La Jolie Fille de Perth (Le Jour de Saint-Valentin)
d’oublier cette promesse. Cependant si Votre Seigneurie peut donner des preuves détaillées…
Ici ils furent interrompus par des fanfares de trompettes.
Sa Grâce le duc d’Albany est scrupuleux aujourd’hui d’une manière qui lui est peu ordinaire, répondit Douglas. Mais il est inutile de parler en vain, il n’est plus temps, voici les trompettes de March, et je réponds qu’il galopera rapidement jusqu’à ce qu’il ait passé le pont du Sud. Nous entendrons parler de lui, et s’il en est ainsi que je le crois, nous ne le reverrons qu’avec toute l’Angleterre à sa suite.
– Qu’il nous soit permis de juger mieux le noble comte de March, dit le roi ; son caractère est impétueux, mais non pas vindicatif dans de certaines choses. Il a été, je ne dirai pas trompé, mais désappointé, et l’on doit lui pardonner plus qu’à un autre dans les circonstances présentes. Mais grâce au ciel ! tous ceux qui sont ici maintenant sont de la même opinion et de la même famille ; ainsi notre conseil ne peut plus être troublé par la désunion. – Père prieur, prenez, je vous prie, ces écritures, car il faut que vous soyez notre clerc comme à l’ordinaire. Maintenant aux affaires, milords, et nos premières délibérations doivent rouler sur cette révolte des hautes-terres.
– Le clan de Chattan et le clan de Quhele ou Kay, dit le prieur, sont sur le point de se déclarer une guerre plus formidable que jamais, suivant les derniers avis que nous avons reçus de nos frères de Dunkeld. Ces fils de Bélial ne parlent de rien moins que de s’entre-détruire les uns les autres. Leurs forces s’assemblent des deux côtés, et tous les pareils jusqu’au dixième degré doivent se réunir au Brattach {58} de leur tribu, ou encourir la punition du feu et de l’épée. La Croix de Feu s’est montrée partout comme un météore ; elle a éveillé des tribus étrangères et inconnues au-delà des rivages du frith de Murray. Que le ciel et saint Dominique nous protégent ! Mais si Vos Seigneuries ne trouvent aucun remède à ce mal, il s’étendra de tous côtés, et le patrimoine de l’Église sera exposé à la rage de ces Amalécites qui n’ont pas plus d’amour pour le ciel que de pitié pour leurs voisins. Puisse Notre-Dame nous garder d’eux ! On nous écrit que quelques-uns sont de véritables païens ; qu’ils adorent Mahomet et Termagant.
– Milords et parens, dit Robert, nous avons entendu combien ce cas est urgent, et vous pouvez désirer connaître mes sentimens avant de m’instruire de ce que votre propre sagesse vous suggère. En vérité je ne vois point d’autre remède que d’envoyer deux plénipotentiaires avec le pouvoir nécessaire pour pacifier leurs querelles, et les engager à mettre bas les armes et à se garder de toute violence les uns envers les autres, sous peine d’être responsables devant la loi.
– J’approuve le projet de Votre Grâce, dit Rothsay, et je certifie que le bon prieur ne refusera pas l’honorable mission de pacificateur. Son révérend frère, l’abbé des chartreux, enviera aussi un honneur qui ajoutera certainement deux éminentes recrues à l’immense armée des martyrs, puisque les montagnards font une bien faible différence entre les clercs et les laïques dans les ambassadeurs qu’on leur envoie.
– Royal lord de Rothsay, dit le prieur, si je suis destiné à la couronne du martyre, la Providence me conduira sans aucun doute sur la route où je dois l’obtenir. En attendant, si vous plaisantez en parlant de la sorte, je prie le ciel de vous pardonner et de vous donner assez de lumières pour voir qu’il serait plus honorable de consacrer vos armes à la défense de l’Église, maintenant dans un si grand danger, que d’employer votre esprit à railler ses ministres et ses serviteurs.
– Je ne raille personne, dit le jeune prince en bâillant, comme s’il était déjà ennuyé de ce sermon, ni ne refuse de prendre les armes. Cependant dans ce mois de février un manteau fourré convient mieux qu’un corselet d’acier ; et il me coûte tellement de revêtir ce froid attirail dans une saison si froide, que je voudrais que l’Église envoyât un détachement de saints montagnards pour terminer cette querelle. Il y en a quelques-uns des hautes-terres bien connus dans ce district, et par conséquent habitués au climat ; ils se battraient à la manière du joyeux saint George d’Angleterre. Mais je ne sais
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