La Guerre Des Amoureuses
lit à rideaux et une
table sur laquelle s’étalaient des viandes et des confitures. Un valet
attendait. Olivier se demanda où était le propriétaire de la maison.
— Installez-vous, monsieur Hauteville. Et
mangez et buvez de tout votre soûl !
Olivier, affamé, suivit le conseil.
— Le roi m’a remis cent écus pour vous, ainsi
que le cheval pommelé que vous avez vu dans la cour. J’ai bien peur que vous n’ayez
pas beaucoup pillé…
— Non, monsieur, j’étais trop las.
— Ce n’est pas ainsi que vous ferez
fortune ! Mais c’est votre affaire. Je suis très fier que le roi ait
anobli un de mes hommes, mais vous savez que vous devez maintenant acheter un
fief, puisqu’il ne vous en pas offert un.
— Je n’ai pas encore eu le temps d’y
songer, monsieur le Baron, sourit Olivier.
— J’y ai pensé pour vous, rassurez-vous !
Le roi va établir des lettres patentes pour confirmer votre dignité, mais vous
ne serez noble que dans le royaume de Béarn. Son chancelier écrira ensuite au
roi de France qui, s’il l’accepte, vous fera parvenir des lettres de noblesse
qui devront ensuite être dûment enregistrées par un parlement. Tout cela
prendra du temps, d’autant qu’après notre victoire, Henri III sera mal
disposé envers nous ! plaisanta-t-il. Pour l’instant, vous pouvez posséder
un fief dépendant du roi de Navarre et faire enregistrer votre noblesse à Pau.
— Un fief ! Savez-vous comment je
dois faire ?
— Figurez-vous que, la dernière fois que
je suis venu en Béarn, un notaire de Nérac m’en a proposé un. Je l’ai acheté
pour mon fils, car il n’était pas cher ! Mais après l’avoir vu, j’ai
compris mon erreur : c’est une pauvre terre, je ne vous le cache pas. C’est
cependant un fief noble. Il a un joli nom et possède un droit de seigneurie.
— Vous me le vendriez ?
— Oui, si vous pouvez le payer. Je l’ai
acheté huit cents livres et je vous le laisse au même prix.
Olivier n’eut pas besoin de calculer. Il
disposait de beaucoup plus avec le butin qu’il avait gagné au cours des mois et
celui de Garde-Épée.
— Je vous l’achète, monsieur.
Rosny parut satisfait.
— Vous ne voulez pas le voir avant ?
— Je vous fais confiance, monsieur de
Rosny.
— Vous ne m’avez pas demandé le nom de ce
fief…
— C’est vrai, j’ai l’esprit ailleurs, répondit
Olivier qui se demandait où pouvait être Cassandre à cette heure.
— C’est le fief de Fleur-de-Lis [87] , vous pourrez donc vous faire appeler M. de Fleur-de-Lis.
Le maréchal de
Matignon ne s’approcha pas de Coutras. Henri aurait donc pu remonter vers le
nord pour s’attaquer à l’armée du roi de France, mais il ne voulut pas le faire,
d’autant qu’une certaine indiscipline se manifesta dans son armée. Beaucoup de
ses gentilshommes, à la fois harassés et suffisamment gavés de butin, reprirent
le chemin de leur château. Henri regagna finalement Nérac et Olivier de
Fleur-de-Lis dut le suivre sans revoir Cassandre de Saint-Pol qui se trouvait à
La Rochelle.
À Paris, la reine mère resta profondément
accablée par la défaite de Joyeuse.
— En toutes les batailles et rencontres
advenues en France depuis vingt-cinq ans, il n’était mort autant de
gentilshommes français qu’en cette malheureuse journée, dit-elle.
Le roi regretta sa noblesse décimée, mais peu
son ancien favori qu’il jugea mauvais serviteur, n’ayant jamais reçu l’ordre de
s’attaquer à Navarre. Cette défaite était un grand malheur, car elle le
laissait sans armée, sans gentilshommes, sans argent et sans pouvoir.
Contre toute attente, le duc de Guise battit
en deux rencontres l’armée des reîtres allemands venue soutenir les protestants.
Ainsi, la bataille de Coutras laissait face à face Henri de Navarre, soutenu à
la fois par les protestants et les royalistes légitimistes, et le duc de Guise,
appuyé par les communautés ligueuses catholiques.
Par sa politique, Henri III était parvenu
à briser les négociations entre Navarre et sa mère et à empêcher qu’on fasse
disparaître son beau-frère. Mais il en payait cher le prix. Jamais la haine des
protestants n’avait été si forte, et tout l’effort de la Ligue, soutenu par une
populace furieuse, était maintenant dirigé contre lui.
C’est donc après Coutras, seul dans son Louvre,
qu’il décida de se débarrasser du duc de Guise.
La part de vérité…
Ce récit, comme tous
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