La malédiction des templiers
que ce soit à la ronde une demi-seconde avant que l’onde de choc n’atteigne Reilly. Elle lui coupa le souffle, comme un coup de poing à l’estomac, et le projeta en arrière, l’envoyant s’étaler sur le sentier caillouteux. En un clin d’œil, tous ses réflexes sensoriels se bloquèrent, et il se retrouva enfermé à l’intérieur d’une bulle où régnaient silence et obscurité.
Le tueur avait changé son dispositif : rien à voir avec la faible charge contenue dans la ceinture.
S’il ne s’était agi que d’elle, Simmons aurait été l’unique victime, elle aurait épargné les autres, à moins que ceux-ci ne l’aient protégé de leurs corps.
Non, c’était de tout autre chose qu’il était question.
Dans ce cas précis, d’une charge de plastic de quelque quinze kilos fixée à la taille de l’archéologue. Toute la panoplie d’un kamikaze en bonne et due forme. A l’effet dévastateur.
Lorsqu’il reprit connaissance, Reilly eut l’impression que ses oreilles avaient été enfoncées à l’intérieur de son corps : il n’entendait rien, sinon sa propre respiration, très irrégulière, sa tête était terriblement lourde et il avait perdu toute notion d’équilibre. Ses yeux avaient du mal à accommoder mais, d’après les vagues formes qu’il parvenait à distinguer, il tira la conclusion qu’il était allongé sur le dos. Il essaya de mouvoir bras et jambes, sans obtenir de réaction. Serrant les dents, il trouva la force de rouler lentement sur le flanc droit, histoire de s’assurer qu’aucun de ses membres ne manquait, paniqué à l’idée de découvrir le contraire. Il leva les mains en l’air, ce qui lui permit de constater qu’elles au moins étaient toujours là. Sa droite se posa sur son pistolet, qui n’avait pas quitté son étui, une fraction de seconde avant qu’il la retire précipitamment tant le métal était brûlant.
Il se redressa alors sur un coude et jeta un coup d’œil autour de lui.
Le bucolique paysage de montagne s’était transformé en vision d’enfer.
Tous les arbres environnants étaient en feu, vomissant une âcre fumée noire qui collait désagréablement au palais. Les hurlements et les gémissements des blessés ou des mourants s’élevaient de toutes parts. Dans un semi-brouillard, il distingua des membres épars : un bras, une jambe. Gisant au sol, des paracommandos appelaient à l’aide, mains pressées sur leurs blessures. L’explosion avait littéralement réduit Simmons en miettes avant de déchiqueter les hommes qui tentaient de le mettre en sécurité.
Les yeux de Reilly observèrent le carnage, avant de se poser sur deux corps en train de brûler à côté du bosquet, l’odeur écœurante de la viande carbonisée empuantissant l’air. L’un d’eux, encore en vie, rampait lentement. Puis Reilly aperçut Ertugrul, non loin de lui, à une dizaine de mètres sur sa gauche. Assis par terre, immobile, silencieux, il fixait sur Reilly un regard stupéfait, abasourdi. Il posa sa main droite sur sa joue et ses doigts remontèrent lentement jusqu’à un gros trou dans son crâne, une blessure qui pissait le sang.
— Vedat… articula Reilly.
Les mots suivants restèrent coincés dans sa gorge et il se mit à tousser.
Il essaya de se relever pour venir en aide à son compagnon, n’y parvint pas, fit une seconde tentative, celle-ci couronnée de succès, quand deux événements se produisirent.
D’abord, d’autres explosions retentirent non loin, moins importantes que la précédente, mais qui suffirent néanmoins à le déséquilibrer. Il réalisa qu’il s’agissait des grenades dont les paracommandos étaient équipés, et qui explosaient sous l’effet des flammes.
Puis il entendit le grondement lointain d’un moteur de voiture. Et celle-ci fonçait dans leur direction.
Il se tourna en chancelant, l’esprit toujours confus, sentant soudain qu’un filet de sang provenant de son oreille gauche coulait sur son cou. A travers la fumée, il aperçut la calandre de la Land Rover, illuminée par les flammes, dévalant à toute allure le sentier muletier dans un rugissement de moteur. Il vit alors un commando solitaire se précipiter fusil levé vers le 4 × 4, côté conducteur, déterminé à arroser le véhicule d’une pluie de balles, puis une main armée d’un pistolet sortir de la fenêtre de la voiture. Il entendit presque simultanément trois coups de feu fendre l’air avec une détonation
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