce sentiment qui nous anime quand nous nous portons au secours d’une détresse sans en attendre aucun bénéfice ? Quel est ce mécanisme qui déclenche en nous ce geste suprême de solidarité : sauver une vie, des vies – y compris à l’égard d’êtres qui peuvent nous sembler étranges, voire étrangers ?
    «  Je mets devant toi la vie et la mort, la bénédiction et la malédiction… C’est la vie que tu choisiras . » Ce choix que nous propose le Deutéronome est-il ancré dans toutes les consciences ?
    Peut-être la Bible, en son temps, avait-elle déjà répondu à cette question. Elle nous apprend qu’Adam et Ève constituent le premier couple humain sur terre. Ce sont donc nos ancêtres. Ce couple peu fréquentable engendre deux fils. L’un va tuer l’autre. C’est ainsi que commence notre histoire…
    Mais un fait important semble nous avoir échappé : Caïn, qui tue son frère Abel, était innocent. Innocent comme le sont les enfants. Innocents parce que ignorants .
    Caïn ne sait pas ce qu’est la mort.
    Comment le saurait-il ?
    Il ne l’a jamais vue.
    Il

Weitere Kostenlose Bücher