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La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak

La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak

Titel: La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles De Coster
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haut-de-chausses. Nele était près de lui agaçant contre la
cigogne Titus Bibulus Schnouffius qui, se lançant sur elle et se
reculant tour à tour, piaillait de sa voix la plus claire. La
cigogne, debout sur une patte, le regardant grave et pensive,
rentrait son long cou dans les plumes de sa poitrine. Titus Bibulus
Schnouffius, la voyant paisible, piaillait plus terriblement. Mais
soudain l’oiseau, ennuyé de cette musique, décocha son bec comme
une flèche dans le dos du chien qui s’enfuit en criant :
    – À l’aide !
    Claes riait, Nele pareillement, et Soetkin ne cessait de
regarder dans la rue, cherchant si elle ne verrait point venir
Ulenspiegel.
    Soudain elle dit :
    – Voici le prévôt et quatre sergents de justice. Ce n’est pas à
nous, sans doute, qu’ils en veulent. Il y en a deux qui tournent
autour de la chaumine.
    Claes leva le nez de dessus son ouvrage.
    – Et deux qui s’arrêtent devant, continua Soetkin.
    Claes se leva.
    – Qui va-t-on appréhender en cette rue ? dit-elle. Jésus
Dieu ! mon homme, ils entrent ici.
    Claes sauta de la cuisine dans le jardin, suivi de Nele.
    Il lui dit :
    – Sauve les carolus, ils sont derrière le contre-cœur de la
cheminée.
    Nele le comprit, puis voyant qu’il passait par-dessus la haie,
que les sergents le happaient au collet, qu’il les battait pour se
défaire d’eux, elle cria et pleura :
    – Il est innocent ! il est innocent ! ne faites pas de
mal à Claes mon père ! Ulenspiegel, où es-tu ? Tu les
tuerais tous deux !
    Et elle se jeta sur l’un des sergents et lui déchira le visage
de ses ongles. Puis criant : « Ils le
tueront ! » elle tomba sur le gazon du jardin et s’y
roula éperdue.
    Katheline était venue au bruit, et, droite et immobile,
considérait le spectacle disant, branlant la tête : « Le
feu ! le feu ! Creusez un trou : l’âme veut
sortir. »
    Soetkin ne voyait rien, et parlant aux sergents entrés dans la
chaumine :
    – Messieurs, que cherchez-vous en notre pauvre demeure ? Si
c’est mon fils, il est loin. Vos jambes sont-elles
longues ?
    Ce disant, elle était joyeuse.
    En ce moment Nele criant à l’aide, Soetkin courut dans le
jardin, vit son homme happé au collet et se débattant sur le
chemin, près de la haie.
    – Frappe ! dit-elle, tue ! Ulenspiegel, où
es-tu ?
    Et elle voulut aller porter secours à son homme, mais l’un des
sergents la prit au corps, non sans danger.
    Claes se débattait et frappait si fort qu’il eût bien pu
s’échapper, si les deux sergents auxquels avait parlé Soetkin ne
fussent venus en aide à ceux qui le tenaient.
    Ils le ramenèrent, les deux mains liées, dans la cuisine où
Soetkin et Nele pleuraient à sanglots.
    – Messire prévôt, disait Soetkin, qu’a donc fait mon pauvre
homme pour que vous le liiez ainsi de ces cordes ?
    – Hérétique, dit l’un des sergents.
    – Hérétique, repartit Soetkin ; tu es hérétique, toi ?
Ces démons ont menti.
    Claes répondit :
    – Je me remets en la garde de Dieu.
    Il sortit ; Nele et Soetkin le suivirent pleurant et
croyant qu’on les allait aussi mener devant le juge. Bonshommes et
commères vinrent à elles ; quand ils surent que Claes marchait
ainsi lié parce qu’il était soupçonné d’hérésie, ils eurent si
grande peur, qu’ils rentrèrent en hâte dans leurs maisons en
fermant derrière eux toutes les portes. Quelques fillettes
seulement osèrent venir à Claes et lui dire :
    – Où t’en vas-tu, charbonnier ?
    – À la grâce de Dieu, fillettes, répondit-il.
    On le mena dans la prison de la commune ; Soetkin et Nele
s’assirent sur le seuil. Vers le soir, Soetkin dit à Nele de la
laisser pour aller voir si Ulenspiegel ne revenait point.

LVIX
     
    La nouvelle courut bientôt dans les villages voisins que l’on
avait emprisonné un homme pour cause d’hérésie et que l’inquisiteur
Titelman, doyen de Renaix, surnommé l’inquisiteur Sans-Pitié,
dirigeait les interrogatoires. Ulenspiegel vivait alors à
Koolkerke, dans l’intime faveur d’une mignonne fermière, douce
veuve qui ne lui refusait rien de ce qui était à elle. Il y fut
bien heureux, choyé et caressé, jusqu’au jour où un traître rival,
échevin de la commune, l’attendit un matin qu’il sortait de la
taverne et voulut le frotter de chêne. Mais Ulenspiegel, pour lui
rafraîchir sa colère, le jeta dans une mare d’où l’échevin sortit
de son mieux, vert comme un crapaud et trempé

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