La malédiction des templiers

qui, selon Tess, était le plus susceptible d’être le bon. Ils n’avaient en aucun cas la certitude qu’il s’agissait bien de leur cible, mais c’était tout ce dont ils disposaient.
    Le poseur de bombes du Vatican – si c’était bien lui – ne leur avait pas facilité la tâche. Aucune chance pour un tireur d’élite ou un guetteur de savoir qui se trouvait là-haut. Les deux 4 × 4 étaient garés dans une clairière protégée par un grand éperon rocheux et impossible à surveiller d’où que ce soit sans risquer de signaler sa présence. Les seules images sur lesquelles travailler étaient infrarouges et thermiques, et leur étaient fournies depuis une altitude de trente-trois mille pieds par l’intermédiaire des opérateurs du drone depuis la base de Beale de l’US Air Force.
    L’emplacement de la clairière avait représenté une difficulté supplémentaire. Son unique voie d’accès était un étroit chemin muletier, tortueux et semé de gros blocs de pierre qui réduisaient pratiquement à néant les chances d’y parvenir sans donner l’alerte. Le bruit des moteurs trahirait à coup sûr leur présence longtemps avant qu’ils arrivent à destination. Reilly, Ertugrul et l’unité de paracommandos turcs avaient été contraints, ainsi que Tess, d’abandonner leurs véhicules près de deux kilomètres plus bas et de finir le chemin à pied. Ils se trouvaient maintenant à couvert dans un fourré de jeunes tilleuls et de broussailles, au bord d’une petite yayla , à moins de cent mètres et légèrement en contrebas de la clairière.
    Les deux taches orange sur l’écran de Reilly étaient totalement immobiles. A en juger par leur forme, oblongue, les deux hommes qu’elles représentaient semblaient couchés, endormis, ce qui n’avait rien de surprenant compte tenu de l’heure. Le microphone directionnel à longue distance dont ils étaient équipés n’avait capté aucune conversation, pas le moindre ronflement. La question n’en demeurait pas moins. Qui étaient ces hommes ? L’un d’eux était-il leur cible, ou s’agissait-il simplement de randonneurs dormant à la belle étoile ? Et si l’un était le poseur de bombes, qui pouvait bien être l’autre ? Simmons ? Ou le propriétaire du second 4 × 4 ? Et dans ce cas, où était passé Simmons ?
    Le plan consistait à passer à l’action juste avant le lever du soleil. Avec l’avantage de disposer de l’équipement adéquat et de l’aide du drone, tout en sachant que, si les choses ne se déroulaient pas comme prévu, l’aube était proche. Reilly regarda autour de lui : les hommes de l’Ozel Tim procédaient aux ultimes préparatifs, vérifiant leurs armes et ajustant les sangles de leurs lunettes de vision nocturne. Ils étaient seize en tout, trois en contrebas, avec Tess, les autres, sous le commandement de Keskin, non loin de la clairière, avec Reilly et Ertugrul. Tous issus des rangs de l’armée, ils avaient reçu un entraînement spécifique dans le domaine de la contre-guérilla. Bien équipés, lourdement armés, ils donnaient l’impression de savoir ce qu’ils faisaient, en tout cas à en juger par ce que Reilly avait pu voir jusque-là.
    L’Américain s’efforça de relâcher la tension qui lui nouait la nuque : les choses ne se présentaient pas si mal. Si son type se trouvait bien dans les parages, le salopard était coincé : il trouverait en face de lui des adversaires supérieurs en nombre et incomparablement mieux armés. D’un autre côté, il détenait peut-être un otage. Et Reilly savait que, dans ce genre de cas, la situation ne se réglait généralement pas sans casse.
    Il croisa le regard de Keskin. Ce dernier hocha la tête, porta un mégaphone à sa bouche et le dirigea vers les deux 4 × 4 garés juste au-dessus.
    —  Dikkat, dikkat ! Attention, attention ! Vous, là-haut, près des voitures ! poursuivit-il en turc. Ici la Jandarma  ! Vous êtes cernés ! Sortez de là avec vos mains bien en vue !
    Il répéta sa phrase avant de la beugler une troisième fois, dans un anglais approximatif, teinté d’un fort accent.
    Reilly essaya de percer l’obscurité avant de se rabattre sur son écran. Les deux formes fantomatiques de couleur orangée s’animèrent soudain, tournicotant autour des deux voitures, se fondant l’une dans l’autre avant de se séparer de nouveau. Les tendons de son cou se contractèrent tandis qu’il tentait de se représenter ce qui