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La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak

La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak

Titel: La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles De Coster
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soleil, grâces vous soient rendues, vous nous
réchauffez les reins ; cendres de Claes, vous nous réchauffez
le cœur, et nous dites que ceux-là sont bénis qui vaquent pour la
délivrance de la terre des pères.
    – J’ai faim, dit Lamme.

XIX
     
    Ils entrèrent dans une auberge, on leur y donna à souper dans
une salle haute. Ulenspiegel, ouvrant les fenêtres, vit de là un
jardin où se promenait une fillette avenante, bien en chair, les
seins ronds, la chevelure dorée, et vêtue seulement d’une cotte,
d’une jacque de toile blanche et d’un tablier troué de toile
noire.
    Des chemises et autres linges de femme blanchissaient sur des
cordes, la fillette, se tournant toujours vers Ulenspiegel, ôtait
des chemises des cordes, les y remettait, et souriant, et le
regardant toujours, s’asseyait sur des bandes de linge, se
balançant sur les deux bouts noués.
    Dans le voisinage Ulenspiegel entendait chanter un coq et voyait
une nourrice jouant avec un enfant dont elle tournait la face vers
un homme debout, disant :
    – Boelkin, faites des petits yeux à papa.
    L’enfant pleurait.
    Et la fillette mignonne continuait à se promener dans le clos,
déplaçant et replaçant le linge.
    – C’est une espionne, dit Lamme.
    La fillette mettait les mains sur ses yeux et, souriant entre
ses doigts, regardait Ulenspiegel.
    Puis, à pleines mains, relevant ses deux seins, elle les
laissait retomber, et se balançait de nouveau sans que ses pieds
touchassent le sol. Et les linges en se détressant la faisaient
tourner comme une toupie, tandis qu’Ulenspiegel voyait ses bras nus
jusqu’aux épaules, blancs et ronds au soleil pâle. Tournant et
souriant, elle le regardait toujours. Il sortit pour l’aller
trouver. Lamme le suivit. À la haie du clos, il chercha une
ouverture pour y passer, mais il n’en trouva point.
    La fillette, voyant le manège, regarda de nouveau souriant entre
ses doigts.
    Ulenspiegel tâchait de passer à travers la haie, tandis que
Lamme, le retenant, lui disait :
    – N’y va point, c’est une espionne, nous serons brûlés.
    Puis la fillette se promena dans le clos, se couvrant la face de
son tablier, et regardant à travers les trous pour voir si son ami
de hasard ne viendrait pas bientôt.
    Ulenspiegel allait d’un élan sauter par-dessus la haie, mais il
en fut empêché par Lamme qui, lui prenant la jambe, le fit choir,
disant :
    – Corde, glaive et potence, c’est une espionne, n’y va
point.
    Assis par terre, Ulenspiegel se débattait contre lui. La
fillette cria, poussant sa tête au-dessus de la haie :
    – Adieu, messire, qu’Amour tienne pendante Votre
Longanimité.
    Et il entendit un éclat de rire moqueur.
    – Ah ! dit-il, c’est à mon oreille comme un faisceau
d’épingles !
    Puis une porte se ferma bruyamment.
    Et il fut mélancolique.
    Lamme lui dit, le tenant toujours :
    – Tu énumères les doux trésors de beauté perdus ainsi à ta
honte. C’est une espionne. Tu tombes bien quand tu tombes. Je vais
faire ma crevaille à force de rire.
    Ulenspiegel ne sonna mot, et tous deux remontèrent sur leurs
ânes.

XX
     
    Ils cheminaient ayant chacun jambe de ci jambe de là sur leur
baudet.
    Lamme, remâchant son dernier repas, humait l’air frais
joyeusement. Soudain Ulenspiegel lui cingla d’un grand coup de
fouet son séant, formant bourrelet sur la selle.
    – Que fais-tu la, s’écria Lamme piteusement.
    – Quoi ? répondit Ulenspiegel.
    – Ce coup de fouet, dit Lamme.
    – Quel coup de fouet ?
    – Celui que je reçus de toi, repartit Lamme.
    – Du côté gauche ? demanda Ulenspiegel.
    – Oui, du côte gauche et sur mon séant. Pourquoi fis-tu cela,
vaurien scandaleux ?
    – Par ignorance, répondit Ulenspiegel. Je sais très bien ce que
c’est qu’un fouet, très bien aussi ce que c’est qu’un séant à
l’étroit sur une selle. Or, en voyant celui-ci large, gonflé, tendu
et dépassant la selle, je me dis : Puisqu’on n’y peut pincer
avec le doigt, un coup de fouet n´y saurait non plus pincer avec la
mèche. Je fis erreur.
    Lamme souriant à ce propos, Ulenspiegel poursuivit en ces
termes :
    – Mais je ne suis pas seul en ce monde à pécher par ignorance,
et il est plus d’un maître sot étalant sa graisse sur la selle d’un
âne qui me pourrait rendre des points. Si mon fouet pécha à
l’endroit de ton séant, tu péchas bien plus lourdement à l’endroit
de mes jambes en les empêchant de courir derrière la fille

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