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La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak

La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak

Titel: La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles De Coster
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chemins à l’aune de vagabondage.
    Mais Nele répondit toute rouge et fâchée :
    – Que n’en fîtes-vous autre chose ?
    – Voilà, dit Soetkin, qu’elle pleure maintenant ; tais-toi,
mon homme !

LXII
     
    Ulenspiegel vint un jour à Nuremberg et s’y donna pour un grand
médecin vainqueur de maladies, purgateur très illustre, célèbre
dompteur de fièvres, renommé balayeur de pestes et invincible
fouetteur de gales.
    Il y avait à l’hôpital tant de malades qu’on ne savait où les
loger. Le maître hospitalier, ayant appris la venue d’Ulenspiegel,
vint le voir et s’enquit de lui s’il était vrai qu’il pût guérir
toutes les maladies.
    – Excepté la dernière, répondit Ulenspiegel ; mais
promettez-moi deux cents florins pour la guérison de toutes les
autres, et je n’en veux pas recevoir un liard que tous vos malades
ne se disent guéris et ne sortent de l’hôpital.
    Il vint le lendemain audit hôpital, le regard assuré et portant
doctoralement sa trogne solennelle. Etant dans les salles, il prit
à part chaque malade, et lui parlant :
    – Jure, disait-il, de ne confier à personne ce que je vais te
conter à l’oreille. Quelle maladie as-tu ?
    Le malade le lui disait et jurait son grand Dieu de se
taire.
    – Sache, disait Ulenspiegel, que je dois par le feu réduire l’un
de vous en poussière, que je ferai de cette poussière une mixture
merveilleuse et la donnerai à boire à tous les malades. Celui qui
ne saura marcher sera brûlé. Demain, je viendrai ici, et, me tenant
dans la rue avec le maître hospitalier, je vous appellerai tous
criant : « Que celui qui n’est pas malade trousse son
bagage et vienne ! »
    Le matin, Ulenspiegel vint et cria comme il l’avait dit. Tous
les malades, boiteux, catarrheux, tousseux, fiévreux, voulurent
sortir ensemble. Tous étaient dans la rue, de ceux-là même qui
depuis dix ans n’avaient pas quitté leur lit.
    Le maître hospitalier leur demanda s’ils étaient guéris et
pouvaient marcher.
    – Oui, répondirent-ils, croyant qu’il y en avait un qui brûlait
dans la cour.
    Ulenspiegel dit alors au maître hospitalier :
    – Paye-moi, puisqu’ils sont tous dehors et se déclarent
guéris.
    Le maître lui paya deux cents florins. Et Ulenspiegel s’en
fut.
    Mais le deuxième jour, le maître vit revenir ses malades dans un
pire état que celui où ils se trouvaient auparavant, sauf un qui,
s’étant guéri au grand air, fut trouvé ivre en chantant dans les
rues : « Noël au grand docteur
Ulenspiegel ! »

LXIII
     
    Les deux cents florins ayant couru la prétantaine, Ulenspiegel
vint à Vienne, où il se loua à un charron qui gourmandait toujours
ses ouvriers, parce qu’ils ne faisaient pas aller assez fort le
soufflet de la forge :
    – En mesure, criait-il toujours, suivez avec les
soufflets !
    Ulenspiegel, un jour que le
baes
allait au jardin,
détache le soufflet, l’emporte sur ses épaules, suit son maître.
Celui-ci s’étonnant de le voir si étrangement chargé, Ulenspiegel
lui dit :
    –
Baes
, vous m’avez commandé de suivre avec les
soufflets, où faut-il que je dépose celui-ci pendant que j’irai
chercher l’autre ?
    – Cher garçon, répondit le
baes
, je ne t’ai pas dit
cela, va remettre le soufflet à sa place.
    Cependant il songeait à lui faire payer ce tour. Dès lors, il se
leva tous les jours à minuit, éveilla ses ouvriers et les fit
travailler. Les ouvriers lui dirent :
    –
Baes
, pourquoi nous éveilles-tu au milieu de la
nuit ?
    – C’est une habitude que j’ai, répondit le
baes
, de ne
permettre à mes ouvriers de ne rester qu’une demi-nuit au lit
pendant les sept premiers jours.
    La nuit suivante, il éveilla encore à minuit ses ouvriers.
Ulenspiegel, qui couchait au grenier, mit son lit sur son dos et
ainsi chargé descendit dans la forge.
    Le
baes
lui dit :
    – Es-tu fou ? Que ne laisses-tu ton lit à sa
place ?
    – C’est une habitude que j’ai, répondit Ulenspiegel, de passer
les sept premiers jours, la moitié de la nuit sur mon lit et
l’autre moitié dessous.
    – Eh bien, moi, répondit le maître, c’est une seconde habitude
que j’ai de jeter à la rue mes effrontés ouvriers avec la
permission de passer la première semaine sur le pavé et la seconde
dessous.
    – Dans votre cave,
baes
, si vous voulez, près des
tonneaux de
bruinbier
, répondit Ulenspiegel.

LXIV
     
    Ayant quitté le charron et s’en retournant en Flandre, il dut

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