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La lumière des parfaits

La lumière des parfaits

Titel: La lumière des parfaits Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hugues De Queyssac
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von Forstner. Une seule phrase sur deux lignes :
    Sustine et abstine
    Mors ultima ratio
    Suivie du sceau et du seing de Winrich von Kniprode.
    Par ces quelques mots de passe, le grand-maître me faisait savoir qu’il n’ignorait pas ce code secret. Celui que le père Louis-Jean m’avait donné sur le seuil du confessionnal de la cathédrale de Famagouste avant de passer les pieds outre ; la baronne Éléonore de Guirande ayant prétendu ne connaître que les trois premiers mots.
     
    Après deux semaines de bonne fortune de mer, des vents favorables et deux escales, l’une dans un port du royaume du Danemark, l’autre dans le port d’Amsterdam, en pays hollandais, nous longeâmes les côtes de la presqu’île de Quiberon.
    J’avais passé une bonne partie du temps en la compagnie du mestre-capitaine qui baragouinait un mélange de français et d’allemand avec un accent guttural et un peu nazzzillard. Il m’avait initié à l’art de tracer la route sur une carte, de relever la position du bateau à l’aide d’un astrolabe, de mesurer l’angle d’un azimut, la nuit par temps clair, entre deux godets d’un épais et capiteux vin de Hongrie.
    D’un naturel jovial et communicatif, j’en appris plus, grâce à lui, que je n’en aurais jamais appris dans les traités de navigation de l’Ordre.
    À bord, il n’y avait que quatre règles : le respect de la discipline, l’exécution immédiate des ordres qu’il donnait, le bon cap à suivre, des voiles bien étarquées.
     
    Un beau matin, il me montra du doigt, sur la carte, le point où il devait faire relâche avant de poursuivre sa route vers La Rochelle : le port d’Auray, un port situé dans un bras de mer à l’intérieur du golfe du Mor’bihan alimenté par la rivière du Bono. Un golfe où, m’apprit-il, il y avait autant d’îles que de jours dans l’année. Avant d’ajouter, en me faisant un clin d’œil : « par marée baaazzze   ! »
    Moult récifs et de hauts fonds en rendaient les abords dangereux, si l’on ne savait pas se jouer des courants particulièrement violents au jusant, profiter d’une marée montante pour rentrer dans le port et d’une marée descendante pour gagner le large, après avoir franchi la passe située entre la pointes de Kerpen’hir et de Bilgroix, entre les lieux-dits Loc’mariaquer et Por’an’Avalon.
     
    Lorsque je remarquai, sur la carte qu’il avait étalé sur sa table, la cité fortifiée de Vannes, au fond du golfe, à quelques lieues de la forteresse de Largoët, mon sang ne fit qu’un tour dans mes veines-artères. Inutile de poursuivre la route jusqu’au port de La Rochelle. Je débarquerais avec mes écuyers, Onfroi de Salignac et Guilbaud de Rouffignac, sitôt que nous aurions accosté après que le bateau aurait été tiré sur les chemins de halage jusqu’au port d’Auray. Nous gagnerions ainsi plusieurs jours et nous épargnerions une longue et inutile chevauchée vers le nord.
    Sitôt dit, sitôt fait. À la dix-huitième heure du jour, à sept jours des calendes d’avril, nous mîmes pied à terre, fîmes nos adieux à nos autres compains de voyage, chevaliers, écuyers et valets d’armes. Ils débarqueraient dans le port de La Rochelle et rejoindraient nos terres d’Aquitaine, en descendant vers le sud. Je confiai aussi un long message à Foulques pour qu’il le remît à ma douce Mie, dès son arrivée.

    De la chambre de la taverne où nous passâmes la nuit après un copieux souper arrosé d’un excellent vin blanc du pays nantais, nous découvrîmes, le lendemain matin, en ouvrant le petit fenestrou, une vue magnifique sur le port. Il grouillait déjà de monde et d’activité. Le temps était frais mais radieux.
    La nuit, le claquement des haubans sur les mâts, le gémissement des coques. Le jour, l’odeur qui se dégageait, mélange de bon air marin, de senteurs campagnardes, de vase et de pourriture, de relents de poissons crevés, d’orine et de déjections. Ah ! Qu’il était bon l’air de France !
    Nos chevaux bien avoinés, étrillés et scellés, nous nous élançâmes à travers les sentes de Bretagne vers la forêt de Brocéliande. Nous laissâmes les fortifications de la cité de Vannes à notre dextre pour nous diriger au galop vers la forteresse de Largoët, où résidait le triste sire Arnaud Méhée de la Vigerie. Il était connu en ces terres de Bretagne, à en accroire monseigneur Élie de Salignac, évêque de Sarlat, sous le nom de

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