Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak

La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak

Titel: La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles De Coster
Vom Netzwerk:
guéri.
    –
Jesus God en Maria !
dit la vieille ;
laisse-moi te baiser, glorieux pèlerin, qui as vu le Pape et
pourras aussi guérir mon chien.
    Mais Ulenspiegel, ne se souciant point des baisers de la
vieille, lui dit :
    – Ceux qui ont touché des lèvres la sainte pantoufle ne peuvent,
endéans les deux ans, recevoir les baisers d’aucune femme.
Donne-moi à souper quelques bonnes carbonnades, un boudin ou deux
et de la bière à suffisance, et je ferai à ton chien une voix si
claire qu’il pourra chanter les
avés
en
la
au
jubé de la grande église.
    – Puisses-tu dire vrai, geignit la vieille, et je te donnerai un
florin.
    – Je le ferai, répondit Ulenspiegel, mais seulement après le
souper.
    Elle lui servit ce qu’il avait demandé. Il mangea et but tout
son soûl, et il eût bien, par gratitude de gueule, embrassé la
vieille, n’était ce qu’il lui avait dit.
    Tandis qu’il mangeait, le vieux chien mettait les pattes sur ses
genoux pour avoir un os. Ulenspiegel lui en donna plusieurs, puis
il dit à l’hôtesse :
    – Si quelqu’un avait mangé chez toi et ne te payait pas, que
ferais-tu ?
    – J’ôterais à ce larron son meilleur vêtement, répondit la
vieille.
    – C’est bien, repartit Ulenspiegel ; puis il mit le chien
sous son bras et entra dans l’écurie. Là, il l’enferma avec un os,
sortit de sa gibecière la peau du mort, et, revenant près de la
vieille, il lui demanda si elle avait dit qu’elle enlèverait son
meilleur vêtement à celui qui ne lui payerait point son repas.
    – Oui, répondit-elle
    – Eh bien ! ton chien a dîné avec moi et il ne m’a pas payé
je lui ai donc enlevé, suivant ton précepte, son meilleur et son
seul habit.
    Et il lui montra la peau du chien mort.
    – Ah ! dit la vieille pleurant, c’est cruel à toi, monsieur
le médecin. Pauvre chiennet ! il était, pour moi, veuve, mon
enfant. Pourquoi m’enlevas-tu le seul ami que j’eusse au
monde ? Je puis bien mourir maintenant.
    – Je le ressusciterai, dit Ulenspiegel.
    – Ressusciter ! dit-elle. Et il me caressera encore, et il
me regardera encore, et il me lèchera encore, et il fera encore
aller en me regardant son pauvre vieux bout de queue !
Faites-le monsieur le médecin, et vous aurez dîné gratis ici, un
dîner bien coûteux, et je vous donnerai encore plus d’un florin
par-dessus le marché.
    – Je le ressusciterai, dit Ulenspiegel ; mais il me faut de
l’eau chaude, du sirop pour coller les jointures, une aiguille et
du fil et de la sauce de carbonnades ; et je veux être seul
durant l’opération.
    La vieille lui donna ce qu’il demandait ; il reprit la peau
du chien mort et s’en fut à l’écurie.
    Là, il barbouilla de sauce le museau du vieux chien, qui se
laissa faire joyeusement ; il lui traça une grande raie au
sirop sous le ventre, il lui mit du sirop au bout des pattes et de
la sauce à la queue.
    Poussant trois fois un grand cri, il dit alors :
Staet
op ! staet op. ik ‘t bevel, vuilen hond !
    Puis, mettant prestement la peau du chien mort dans sa
gibecière, il bailla un grand coup de pied au vivant et le poussa
ainsi dans la salle de l’auberge.
    La vieille, voyant son chien en vie et se pourléchant, voulut
tout aise l’embrasser ; mais Ulenspiegel ne le permit pas.
    – Tu ne pourras, dit-il, caresser ce chien qu’il n’ait lavé de
sa langue tout le sirop dont il est enduit ; alors seulement
les coutures de la peau seront fermées. Compte-moi maintenant mes
dix florins.
    – J’avais dit un, répondit la vieille.
    – Un pour l’opération, neuf pour la résurrection, répondit
Ulenspiegel. Elle les lui compta. Ulenspiegel s’en fut jetant dans
la salle de l’auberge la peau du chien mort et disant :
    – Tiens, femme, garde sa vieille peau : elle te servira à
rapiécer la neuve quand elle aura des trous.

LXVII
     
    Ce dimanche-là, eut lieu à Bruges, la procession du Saint-Sang.
Claes dit a sa femme et à Nele de l’aller voir et que, peut-être,
elles trouveraient Ulenspiegel en ville. Quant à lui, disait-il, il
garderait la chaumine en attendant que le pèlerin y rentrât.
    Les femmes partirent à deux ; Claes, demeuré à Damme,
s’assit sur le pas de sa porte et trouva la ville bien déserte. Il
n’entendait rien sinon le son cristallin de quelque cloche
villageoise, tandis que de Bruges lui arrivaient, par bouffées, la
musique des carillons et un grand fracas de fauconneaux et de
boîtes d’artifice tirés

Weitere Kostenlose Bücher