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La parfaite Lumiere

La parfaite Lumiere

Titel: La parfaite Lumiere Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Eiji Yoshikawa
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comme Gudō était un homme, et
tous les maîtres précédents étaient des hommes.
    Il se leva, à demi soulevé par sa
propre fureur. Durant plusieurs minutes, il regarda fixement la lune ;
mais, sa colère s’apaisant, ses yeux s’arrêtèrent sur le cercle. Encore à
l’intérieur de lui, il fit le tour complet. Ce faisant, il se rappela que le
bâton ne l’avait pas frappé.
    « Un cercle ? Qu’est-ce
que ça pouvait bien vouloir dire ? » Il laissa courir sa pensée.
    Une ligne parfaitement ronde, sans
commencement, sans fin, sans déviation. Elargie à l’infini, elle deviendrait
l’univers. Rétrécie, elle équivaudrait au point infinitésimal dans lequel résidait
l’âme de Musashi. L’âme de Musashi était ronde. L’univers était rond. Pas deux.
Un. Une seule entité : lui-même et l’univers.
    Dans un cliquetis, il tira son
sabre et le tendit en diagonale. Son ombre ressemblait au symbole qui désigne
« o » . Le cercle universel demeurait le même. De plus, lui-même
était inchangé. L’ombre seule était différente.
    « Seulement une ombre, se
dit-il. Elle n’est pas mon vrai moi. » Le mur contre lequel il s’était
heurté la tête n’était qu’une ombre, celle de son esprit confus.
    Il leva la tête, et un cri furieux
lui jaillit des lèvres.
    De la main gauche, il tendit son
sabre court. L’ombre changea de nouveau, mais l’image de l’univers... pas d’un
iota. Les deux sabres n’étaient qu’un. Et ils faisaient partie du cercle.
    Musashi poussa un profond
soupir ; ses yeux s’étaient ouverts. En regardant de nouveau la lune, il
constata que son vaste cercle pouvait être considéré comme identique au sabre
ou à l’âme d’un habitant de la terre.
    — ... Sensei  !
cria-t-il en bondissant à la suite de Gudō.
    Il ne demandait plus rien au
prêtre, mais lui devait des excuses pour l’avoir haï avec une telle véhémence.
Au bout d’une douzaine de pas, il s’arrêta. « Ce ne sont que des feuilles
et des branches », se dit-il.
     
     
     
Bleu de Shikama
     
    — Otsū est là ?
    — Oui, je suis là.
    Un visage apparut au-dessus de la
haie.
    — Vous êtes le marchand de
chanvre Mambei, n’est-ce pas ? demanda Otsū.
    — Exact. Pardon de vous
déranger alors que vous êtes occupée, mais j’ai appris des nouvelles qui vous
intéresseront peut-être.
    — Entrez.
    Elle désignait du geste la porte
de bois ménagée dans la clôture. Le linge pendu aux branches et aux perches le
montrait : la maison appartenait à l’un des teinturiers qui fabriquaient
le tissu robuste connu dans tout le pays sous le nom de « bleu de
Shikama ». Cela consistait à plonger le linge plusieurs fois dans une
teinture d’indigo, et à le pilonner dans un grand mortier après chaque
immersion.
    Otsū n’avait pas encore
l’habitude de manier le maillet, mais elle travaillait dur et ses doigts
étaient teints en bleu. A Edo, après avoir appris le départ de Musashi, elle
avait rendu visite aux résidences Hōjō et Yagyū, puis avait
aussitôt repris ses recherches. A Sakai, l’été précédent, elle s’était
embarquée sur un des bateaux de Kobayashi Tarōzaemon, et elle était venue
à Shikama, village de pêcheurs situé sur l’estuaire triangulaire où le fleuve
Shikama se jette dans la mer Intérieure.
    S’étant souvenue que sa nourrice
était mariée à un teinturier de Shikama, Otsū était allée la voir et
habitait chez elle. La famille était pauvre ; Otsū se sentait donc
obligée d’aider à la teinture, ouvrage des jeunes femmes non mariées. Souvent,
elles chantaient en travaillant ; les villageois assuraient qu’ils
pouvaient distinguer, au son de voix d’une fille, si elle était amoureuse de
l’un des pêcheurs.
    Après s’être lavé les mains et
avoir essuyé la transpiration de son front, Otsū invita Mambei à s’asseoir
pour se reposer sur la véranda. Il refusa d’un geste de la main, et dit :
    — Vous venez bien du village
de Miyamoto, n’est-ce pas ?
    — Oui.
    — Je monte par là pour
affaires, pour acheter du chanvre, et l’autre jour j’ai entendu une rumeur...
    — Oui ?
    — Sur vous.
    — Sur moi ?
    — J’ai aussi entendu parler
d’un homme appelé Musashi.
    — Musashi ?
    Otsū avait le cœur dans la
gorge, et ses joues s’empourprèrent. Mambei eut un petit rire. Bien que ce fût
l’automne, le soleil était encore assez fort. Mambei plia un mouchoir, s’en
couvrit la tête

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