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La parade des ombres

La parade des ombres

Titel: La parade des ombres Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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Daniel sur tribord avant de l’immobiliser tout à fait.
    — Pirates du Bay Daniel, rendez-vous au nom de Sa Majesté ! hurla-t-on depuis la frégate.
    — Plutôt crever, grinça Corneille.
    Il n’avait plus le choix. Il gueula :
    — À l’abordage ! Hardis, matelots !
    Il s’élança le premier, tandis que depuis les vergues on jetait les grappins. Puisqu’ils ne pouvaient fuir, ils ne se laisseraient pas acculer.
    Ils déferlèrent sur le navire anglais, le couteau entre les dents, le sabre dans une main, le pistolet ou la hache dans l’autre, jouant leur liberté et leur vie dans un affrontement sauvage, tirant à bout portant, fourrageant de même. L’Antoine fut le premier à s’effondrer, malgré le bras de son jumeau pour le soutenir, déchaînant ce dernier qui finit par s’écrouler à son tour, fauché d’une balle en plein front.
    La Tenaille s’acharnait, plantant et replantant ces tuniques rouges qui n’en finissaient pas de surgir des profondeurs du navire. En peu de temps, malgré son courage et sa fureur, l’équipage du Bay Daniel fut submergé, et Corneille n’eut d’autre choix, comme ses compagnons, les quinze qui restaient, de laisser tomber son sabre et de capituler.
    Sa seule satisfaction, lorsque l’on referma sur eux les portes de la cale, fut de savoir Junior et Mary hors de ce guêpier.
     
    *
    Mary jouait aux cartes avec Junior dans la salle de l’auberge. Elle se remettait de cette opération, de sa blessure à la tête et surtout du déplaisir qu’elle avait eu d’obliger Corneille à appareiller. Demeurer contrainte à terre lui pesait infiniment. Junior aussi, même s’il n’en montrait rien. Une fois encore, il abattit ses cartes et elle soupira :
    — Décidément, je n’ai plus rien à t’apprendre, tu es devenu aussi roublard que ton père.
    — Je suppose que c’est un compliment ?
    — C’est un compliment, mauvaise graine, s’attendrit Mary.
    — Le Bay Daniel   ! Le Bay Daniel a été pris ! hurla un matelot en poussant sans ménagement la porte de l’auberge.
    Il haletait.
    Mary et Junior se glacèrent. D’un seul élan, repoussant leurs chaises avec violence, ils le rejoignirent. Gave-Panse qui remontait de la cave s’immobilisa dans l’escalier avec ses pichets. Dans la salle où trainaient encore des putains et ces matelots qui ne dessoûlaient jamais entre les repas, un silence de mort venait de s’abattre.
    — Que dis-tu là, le Cornu ? s’inquiéta Mary.
    Il avait blêmi de la voir si pâle.
    — La vérité vraie, Mary. Hélas ! Les Anglais ont eu le Bay Daniel .
    Un vertige la saisit. Elle en avait encore parfois.
    — Une chaise ! cria Junior, livide.
    Gave-Panse s’était déjà précipité. Mary s’y laissa choir.
    — Comment le sais-tu ?
    — C’est Barks qui l’a annoncé. Il s’en vient. Je l’ai devancé…
    Il n’eut pas le temps d’achever qu’avec Duncan, Barks entrait, la mine sombre. Ils cueillirent le matelot d’un regard glacial et celui-ci, mesurant l’effet de sa sotte précipitation, s’effaça pour s’en faire oublier.
    Mary saisit le verre de rhum que lui tendit Gave-Panse et l’avala d’un trait.
    — Comment est-ce arrivé ?
    — Il a voulu aborder un marchand, expliqua Barks. Nous croisions à quelques milles lorsque nous avons perçu le bruit de la canonnade. La fumée était dense et nous nous sommes approchés. Tu nous connais, Mary, nous ne sommes jamais les derniers à donner un coup de main si nécessaire. La longue-vue nous a révélé le nom du navire et nous avons forcé l’allure. Nous l’avons atteint trop tard.
    — Ne pouviez-vous attaquer l’Anglais ? s’étrangla Mary.
    — Notre premier réflexe a été d’arraisonner le Bay Daniel pour y trouver des survivants, avoua Duncan.
    — Un moribond nous a renseignés sur ce qui s’était passé. Un corsaire déguisé. Il les a eus par traîtrise.
    — Et Corneille ? demanda Junior, devançant la question de Mary.
    — Mort ou prisonnier. Nous l’ignorons. Il n’était pas sur le Bay Daniel.
    — Nous avons aussitôt pris l’Anglais en chasse. Trois jours durant. Nous avions l’avantage du nombre pour le forcer, mais il a rejoint son escadre avant que nous puissions l’atteindre et de chasseurs nous sommes brusquement devenus gibier.
    — Nous nous sommes séparés pour pouvoir nous en tirer. Nous l’avons semé dans les caïques où nous nous sommes cachés en franchissant la passe. Un de

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