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La lumière des parfaits

La lumière des parfaits

Titel: La lumière des parfaits Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hugues De Queyssac
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l’océan.
     
    Je m’étais pourtant bien juré de ne plus jamais quitter le plancher des vaches après avoir essuyé, avec Foulques de Montfort, Arnaud de la Vigerie et le père Louis-Jean d’Aigrefeuille, feu l’aumônier général de la Pignotte, l’Aumônerie des pauvres à la cour du Souverain pontife, une espouvantable tempête en mer Méditerranée.
    Mais deux ou trois semaines de navigation, comparées à dix ou douze semaines de chevauchée, le cul en grandes souffrances, les nasches tannées comme un cuir de Cordoue, les fragiles coillons qui remontaient à la gorge lors d’un écart, ce serait pain béni ! Nous pensions avoir fait le bon choix et regrettions maintenant de ne pas y avoir songé lors de notre départ.
    Il est vrai que peu probable serait de faire la connaissance de quelque comtesse aux charmes troublants et succubes… Sauf à croiser quelques sirènes surgissant des flots avec de longs cheveux, des yeux fendus en amande, le corps lascif couvert de fines écailles, les pieds soudés dans une nageoire caudale. Pour nous inviter à les rejoindre dans le royaume abyssal des profondeurs inconnues de la mer…
    La légende voulait que bien des navigateurs en désespérance se soient laissés envoûter par leur chant mélodieux et leurs promesses alléchantes. Des promesses orgiaques, mais sans lendemain pour ces malheureux.
     
    La ville de Dantzig était l’une des quinze villes de la Ligue hanséatique soumises à la tutelle du grand maître de l’Ordre teutonique. Il régissait leurs assemblées municipales et surveillait le comportement de leurs délégués lors des réunions des Diètes.
    Il régnait sur le port une activité commerciale débordante. Ici on transportait, à dos d’homme ou à dos de cheval, d’énormes sacs de céréales cultivées en Prusse, du blé, du seigle, que l’on hissait par des palans de levage à roue de carrier ou par les sabords de charge, à bord des hourques, des voiliers aussi ventrus que des tonnels, pour être acheminés vers le reste de l’Occitanie.
    Là sur le quai devant nous, on faisait rouler des billes de bois sur des rondins superposés, des sacs de cuivre en provenance de Pologne et de Haute Hongrie, du sel extrait des mines de Wieliczka, des cristaux de Bohème, de la cire et du miel d’Ukraine, et même de la soie et des épices d’Orient qui étaient acheminées en charrois jusqu’au port de Cracovie, d’où ils gagnaient notre port d’embarquement en remontant la Vistule.
    D’autres navires marchands amarrés à quai chargeaient aussi du fer et du cuivre du royaume de Suède pour être exportés vers le port de Londres, chez les Godons, en Angleterre.
    Sur d’autres quais, plus loin, des pièces de drap des Flandres et des épices en provenance d’Orient étaient chargées sur des navires pour être réexpédiées en Pologne, en Lituanie, en Ukraine. Je constatai une fois de plus que les lois de la guerre n’empêchaient pas les marchands, les affréteurs de navires et les banquiers de faire lucratifs trafics de toute nature.
    L’Ordre teutonique ne possédait-il pas en nom propre une quinzaines de hourques pour le commerce hauturier et une centaine de coques, des navires de taille et de charges réduites, pour la navigation côtière ou fluviale ?
    Les uns et les autres chargeaient et déchargeaient leurs marchandises à partir des ports de Dantzig, de Königsberg, de Reval, de Dorpat, points de départ d’une route qui aboutissait en Russie, dans les cités marchandes de Pskov et de Novgorod, où se rassemblaient les marchands d’Occident et de Russie pour y troquer ou y bailler, lors des foires annuelles, leur commerce de fourrures, d’épices, de draps, de sel ? À quand le trafic d’esclaves ? pensai-je.
     
    Nous avisâmes un quidam, qui vociférait des ordres à force coups de gueule, pour lui demander qui pourrait nous indiquer la hourque au bord de laquelle nous devions embarquer. Il haussa les épaules pour nous signifier qu’il ne comprenait pas notre langue et, d’un large mouvement du bras, il nous laissa entendre sans équivoque qu’on devait s’écarter. Ce fut alors qu’à notre plus grande surprise, la main sur la garde d’une épée qu’il fit mine de desforer, les sourcils froncés, Foulques de Montfort nous surprit tous en huchant à gueule bec :
    «  Ho, halt die Mundpartie, sonst poliere ich Dir die Fresse, dass Dir semptliche Gesichtzüge entgleisen   ! ! ! »
    L’homme se

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