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La malediction de la galigai

La malediction de la galigai

Titel: La malediction de la galigai Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean (d) Aillon
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point de croix ! qu'elle réagit, élevant un crucifix qu'elle tenait serré, après l'avoir baisé.
    Son courage et sa résignation désarmèrent finalement la haine et, peu à peu, le peuple s'abîma dans le silence.
    En place de Grève, devant la foule innombrable et le bûcher où son corps allait être consumé, elle resta impavide et déclara :
    â€” Que de peuple pour voir une pauvre affligée !
    Elle monta sans faiblesse sur l'échafaud. En haut, elle pardonna au bourreau et lui demanda s'il en aurait vite fini.
    â€” Oui, madame, recommandez-vous bien à Dieu.
    Elle ajouta qu'elle pardonnait au roi, à la reine, à tout le peuple et termina par ces mots :
    â€” On me veut du mal et ils ont fait du mal à mon mari. Ah ! Je les prie tous de me donner chacun un Ave Maria .
    Son regard balaya la foule une dernière fois, comme pour se souvenir du monde qu'elle allait quitter. Et là, elle reconnut l'homme qui avait transporté les caisses d'or avec Nardi et Gramucci : Mondreville !
    Richement vêtu, il souriait, la narguait, venait s'assurer de sa mort.
    Une des crises d'hystérie qui l'avaient fait si souvent souffrir lui monta dans la gorge. Alors elle glapit en italien, d'une voix trop basse pour que la foule l'entende :
    â€” Mondreville ! La mia maledizione andrà a seguirti fino che la tua pelle e la pelle della tua pelle cadonno sul patibolo 1 .
    En bas de l'échelle, devant le bûcher, des prédicateurs de la Pénitence avaient accompagné la condamnée. L'un d'eux, Gramucci, entendit et comprit ces dernières paroles. Terrorisé, il se signa plusieurs fois tandis qu'on échancrait le col de l'ancienne maréchale d'Ancre. On banda ses yeux. Le bourreau leva l'épée et trancha son cou d'un seul passage. Ensuite, il jeta la tête et le corps de la Galigaï dans le brasier.
    1  Ma malédiction te poursuivra jusqu'à ce que ta chair et la chair de ta chair tombent sur l'échafaud !

Deuxième partie
    Ã‰bauche d'une cabale
    (Trente ans plus tard)

10
    S ous le long ministère de Richelieu, les soulèvements contre l'injustice des impôts avaient toujours été noyés dans le sang. Ainsi la révolte des Nu-Pieds en Normandie avait provoqué une répression d'une incroyable férocité et, au fil des années, l'agitation du peuple s'était vue muselée par la terreur.
    Mais dès le début de la régence d'Anne d'Autriche, les protestations s'étaient ranimées, soutenues par les parlements s'opposant à l'affermage des impôts.
    L'affermage consistait à laisser à des financiers, appelés traitants 1 , la collecte des impôts après qu'ils en avaient avancé le montant prévu à la caisse de l'Épargne. Sans contrôle, cette méthode était devenue ruineuse car les traitants recevaient une commission atteignant parfois le dixième des impôts encaissés. Or, pour compenser cette perte, l'État augmentait les prélèvements.
    L'arrivée de Particelli d'Émery au contrôle général des Finances, puis à la Surintendance, avait multiplié ce désordre, tant l'Italien accordait à ses amis des remises atteignant, parfois, la moitié des impôts à collecter. Autour de lui, des fortunes impudentes s'étaient édifiées, au détriment des caisses de l'État.
    De surcroît, le roi était un enfant et la régente trop bonne, distribuant facilement charges et récompenses. Les grands, les princes, les ducs et pairs voulaient toujours plus. Sous des prête-noms, eux-mêmes participaient, d'ailleurs, à l'affermage en ruinant le royaume 2 .
    Pendant longtemps, il avait été suffisant de pressurer les paysans et les laboureurs. Mais comme il fallait toujours plus d'argent pour financer la guerre, le luxe des grands et les fortunes des traitants, c'était désormais la bourgeoisie qu'on accablait d'impôts. Ainsi Particelli d'Émery avait-il décrété une taxe sur les aisés (les plus riches bourgeois), un impôt du toisé sur les constructions hors de l'enceinte, un droit du tarif sur les marchandises qui entraient dans Paris, et quantité d'autres taxes iniques. Enfin, l'affermage de la taille avait entraîné l'inutilité de bon nombre d'offices, comme ceux des trésoriers ou des receveurs. Or ces gens ne vivaient que

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