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La Guerre Du Feu

La Guerre Du Feu

Titel: La Guerre Du Feu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: J.H. Rosny aîné
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avoir bataille. Les chiens, serrés les uns contre les autres, conscients de la puissance du nombre, exaltés par le sentiment de leur avance, tenaient soudain tête. Une impatience furieuse tordait les entrailles des loups. Et, dans la dernière cendre crépusculaire, les deux hordes oscillaient, vagues de chairs palpitantes et long déferlement de clameurs.
    Il n’y eut pas de mêlée. Quelques individus moins grégaires ayant continué la chasse, leur exemple prévalut. Parallèles, la file des chiens et celle des loups se menaçaient dans le soir de famine. L’opiniâtre poursuite, à la longue, inquiétait les hommes. Devant l’occident presque noir, parmi tant de corps sournois, ils sentaient la mort.
    Un groupe de chiens devança Gaw, qui marchait vers la gauche, et l’un d’eux, qui avait la taille d’un loup, s’arrêta, montra ses dents étincelantes et bondit. Le jeune homme, nerveusement, lança son harpon. Celui-ci s’enfonça dans le flanc de la bête, qui se mit à tournoyer, avec un long hurlement ; Gaw l’acheva d’un coup de massue.
    Au cri d’agonie, les chiens affluèrent : une solidarité plus forte que celle des loups les unissait, et, lorsqu’un d’entre eux était en danger, il leur arrivait de braver les grands carnivores. Naoh craignit l’attaque de toute la bande. Il rappela Nam et Gaw, afin d’intimider les bêtes. Serrés l’un à l’autre, les Nomades faisaient masse ; les chiens, étonnés, déferlèrent autour. Qu’un seul osât se précipiter, tous le suivraient et les os des hommes blanchiraient dans la plaine...
    Brusquement, Naoh darda une sagaie : un chien s’abattit, la poitrine trouée. Le chef, l’ayant saisi par les pattes arrière, le jeta dans un groupe de loups qui rabattait à droite. Le blessé y disparut, et l’odeur du sang, la proie facile exaspérant leur faim, les fauves se mirent à dévorer cette chair vivante. Alors, les chiens oublièrent les hommes et tous se ruèrent sur les loups.
    Tandis que la mêlée s’engageait, les Nomades avaient pris le galop. Une buée annonçait la rivière prochaine, et Naoh, par intervalles, discernait un miroitement. Deux ou trois fois, il s’arrêta pour s’orienter. À la fin, montrant une masse grisâtre qui dominait la rive, il dit :
    – Naoh, Nam et Gaw se riront des chiens et des loups.
    C’était un grand rocher qui formait presque un cube et s’élevait à cinq fois la hauteur d’un homme. Il n’était accessible que d’un seul côté. Naoh le gravit rapidement, car il le connaissait depuis des saisons nombreuses. Quand Nam et Gaw l’eurent suivi, ils se trouvèrent sur une surface plate, plantée de broussailles et même d’un sapin, où trente hommes pouvaient camper à l’aise.
    Là-bas, vers la plaine cendreuse, les loups et les chiens combattaient éperdument. Des rumeurs féroces, de longues plaintes vrillaient l’air humide ; les Nomades goûtaient la sécurité.
    Le bois gémit, le Feu darda ses langues rouges et ses fumées fauves, une large lueur s’épandit sur les eaux. Du roc solitaire se détachaient deux segments de rive nue ; les roseaux, les saules et les peupliers ne poussaient qu’à distance ; en sorte qu’on distinguait toutes choses à vingt portées de harpon...
    Cependant, des bêtes fuient la clarté et se cachent, ou accourent, fascinées. Deux chouettes s’élèvent sur un tremble, avec un cri funèbre, une nuée d’oreillardes tourbillonne, un vol éperdu d’étourneaux file à l’autre rive, des canards troublés abandonnent le couvert et se hâtent vers l’ombre, de longs poissons surgissent de l’abîme, vapeurs argentées, flèches de nacre, hélices cuivreuses. Et la lueur rousse montre encore un sanglier trapu, qui s’arrête et qui grogne, un grand élaphe, l’échine tremblotante, ses ramures rejetées en arrière, la tête sournoise d’un lynx, aux oreilles triangulaires, aux yeux cuivrés et féroces, apparue entre deux branches de frêne.
    Les hommes connaissent leur force. Ils mangent en silence la chair rôtie, joyeux de vivre dans la chaleur du Feu. La horde est proche ! Avant le deuxième soir, ils reconnaîtront les eaux du grand marécage. Nam et Gaw seront accueillis comme des guerriers : les Oulhamr connaîtront leur courage, leur ruse, leur longue patience, et les redouteront. Naoh aura Gammla en partage et commandera après Faouhm... Leur sang bout d’espérance, et, si leur pensée est courte, l’instinct est

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