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La parade des ombres

La parade des ombres

Titel: La parade des ombres Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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ce trésor, tout ce que je veux, c’est le ramener d’où il vient, le compléter et percer son mystère. Je veux atteindre la cité de cristal, si elle existe. Pas pour les richesses qu’elle pourrait contenir, mais pour supplier ses maîtres de me délivrer du fardeau que cette connaissance interdite m’a laissé.
    — Quel fardeau, marquis ? s’étonna Mary, bouleversée par cette confession.
    — L’immortalité, Mary, gémit Baletti en récupérant le crâne entre ses mains.
    Le visage de Mary se troubla davantage encore.
    — Personne n’est immortel, dit-elle, refusant d’y croire.
    — Et cependant j’ai cessé de vieillir. Chaque nuit, elle me régénère, chaque nuit, elle me retient.
    — Pourquoi elle ? Pourquoi elle et pas lui ?
    — Tu ne comprends pas, murmura Baletti en remettant le crâne sur son support. J’ignore par quel prodige et à quelle intention il fut créé, mais l’âme qu’il contient est celle d’une femme. Une femme qui m’a choisi pour demeurer à ses côtés. A cause d’elle, Mary, à cause d’elle, je n’ai jamais pu aimer.
    Il planta son regard dans le sien, et l’ampleur de son tourment poignarda Mary. Elle se leva, tituba mais s’efforça de le rejoindre pour se nicher dans ses bras.
    — Je suis là, pourtant, marquis.
    — Oui, pour la première fois je l’ai défiée, pour la première fois j’ai refusé les images de toi qu’elle m’envoyait.
    — Quelles images ? Celles de ma vengeance ?
    — Celles de ta vieillesse quand je ne vieillirai pas. Qu’y a-t-il de pire, Mary, que l’inexorable ? Qu’y a-t-il de pire que de survivre à ceux que l’on a aimés ?
    Mary s’écarta de lui et fouilla son regard.
    — Vivre sans aimer, marquis. C’est l’héritage que Niklaus m’a légué. Vous avez eu raison de la défier.
    Leurs lèvres se cherchèrent avec la même avidité et le tapis épais accueillit leur étreinte désespérée. Au-dessus d’eux, immobile, le crâne de cristal semblait les narguer de son éternité.

16
     
     
    C orneille s’enfonça dans le souterrain derrière Clément. Ils progressèrent lentement, la tête et les épaules courbées, le chuintement de l’eau dans leurs oreilles. Elle ruisselait des parois comme autant de larmes qui s’écoulaient à leurs pieds. Le boyau n’était long que d’une centaine de mètres, mais il puait le moisi et Corneille retint une furieuse envie d’éternuer. Il plaqua sa langue contre son palais pour l’étouffer, se concentrant sur la lueur vacillante de la lanterne que, bras tendu vers l’avant, Cork promenait.
    — Nous y sommes, annonça celui-ci devant un départ d’escalier de pierre.
    Cork gravit les trois marches, puis enfonça une pierre dans sa cavité. Le mur s’écarta pour les inonder de lumière. Dans son cabinet, le marquis de Baletti les attendait.
    Corneille jaillit du souterrain pour voir les deux hommes se donner l’accolade. Baletti s’écarta aussitôt de Cork et s’avança vers lui.
    — Soyez le bienvenu, Corneille. Mary sera heureuse de votre visite. Je ne lui ai encore rien dit de toute cette affaire, préférant que nous en discutions ensemble. Où est l’enfant, je pensais que vous l’amèneriez ?
    — À Pantelleria, annonça Cork. Je n’ai pas voulu l’exposer à la colère des Impériaux. Ils quadrillent l’Adriatique tandis que Forbin soutient son siège à Trieste. Passer inaperçu n’a pas été facile. Ils me traquent sans relâche.
    — Tu es sûr de ta cache ? demanda Baletti.
    — C’est le Bay Daniel qu’ils veulent, pas Junior. Il est en sécurité sur l’île. Si j’avais été pris en vous l’amenant, il aurait connu le sort des hommes de Clairon.
    — As-tu pu savoir sur quel navire ceux-ci ont été embarqués ? questionna Baletti, soucieux.
    — Ils ont quitté Trieste par voie de terre pour rejoindre un autre lieu de mouillage, mais je n’ai plus de liberté de manœuvre suffisante pour me renseigner et agir. L’ambassadeur est furieux contre moi et Boldoni offre une prime conséquente à qui me capturera. Je sais beaucoup trop de choses sur eux. Ce piège n’a servi qu’à augmenter la colère de Forbin, qui redouble d’attaques contre Hennequin de Charmont. Ils ne me laisseront plus en paix.
    — Qu’en pensez-vous, Corneille ? demanda Baletti en se tournant enfin vers lui.
    Corneille s’était contenté de l’observer, de le juger, s’énervant de le trouver bel homme et visiblement

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