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La Gloire Et Les Périls

La Gloire Et Les Périls

Titel: La Gloire Et Les Périls Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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quittai le château de Brézolles à
potron-minet, sachant que Louis, chaque jour, se levait tôt pour aller
inspecter nos positions autour de La Rochelle. J’avais donc intérêt à le
prendre au rebond du lit, si je voulais rencontrer.
    Je n’emmenai avec moi que le seul Nicolas, ne voulant pas
dégarnir Madame de Brézolles de mes Suisses, et aussi parce que l’encombrement
des chemins du camp retranché par les charrois et les soldats était tel que
deux cavaliers pouvaient plus facilement passer à travers ces embarras qu’une
troupe de treize hommes.
    Je voudrais dire un mot ici de mon écuyer Nicolas de Clérac.
J’étais aussi content de lui que je l’avais été peu de mon pauvre La Barge dont
les babillages infinis et l’incorrigible désobéissance m’avaient exaspéré. Tant
est que lorsque Nicolas entra à mon service, je lui fis de prime la plus
stricte défense d’ouvrir le bec et surtout de me poser questions. Mais
remarquant que mon nouvel écuyer, tout à l’inverse de La Barge, observait la
plus stricte discrétion, parlait peu mais pensait prou et, fin observateur des
hommes et des circonstances, me pouvait rendre en ce domaine des services bien
au-dessus de son âge et de son emploi, je résolus alors de lui lâcher quelque
peu la bride et, en fait, la lui lâchai si bien qu’il devint, par degrés
insensibles, ce que La Surie avait été pour mon père, en ses périlleuses
missions, non seulement un ami, mais parfois même un conseiller.
    Dès qu’il me vit à son lever, Louis me fit signe
d’approcher, et m’étant génuflexé devant lui, il me donna sa main à baiser,
grand signe de sa faveur, puisqu’il ne la donnait pas à tous.
    —  Sioac , dit-il en supprimant le « r »
de mon nom, comme il faisait en ses enfances (autre grand signe de la faveur
royale qui me toucha fort), je n’ai entendu que de bons rapports sur tes
Suisses et sur toi dans les combats et durant le siège de la citadelle de
Saint-Martin-de-Ré. Monsieur de Toiras n’est pas chiche de louanges à ton
endroit, tant pour ton courage au combat de Sablanceaux que pour tes habiles
entretiens avec Bouquingan [4] et le
soutien à lui-même apporté dans les moments les plus difficiles du siège de la
citadelle. Pour te rembourser de tes débours en cette expédition où tu m’as si
bien servi, le surintendant te comptera vingt-cinq mille écus, mais cela n’est
pas assez. Je suis si content de toi que je t’en ferai connaître sous peu des
effets de grande conséquence…
    La foule de courtisans de Cour qui se pressait au lever du
roi s’astreignait, à l’accoutumée, à rester coite par respect pour le trône,
mais n’y réussissait pas toujours et, cette fois-ci, n’y réussit pas du tout,
tant elle était surprise par ce que le roi, en public, venait de me promettre.
Il y eut alors comme un léger murmure qui courut au-dessus des échines courbées,
lequel le capitaine aux gardes Du Hallier aussitôt réprima par un :
« Allons, Messieurs ! » qui était à la fois paternel et
menaçant.
    Là-dessus, Louis me donna mon congé et je sortis de la
salle, mes pieds ne touchant plus le sol. Cependant, l’instant d’après, une
sorte de tristesse s’abattit sur moi que Nicolas ne fut pas sans apercevoir.
Mais, de prime, il ne m’en toucha mot, étant de ceux qui tournent leur langue
sept fois dans leur bouche avant que de parler.
    Au moment de quitter la maison du roi, je succédai [5] à tirer à part Du Hallier et lui
demandai où se trouvait Monsieur de Toiras.
    — À la pointe de Coureille.
    — Est-ce loin ?
    — À deux bonnes lieues de céans. Mais il vous faut un
laissez-passer, car vous aurez à traverser le camp et le diantre sait s’il est
bien gardé. Exempt ! appela-t-il en hurlant à gueule bec.
    C’était un hurlement tout militaire et de métier, car
l’exempt, fort attentif, se tenait à une toise de lui.
    — Fais-moi dans l’instant, dans l’instant ! hurla
Du Hallier derechef, comme si l’exempt allait se rebeller, un laissez-passer
pour ces deux gentilshommes, le comte d’Orbieu et…
    Là-dessus, envisageant Nicolas – ce qu’il n’avait pas
fait jusque-là, l’écuyer étant pour lui un grade à peine au-dessus du
cheval –, il s’écria, mais cette fois sans s’époumoner, tant est que,
compte tenu de son diapason habituel, vous eussiez dit un murmure…
    — Le diantre m’emporte, si ce n’est pas ce petit
morveux de Nicolas de

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