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La parade des ombres

La parade des ombres

Titel: La parade des ombres Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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sous une pleine.
    — Grand bien te fasse, se mit à rire l’autre.
    Le roulis recommença et Ann serra plus fort les dents.
    — Ce diable de tonneau me semble plus lourd que les autres, avisa d’un coup un des hommes comme ils le relevaient.
    — Allons donc, c’est la fatigue, ou l’âge…
    — Veux-tu bien te taire ? gronda le premier. Je suis encore vert. Demande à ma femme…
    Ann n’entendit pas la fin de la phrase, étouffée par le claquement d’une porte. Les deux hommes venaient de sortir. Elle attendit quelques secondes encore, puis poussa des épaules pour faire sauter le couvercle. Elle dut s’y reprendre à deux fois, mais finit par jaillir de sa prison, tangua pour renverser le fût et s’en libérer.
    Elle se plia en deux et vomit sitôt sortie. Sa liberté était chèrement gagnée : elle avait l’estomac et les idées embrouillés. Pour comble de malheur, la porte s’ouvrit et une chandelle se balança, tressautant du pas alerte de son porteur.
    Elle se redressa devant lui et essuya ses lèvres d’un revers de manche.
    — Vindiou ! s’exclama-t-il, désappointé.
    Il devait avoir une vingtaine d’années, avait une jolie figure, mais l’air benêt.
    — Cesse de me regarder comme si je sortais de l’enfer… lui lança-t-elle. Même si c’est vrai.
    — Pour un enfer comme ça, ma sœur, je me damnerais bien.
    Ann sourit. Finalement, il était moins sot qu’il ne paraissait. Revenu de sa surprise, il posa sa lanterne et s’approcha d’un tonnelet pour remplir son pichet.
    — Es-tu le tavernier ?
    L’homme se retourna vers elle et éclata de rire.
    — Non ! Je m’en voudrais. Ce gros porc lutine sa servante qui l’a aguiché, et pour boire, ventrebleu, il faut se lever soi-même. Encore heureux que je sache où il cache ses meilleures barriques. J’ai travaillé pour lui avant de m’engager.
    — Tu es marin ? s’écria Ann, dont le cœur s’était mis à battre.
    — Tout juste, ma belle. Et toi, tu ressembles à une religieuse comme moi à un curé. A part l’habit, tu n’en as guère les manières. Mais ça ne me regarde pas. Tu peux bien restée cachée là si ça te chante. Je ne dirai rien.
    Il s’apprêtait à remonter. Ann le retint par le bras.
    — Es-tu marié ?
    La question surprit tant le matelot qu’il faillit en lâcher le pichet avant de repartir à rire.
    — Je te trouve diablement effrontée.
    — Réponds-moi.
    — Non, je ne suis pas marié et n’ai pas l’intention de l’être.
    — Même pour sauver une dame en détresse ?
    — Surtout pour sauver une dame en détresse.
    — Même si elle disparaît juste après les épousailles ?
    Il se planta devant elle.
    — Bon sang, mais qui es-tu donc ? Une envoyée de Satan chargée de collecter des âmes ?
    — J’ai été violée par mon père qui m’a placée au couvent pour dissimuler sa faute. Je m’en suis évadée et je veux m’affranchir de son autorité. Mais pas avec le promis qu’il me destine. Je ne veux pas retomber sous la coupe d’un mari.
    — Et qui est-il, ton père, pour avoir autant de pouvoir ?
    — William Cormac.
    Cette fois, le pichet chuta sur le plancher.
    — Tu es la fille de Cormac, le planteur ?
    Ann hocha la tête. Leurs regards s’affrontèrent. L’homme recula.
    — Ecoute, tu es jolie et rancunière, soit, mais ce ne sont pas mes affaires. Je n’ai aucune envie de me frotter à un personnage aussi puissant. J’appareille dans deux heures. Cherche-toi une autre proie, mademoiselle Cormac.
    Ann se précipita pour lui barrer le passage. Elle aurait pu en trouver un autre, mais celui-ci lui plaisait, finalement. Elle savait de plus que sa disparition avait été signalée et qu’on ne tarderait pas à se renseigner auprès du négociant pour savoir où avaient été déchargées ses barriques. Ann ne passerait pas inaperçue dans cette tenue.
    — Aide-moi au moins si tu ne veux pas m’épouser.
    — Qu’y gagnerais-je ?
    Ann réfléchit. Elle n’avait rien à offrir.
    — Un baiser, avança-t-elle.
    Il l’écarta d’un bras en soupirant.
    — C’est pas assez. Ça ne me rembourserait même pas mon vin gâché.
    Ann sentit une bouffée d’angoisse l’envahir. Machinalement, elle serra le pendentif d’émeraude.
    — Ça, dit-elle douloureusement. Je te donnerai ceci si tu acceptes de m’aider.
    Il ramena la lanterne à la hauteur du bijou qu’elle avait dégagé et l’examina.
    — Tu es donc vraiment

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