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La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak

La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak

Titel: La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles De Coster
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se
donner à louage d’apprenti à un cordonnier qui restait plus
volontiers dans la rue qu’à tenir l’alène en son ouvroir.
Ulenspiegel, le voyant pour la centième fois prêt à sortir lui
demanda comment il lui fallait couper le cuir des empeignes
    – Coupes-en, répondit le
baes
, pour de grands et de
moyens pieds, afin que tout ce qui mène le gros et le menu bétail
puisse y entrer commodément.
    – Ainsi sera-t-il fait,
baes
, répondit Ulenspiegel.
    Quand le cordonnier fut sorti, Ulenspiegel coupa des empeignes
bonnes seulement à chausser cavales, ânesses, génisses, truies et
brebis.
    De retour à l’ouvroir, le
baes
voyant son cuir en
morceaux :
    – Qu’as-tu fait là, gâcheur vaurien ? dit-il.
    – Ce que vous m’avez dit, répondit Ulenspiegel.
    – Je t’ai commandé, repartit le
baes
, de me tailler des
souliers ou puisse entrer commodément tout ce qui mène les bœufs,
les porcs, les moutons, et tu me fais de la chaussure au pied de
ces animaux.
    Ulenspiegel répondit :
    –
Baes
, qui donc mène le verrat, sinon la truie, l’âne
sinon l’ânesse, le taureau sinon la génisse, le bélier sinon la
brebis, en la saison où toutes bêtes sont amoureuses ?
    Puis il s’en fut et dut rester dehors.

LXV
     
    On était pour lors en avril, l’air avait été doux, puis il gela
rudement et le ciel fut gris comme un ciel du jour des morts. La
troisième année de bannissement d’Ulenspiegel était depuis
longtemps écoulée et Nele attendait tous les jours son
ami :
    – Las ! disait-elle, il va neiger sur les poiriers, sur les
jasmins en fleurs, sur toutes les pauvres plantes épanouies avec
confiance à la tiède chaleur d’un précoce renouveau. Déjà de petits
flocons tombent du ciel sur les chemins. Et il neige aussi sur mon
pauvre cœur.
    » Où sont-ils les clairs rayons se jouant sur les visages
joyeux, sur les toits qu’ils faisaient plus rouges, sur les vitres
qu’ils faisaient flambantes ? Où sont-ils, réchauffant la
terre et le ciel, les oiseaux et les insectes ? Las !
maintenant, de nuit et de jour, je suis refroidie de tristesse et
longue attente. Où es-tu, mon ami Ulenspiegel ? »

LXVI
     
    Ulenspiegel, approchant de Renaix en Flandre, eut faim et soif,
mais il ne voulait point geindre, et il essayait de faire rire les
gens pour qu’on lui donnât du pain. Mais il riait mal toutefois, et
les gens passaient sans rien donner.
    Il faisait froid : tour à tour il neigeait, pleuvait,
grêlait sur le dos du vagabond. S’il passait par les villages,
l’eau lui venait à la bouche rien qu’à voir un chien rongeant un os
au coin d’un mur. Il eût bien voulu gagner un florin, mais ne
savait comment le florin pourrait lui tomber dans la gibecière.
    Cherchant en haut, il voyait les pigeons qui, du toit d’un
colombier, laissaient, sur le chemin, tomber des pièces blanches,
mais ce n’étaient point des florins. Il cherchait par terre sur les
chaussées, mais les florins ne fleurissaient pas entre les
pavés.
    Cherchant à droite, il voyait bien un vilain nuage qui
s’avançait dans le ciel, comme un grand arrosoir, mais il savait
que si de ce nuage quelque chose devait tomber, ce ne serait point
une averse de florins. Cherchant à gauche, il voyait un grand
fainéant de marronnier d’Inde, vivant sans rien faire :
    – Ah ! se disait-il, pourquoi n’y a-t-il pas de
floriniers ? Ce seraient de bien beaux arbres !
    Soudain le gros nuage creva, et les grêlons en tombèrent dru
comme cailloux sur le dos d’Ulenspiegel :
    – Las ! dit-il, je le sens assez, on ne jette jamais de
pierres qu’aux chiens errants. – Puis, se mettant à
courir :
    – Ce n’est pas de ma faute, se disait-il, si je n’ai point un
palais ni même une tente pour abriter mon corps maigre. Oh !
les méchants grêlons ; ils sont durs comme des boulets. Non.
ce n’est pas de ma faute si je traîne par le monde mes guenilles,
c’est seulement parce que cela m’a plu. Que ne suis-je
empereur ! Ces grêlons veulent entrer de force dans mes
oreilles comme de mauvaises paroles. – Et il courait :
    – Pauvre nez, ajoutait-il, tu seras bientôt percé à jour et
pourras servir de poivrier dans les festins des grands de ce monde
sur lesquels il ne grêle point. – Puis, essuyant ses
joues :
    – Celles-ci, dit-il, serviront bien d’écumoires aux cuisiniers
qui ont chaud près de leurs fourneaux. Ah ! lointaine
souvenance des sauces d’autrefois ! J’ai faim. Ventre

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