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LA LETTRE ÉCARLATE

LA LETTRE ÉCARLATE

Titel: LA LETTRE ÉCARLATE Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nathaniel Hawthorne
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cette apparence, le pasteur était autant dire certain que son interlocuteur savait quel entretien venait d’avoir lieu dans la forêt et n’ignorait pas qu’aux yeux de son malade, il n’était plus un ami sûr mais un ennemi entre tous acharné. Les deux hommes sachant ainsi à quoi s’en tenir, il eût été, semble-t-il, naturel qu’un peu de leur savoir s’exprimât en paroles. Mais il est singulier de constater tout le temps qui, souvent, s’écoule avant que les mots donnent corps aux choses. Il est également curieux de voir avec quelle impunité deux personnes qui décident tacitement d’éviter un sujet peuvent l’approcher de tout près et s’en écarter sans y toucher. Le pasteur ne redoutait pas que Roger Chillingworth allât expressément parler avec lui de leur situation nouvelle vis-à-vis l’un de l’autre. Et pourtant le médecin se coula, à sa façon ténébreuse, terriblement près du secret.
    – Ne vaudrait-il pas mieux, demanda-t-il, user ce soir de mes pauvres talents ? En vérité, cher seigneur, il nous faut faire de notre mieux afin de vous donner force et vigueur pour votre sermon du Jour de l’Élection. Les gens attendent en cette occasion, de grandes choses de vous ne pouvant s’empêcher de craindre que l’année à venir ne trouve leur pasteur parti.
    – Oui, pour un autre monde, répondit le Révérend Dimmesdale avec une pieuse résignation. Dieu veuille que ce soit pour un monde meilleur car, en toute bonne foi, je ne crois guère, en effet, que je m’attarderai auprès de mon troupeau pendant toutes les saisons d’une nouvelle année ! Mais, en ce qui concerne vos médecines, mon bon docteur, en mon état présent, je n’en ai vraiment nul besoin.
    – Je me réjouis qu’il en soit ainsi, répondit le médecin. Il se peut que mes remèdes, si longtemps administrés en vain, commencent à présent à faire leur effet. Quel homme heureux je serais et ayant bien mérité de la Nouvelle-Angleterre s’il m’était donné de parfaire cette cure !
    – Je vous remercie de tout cœur, très vigilant ami, dit le Révérend Dimmesdale avec un grave sourire, et ne peux vous revaloir vos bons offices que par mes prières.
    – Les prières d’un juste valent de l’or ! répliqua le vieux Roger Chillingworth en s’en allant. Oui, ce sont là espèces qui ont cours en la Jérusalem Nouvelle étant marquées au coin du Prince qui là-haut bat monnaie !
    Resté seul, le pasteur appela une servante et demanda des aliments qu’il se mit à manger avec un appétit dévorant. Puis jetant au feu les feuillets du sermon qu’il avait en train, il en commença aussitôt un autre.
    Sa plume allait sous l’impulsion d’un tel courant d’émotion que le Révérend Dimmesdale se crut inspiré et se demanda seulement comment la Providence pouvait trouver séant de faire passer la solennelle musique de ses oracles par un instrument aussi indigne que lui. Mais enfin, laissant ce mystère se résoudre tout seul, ou rester à jamais non résolu, il poursuivit sa tâche avec une ardeur trempée d’extase.
    Et ainsi sa nuit passa très vite, aussi vite qu’un coursier ailé qu’il eût chevauché bride abattue. L’aurore parut et se glissa, rougissante, entre les rideaux. Puis le soleil se leva et jeta dans le cabinet de travail un rayon doré qui vint se poser juste sur les yeux éblouis du Révérend Dimmesdale, toujours assis à sa table, la plume aux doigts et une vaste, incommensurable étendue de papier écrit derrière lui.

CHAPITRE XXI – LE JOUR FÉRIÉ DE NOUVELLE-ANGLETERRE
    Le matin du jour où le nouveau Gouverneur allait recevoir son mandat des mains du peuple, Hester Prynne et la petite Pearl arrivèrent de bonne heure sur la Place du Marché. Elles la trouvèrent fourmillante déjà d’artisans et autres habitants plébéiens de la ville. À cette foule se mêlaient des personnages de rude allure que leurs costumes de peaux de daim disaient appartenir aux groupements d’Européens qui, dans la forêt, entouraient la petite capitale de la colonie.
    En ce jour, comme en tous les autres jours fériés des sept dernières années, le vêtement d’Hester était de grossière étoffe grise. Non tant par sa teinte que par une indéfinissable particularité de sa coupe, il l’effaçait ; tandis que la lettre écarlate la retirait de ce crépuscule pour l’illuminer en quelque sorte d’un jour moral. Quant à son visage, depuis si longtemps familier aux

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