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La lumière des parfaits

La lumière des parfaits

Titel: La lumière des parfaits Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hugues De Queyssac
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documents ?
    Je savais, de longue pratique, que l’eau n’était point bonne pour la santé ! Elle était bonne pour les grenouilles, pas pour un noble pèlerin en quête d’indulgence plénière !
    Je me saisis du pichet et en balançai le contenu dans le feu. Curieusement, les flammes, après avoir marqué leur surprise, se révoltèrent, ronflèrent et jaillirent plus haut d’un éclat bleu, au point que je redoutai une nouvelle catastrophe : un feu de cheminée dans le château du comte d’Œttingen.
     
    L’esprit est plus serein quand le corps est repu. Après une rapide ablution, je m’essuyai avec ma chainse de nuit et me dirigeai, deux étages plus bas, vers les cuisines pour y piocher quelques reliefs.
    La chambre des écuyers était déserte, draps et couvertures tendus sur leur châlit. Aucun habit, contrairement à leur habitude, ne se répandait sur les coffres ou sur le carrelage. Étrange. Eux, aussi désordonnés qu’Arnaud de la Vigerie ! Aurait-on remis de l’ordre pendant mon troublant sommeil ?
    En quête de l’escalier en caillemaçon qui menait aux cuisines, je me trompai de direction et, au bout du couloir, je me figeai sur le seuil de la salle des fêtes où, sous l’imposante voûte en berceau, trois scènes représentaient, peintes sur la façade ouest, des chevaliers tournoyants qui s’affrontaient à la lance, sous le regard émerveillé de nobles dames juchées sur un eschalfaud.
    Piqué par la curiosité, je me dirigeai, sans le savoir, vers une autre salle où je faillis heurter la hure d’un énorme sanglier à dextre et un coq tétra à senestre, empaillés l’un et l’autre.
    Peu sensible aux goûts animaliers et à l’exhibition des trophées de chasse du comte, je poursuivis mon inspection des lieux jusqu’à atteindre la tribune de la chapelle. Je fis un rapide signe de croix.
    J’avais trop de choses à confesser pour m’y attarder sur l’heure et descendis par un autre escalier à vis qui serpentait dans le donjon jusqu’à la cour supérieure de la Kernbourg, où, la veille, le capitaine d’armes nous avait montré l’entrée des cuisines. Les gardes apostés devant les portes me laissèrent passer avec indifférence ; des consignes devaient avoir été données et je n’eus pas à le regretter.
    De gracieuses servantes dressèrent aussitôt sous mes yeux ébaudis, pâtés, tranchoirs et miches de pain aux graines de cumin et de sésame. Elles ne parlaient pas notre langue, mais elles durent me prendre pour le chevalier de Montfort, car elles me proposèrent avec moult gestes de l’eau que je refusai poliment. Elles s’esbouffèrent à gueule bec et puisèrent dans un tonnel un gros pichet de vin qu’elles remplirent à ras bord en gloussant.
     
    Une heure plus tard, je rejoignis mon logis, bien décidé à gratter les parchemins pour continuer de narrer à la princesse Échive de Lusignan le fruit de mes recherches, de mes suppositions, de mes doutes et de mes aventures, ainsi que je l’avais régulièrement fait jusqu’à présent si les évènements me le permettaient.
    Quel ne fut pas mon étonnement lorsque je vis que les draps du lit que je partageai avec Foulques avaient été changés, que la courtine était immaculée et que tout avait été rangé dans un ordre parfait. Presque trop parfait. Trop parfait pour être honnête et ne pas révéler quelques malicieuses intentions. Mais de qui ? Je vérifiai derechef le coffre et portai la main à mon col : sa clef y était suspendue par un lacet qui côtoyait la médaille de la Vierge de Roc-Amadour que je portais en guise de sportelle depuis notre pèlerinage en la cité mariale.
    Point de clef… mais la clef était dans le trou de la serrure. Dans l’état dans lequel je me trouvais ce matin, rien d’étonnant si je ne l’avais pas remarqué lors de ma première inspection du coffre. En revanche, le cordon avait disparu. De plus en plus étrange. Après avoir effectué une nouvelle visite de mon coffre, je découvris que tous mes linges y étaient délicatement rangés, de bas en haut : chainses, surcots, chausses, bottes, etc.
    Les précieux documents reposaient toujours dans le double-fond du coffre. La mécanique secrète qui en commandait l’ouverture ne semblait pas en avoir été forcée. Bien malin, icelui ou icelle qui aurait pu mettre la main dessus, me rassurai-je peut-être un peu trop vite.

    Le surlendemain de notre arrivée, ce fut moi, cette fois, qui

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