La Jolie Fille de Perth (Le Jour de Saint-Valentin)
été promis de la part de l’aimable fille de Simon, il apprit seulement la nouvelle désolante que son père et elle étaient partis de grand matin avec un étranger qui se cachait le visage avec grand soin pour ne pas être reconnu : Dorothée, dont le lecteur connaît déjà les talens pour anticiper le mal et pour communiquer les mêmes idées aux autres jugea à propos d’y ajouter qu’elle ne doutait pas que son maître et sa jeune maîtresse ne fussent partis pour les montagnes, afin d’éviter la visite de deux ou trois appariteurs qui, au nom d’une commission nommée par le roi, étaient arrivés dans la maison après leur départ, y avaient fait une perquisition, avaient apposé leurs sceaux sur tous les endroits qui pouvaient contenir des papiers, et avaient laissé pour le père et la fille une sommation de comparaître un certain jour devant la cour de commission, à peine d’être déclarés proscrits. Dorothée eut soin de peindre tous ces détails alarmans sous les couleurs les plus sombres, et la seule consolation qu’elle offrit à l’amant affligé fut de l’informer que son maître l’avait chargée de lui dire de rester tranquillement à Perth, et qu’il recevrait bientôt de leurs nouvelles. Cet avis changea la première résolution de Smith, qui avait été de les suivre sur-le-champ sur les montagnes et de partager le destin qui pouvait leur être réservé.
D’ailleurs quand il réfléchit aux différentes querelles qu’il avait eues avec divers individus du clan de Quhele, et surtout à son altercation personnelle avec Conachar qui était alors devenu un chef puissant, il ne put s’empêcher de penser que son arrivée peu désirée sur le lieu où ils avaient trouvé une retraite pouvait nuire à leur sûreté, au lieu de leur être de quelque utilité. Il connaissait l’intimité habituelle de Simon avec le chef du clan de Quhele, et il en concluait justement que Glover y jouissait d’une protection que sa présence rendrait peut-être moins certaine, tandis que sa prouesse personnelle ne pouvait être pour lui qu’une bien faible ressource dans une querelle avec tout une tribu de montagnards vindicatifs. Cependant son cœur battait en même temps d’indignation quand il songeait que Catherine était au pouvoir du jeune Conachar, qu’il regardait comme un rival déclaré, et qui avait alors tant de moyens de faire valoir ses prétentions. Ce jeune chef ne pouvait-il faire de la main de la fille le prix de la sûreté du père ? Il croyait pouvoir compter sur l’affection de Catherine ; mais elle avait tant de désintéressement dans sa manière de penser, et une tendresse si vive pour son père, que si l’attachement qu’elle avait pour son amant était mis en balance contre la sûreté, peut-être contre la vie de celui à qui elle devait le jour, il ne pourrait guère douter que le premier sentiment ne se trouvât le plus léger. Tourmenté par des pensées sur lesquelles nous n’avons pas besoin d’insister plus long-temps, il résolut pourtant de rester chez lui, d’étouffer ses inquiétudes autant qu’il le pourrait, et d’attendre les nouvelles que le vieillard lui avait fait promettre. Elles arrivèrent, mais elles ne rendirent pas la tranquillité à son esprit.
Sir Patrice Charteris n’avait pas oublié sa promesse de communiquer à l’armurier les projets des fugitifs. Mais au milieu du tumulte qui fut occasionné par le mouvement des troupes, il ne put lui en porter lui-même la nouvelle. Il chargea donc son agent Henshaw de la lui apprendre. Or ce digne personnage était, comme le lecteur le sait, dans les intérêts de Ramorny, à qui il importait de cacher à tout le monde, et surtout à un amant aussi actif et aussi entreprenant que Henry, le lieu véritable de la résidence de Catherine, Henshaw annonça donc à l’armurier inquiet que son ami Glover était en sûreté dans les montagnes, et quoiqu’il affectât d’être plus réservé relativement à Catherine, il ne dit rien qui pût l’empêcher de continuer à croire qu’elle était, ainsi que son père, sous la protection du clan de Quhele. Mais il réitéra au nom de Sir Patrice l’assurance que le père et la fille étaient en parfaite sûreté, et que Henry ne pouvait mieux consulter ses propres intérêts et les leurs, qu’en attendant tranquillement le cours des événemens.
Le cœur déchiré, Henry Gow résolut donc de ne faire aucune démarche jusqu’à ce qu’il
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