La momie de la Butte-aux-cailles
la première application des rayons Röntgen à la chirurgie, tandis qu’ à Hambourg M. Kisling a obtenu, au moyen de ces mêmes rayons, l’image du squelette de l’embryon d’une femme.
En France, on recense 38 228 969 habitants. À Paris, ils sont 2 511 955, en Algérie : 4 393 698.
Le 11 avril, le Sénat repousse un projet d’impôt sur le revenu proposé par M. Paul Doumer, ce qui réjouit les 2 500 000 rentiers, bien plus nombreux que les 52 500 travailleurs qui mèneront 465 grèves entre janvier et décembre.
Le 23 mai est créé un ministère des Postes et des Télégraphes. Le même jour, M. Poubelle est nommé ambassadeur auprès du Saint-Siège.
Le 30, au banquet de Saint-Mandé, les socialistes songent à faire leur unité. L’avocat Alexandre Millerand présente, faute de mieux, un programme réformiste : Jean-Denis Bredin, dans L’ Affaire , résume ses directives et y ajoute son commentaire :
« "La propriété sociale doit se substituer progressivement à la propriété capitaliste." Certaines industries, comme celles du sucre, "sont mûres dès à présent pour l’appropriation sociale" […] Les socialistes sont internationalistes, mais ils n’ont pas "l’idée impie et folle" de briser la patrie. Oui, ils sont patriotes. [… Il faut d’abord s’emparer du gouvernement. Ainsi les socialistes français se disciplinent. »
Et Jean-Denis Bredin de conclure :
« Se préparent-ils à conforter la République bourgeoise ? »
Le 25 mars, à Athènes, un événement majeur a lieu. A l’initiative du baron Pierre de Coubertin se déroulent les premiers Jeux olympiques : 285 athlètes représentent 14 pays. Louis Spyridon gagne le marathon, l’épreuve la plus populaire de Grèce.
À Paris, il n’est pas question de compétition. On s’amuse. Montmartre célèbre la Vachalcade. La reine est une vache squelettique en carton-pâte. Elle symbolise la « vache enragée », lot des poètes et des rapins. Artisans, peintres, chansonniers, illustrateurs, humoristes offrent leur participation bénévole. Le Moulin de la Galette possède son char. Adolphe Willette exécute la maquette de celui de la poésie et matérialise son fameux Pierrot. Jehan Rictus compose celui de la Belle Étoile, Roedel, celui de la place Pigalle et de La Vache enragée, muselée d’un panier à salade.
En avril, le pont Mirabeau est terminé. Cet important passage va compléter la vaste artère circulaire de la rive gauche qui part du pont de Tolbiac.
Des explorateurs d’un nouveau type voient le jour. Ils ont pour nom Eugène Promio, Félix Mesguich, Charles Moisson, Francis Doublier, Gabriel Veyre, ils n’emportent pas avec eux des instruments de mesure, des armes ou de la bimbeloterie. Leurs seuls atouts sont un trépied et une caméra qui peut contenir jusqu’à cent mètres de pellicule, soit cinq minutes de projection continue. Les frères Lumière les ont engagés afin qu’ils engrangent des images animées provenant des quatre coins de la planète.
Fin mai, Francis Doublier est chargé de tourner, à Moscou, le premier film d’actualités : le couronnement de Nicolas II, souverain, par la grâce de Dieu, de toutes les Russies. Quelques jours après la cérémonie, selon une vieille coutume, le tsar et la tsarine doivent distribuer des cadeaux au peuple. Plus de cinq cent mille personnes, nu-pieds, en haillons, vêtues de tous les costumes de cet immense empire, ont convergé vers Moscou. C’est une pagaille indescriptible, et cela pour recevoir soit une coupe, soit un mouchoir avec cette inscription : En souvenir de la fête du peuple, 1896. Cette foule impatiente a été parquée en dehors de la ville, dans la plaine de Chodinskoje. Un journal allemand, le Berliner Tageblatt, relate le drame :
« Beaucoup de gens étaient là, debout, à attendre. Quand, vers le soir, fabriques et boutiques se vidèrent, la foule devint encore plus dense. L’afflux dura toute la nuit. À cinq heures du matin tout était déjà plein. Le fossé devant les boutiques – il pouvait avoir de cinquante à soixante mètres de large – était comble de gens serrés les uns contre les autres. Les plaintes, les cris, la respiration de plus de un demi-million d’hommes emplissaient l’atmosphère. En avant, sur la gauche, se produisit un mouvement. […] Cela ne dura pas plus d’un quart d’heure : un champ de bataille en temps de paix. Hommes, femmes, vieillards, enfants gisaient là
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