La malediction de la galigai
par les bénéfices possibles sur leur charge, lesquelles avaient été payées très cher. Ils se retrouvaient donc acculés à la ruine.
Le peuple, la bourgeoisie marchande et la majorité des magistrats des cours souveraines accusaient désormais celui qui dirigeait l'Ãtat d'être la cause de tous leurs maux. Cet homme, c'était un étranger naturalisé, un Italien comme l'avait été le détesté maréchal d'Ancre, Concino Concini. Il se nommait Mazarin.
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En janvier 1648, pour financer la campagne militaire en Flandres, Mazarin avait demandé à Particelli de lui fournir quelques millions. à court d'impôts nouveaux, le surintendant des Finances avait eu l'idée d'augmenter le cens des maisons situées sur les censives royales 3 , mais, cette fois, les Parisiens avaient protesté, manifestant avec violence au Palais de Justice. Le cardinal Mazarin avait répliqué par un lit de justice, c'est-à -dire la venue du jeune roi au Palais 4 , pour imposer ses décisions. à cette occasion, le petit Louis XIV avait confirmé de nouvelles taxes ainsi que la création de douze offices de maîtres des requêtes, chacun rapportant plusieurs centaines de milliers de livres. Non seulement le Parlement avait rejeté ces prélèvements, mais son attitude avait été approuvée par les autres cours souveraines : le Grand Conseil, la Chambre des comptes et la Cour des aides.
Après des semaines d'escarmouches, Anne d'Autriche et Mazarin avaient décidé de sanctionner les parlementaires et les détenteurs d'office des cours souveraines en supprimant le droit de posséder, céder ou vendre leurs charges. Par représailles, les quatre compagnies s'étaient réunies afin de statuer sur les affaires de l'Ãtat. Bien que le Conseil royal ait cassé leur décision, les cours souveraines avaient décidé de donner une constitution 5 à la France.
Les vingt-sept articles de cette loi fondamentale supprimaient les intendants qui organisaient l'affermage dans les provinces, prohibaient les emprisonnements sans jugement, imposaient que le Parlement valide les nouveaux impôts, interdisaient la création de nouveaux offices, réduisaient les tailles d'un quart et abolissaient les nouvelles redevances comme le toisé. Impuissante, car l'armée était occupée aux frontières, la régente avait été contrainte d'approuver la charte.
Mais en août 1648, ayant écrasé les Espagnols, le prince de Condé était revenu à Paris. Anne d'Autriche avait cru pouvoir prendre sa revanche en faisant arrêter le conseiller Broussel, chef de file des parlementaires républicains. C'était faire fi du mécontentement populaire. En quelques heures, Paris s'était couvert de barricades à l'instigation du coadjuteur de l'évêque : Paul de Gondi. à nouveau la reine avait dû céder et libérer Broussel. Peu après, le roi et sa mère avaient quitté Paris pour Rueil, domaine de la nièce du cardinal de Richelieu. Où Condé les avait rejoints. Les parlementaires craignant l'entrée de l'armée dans Paris avaient supplié Anne d'Autriche de revenir, ce qu'elle avait accepté après un accommodement bancal. Seulement, durant les deux derniers mois de l'année, Paul de Gondi avait de nouveau manÅuvré pour opposer le peuple à Mazarin⦠dont il briguait la place.
Le 6 janvier 1649, dans la nuit, la Cour avait quitté le Palais-Royal pour se réfugier à Saint-Germain-en-Laye. Le même jour, le prince de Condé avait installé un siège autour de la capitale. Mais la Cour était divisée, le prince de Conti et la duchesse de Longueville â frère et sÅur de Condé â étaient revenus à Paris rejoindre le duc de Beaufort, évadé du château de Vincennes où il était enfermé depuis qu'il avait tenté d'assassiner Mazarin 6 . Le Parlement avait ensuite déclaré le cardinal ennemi du roi et de l'Ãtat et perturbateur du repos public . En imposant sévèrement la bourgeoisie, surtout les fidèles de la reine, les généraux de la Fronde, comme ils se nommaient â c'est-à -dire Beaufort, Conti, Gondi, Bouillon, et quelques autres ducs â avaient recruté une armée. La guerre civile, particulièrement sanglante, s'étala sur trois mois.
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