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La Louve de France

La Louve de France

Titel: La Louve de France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Druon
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accomplir cette pénible besogne.
Ce fut Henry Tors-Col qui, sans joie excessive, eut à se mettre en selle pour
aller, accompagné du comte de La Zouche et de Rhys ap Owell, battre la côte de
l’ouest.
    À peu près dans le même temps, le
comte de Charlton arriva du Shropshire ramenant le comte d’Arundel enchaîné.
Pour le Lord de Wigmore ce fut là une éclatante revanche, car Edmond Fitzalan,
comte d’Arundel, avait reçu du roi une importante partie des biens saisis à la
famille Mortimer, et s’était fait conférer le titre de Grand Juge de Galles qui
avait appartenu au vieux Mortimer de Chirk.
    Roger se contenta de laisser Arundel
debout devant lui tout un quart d’heure, sans lui adresser la parole, le
regardant seulement des pieds à la tête, et s’offrant la satisfaisante
contemplation d’un ennemi vivant qui bientôt serait un ennemi mort.
    Le jugement d’Arundel, et sous les mêmes
chefs d’accusation que ceux retenus contre le Despenser le Vieux, fut
rapidement expédié, et la décapitation du comte donnée en réjouissance à la
ville de Hereford et aux troupes qui y stationnaient.
    On remarqua que, pendant le
supplice, la reine et Roger Mortimer se tenaient par la main.
    Le jeune prince Édouard avait eu ses
quinze ans trois jours plus tôt.
    Enfin le 20 novembre une insigne
nouvelle arriva. Le roi Édouard avait été pris par le comte de Lancastre, en
l’abbaye cistercienne de Neath, dans la basse vallée de la Towe.
    Le roi, son favori, son chancelier,
y vivaient cachés depuis plusieurs semaines sous des habits de moines ;
Édouard occupait son attente d’un sort meilleur en travaillant à la forge de
l’abbaye, passe-temps qui lui distrayait l’esprit de trop penser.
    Il était là, torse nu, le froc
descendu sur les reins, la poitrine et la barbe éclairées par le feu de la
forge, les mains environnées d’étincelles, tandis que le chancelier tirait le
soufflet et que Hugh le Jeune, d’un air lamentable, lui passait les outils,
quand Henry Tors-Col s’encadra dans la porte, le heaume incliné vers l’épaule
et dit :
    — Sire mon cousin, voici le
temps venu de payer pour vos fautes.
    Le roi laissa échapper le marteau
qu’il tenait ; la pièce de métal qu’il forgeait resta à rougeoyer sur
l’enclume. Et le souverain d’Angleterre, son large torse pâle tout tremblant,
demanda :
    — Cousin, cousin, que va-t-il
advenir de moi ?
    — Ce que les barons et hauts
hommes du royaume en décideront, répondit Tors-Col.
    À présent Edouard attendait,
toujours avec son favori, toujours avec son chancelier, dans le petit manoir
fortifié de Monmouth, à quelques lieues de Hereford, où Lancastre l’avait
conduit et enfermé.
    Adam Orleton, accompagné de son
archidiacre Thomas Chandos, et du grand chambellan William Blount, s’en fut
aussitôt à Monmouth pour réclamer les sceaux royaux que Baldock continuait de
transporter.
    Édouard, quand Orleton eut exprimé
sa requête, arracha de la ceinture de Baldock le sac de cuir qui contenait les
sceaux, s’entoura le poignet des lacets du sac comme s’il voulait s’en faire
une arme, et s’écria :
    — Messire traître, mauvais
évêque, si vous voulez mon sceau, vous viendrez me le prendre par force et
montrerez qu’un homme d’Église a contraint son roi !
    Le destin avait décidément désigné
Monseigneur Adam Orleton pour d’exceptionnelles tâches. Il n’est pas courant
d’ôter à un roi les attributs de son pouvoir. Devant cet athlète furieux,
Orleton, les épaules tombantes, les mains faibles, et n’ayant d’autre arme que
sa canne à fragile crosse d’ivoire, répondit :
    — La remise se doit accomplir
de par votre vouloir, et que les témoins en constatent. Sire Édouard,
allez-vous obliger votre fils, qui est à présent mainteneur du royaume, à se
commander son propre sceau de roi plus tôt qu’il n’y comptait ? Par
contrainte, toutefois, je puis faire saisir le Lord chancelier et le Lord
Despenser que j’ai ordre de conduire à la reine.
    À ces mots, Edouard cessa de
s’inquiéter du sceau pour ne plus penser qu’à son favori bien-aimé. Il détacha
de son poignet le sac de cuir, le jeta au chambellan William Blount comme si ce
fût devenu soudain un objet négligeable et, ouvrant les bras à Hugh,
s’écria :
    — Ah non ! vous ne me
l’arracherez point !
    Hugh le Jeune, amaigri, frissonnant,
s’était jeté contre la poitrine du roi. Il claquait des dents,

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