La Part De L'Autre
suivantes : Kahr, qu'il a interrompu, est nommé
régent de Bavière, les deux autres, Lossow et Seisser,
prennent une dimension nationale pour devenir, l'un, Lossow, ministre
Armées et l'autre, Seisser, ministre de la Police ; la
condition de tout cela étant qu'ils portent Hitler candidat au
poste de chancelier d’Allemagne.
Il
faut franchir le Rubicon, messieurs. Je sais que ce pas est difficile
à faire pour des gens un peu trop politiciens comme vous, et
pas assez hommes d’action. Mais nous allons vous aider à passer
le fleuve . Nous
pouvons vous pousser, même, si vous traîner à
sauter.
Si
je comprends bien, vous nous demandez d’être complices
de votre putsch ? dit Kahr.
Correct.
Mes complices ou mes victimes. Ne trouvez-vous pas que c'est un vrai
choix ?
Et
qui sera à la tête des armées de Bavière ?
Ludendorff.
Il
est... des vôtres ?
Il
le sera. Nous sommes allés le chercher.
Si
Ludendorff est d'accord, nous serons d'accord aussi.
On
amène alors le vieux général, héros de la
guerre, adoré du peuple, homme de droite, aussi surpris que le trio
gouvernemental. Il finit par accepter, entraînant l 'adhésion
des trois autres. Hitler précise :
Je
vous préviens que vous devez m'être fidèles. J'ai
quatre balles dans mon chargeur, une pour chacun de vous trois si
vous me trahissez, et la dernière pour moi. Vous devrez lutter
avec moi, vaincre avec moi. Sinon mourir avec moi.
Il
passe dans la grande salle pour expliquer au public ce qui va
arriver, ce que l'Allemagne va gagner dans cette révolution
nationale. Est-ce la menace des mitrailleuses, la présence
massive des SA, son don d'éloquence ? La salle se retourne
comme une chaussette et se met à brailler avec enthousiasme,
lançant mouchoirs et chapeaux au futur chancelier.
Décidément,
la révolution est bien partie.
Rudolf
Hess, secondé par quelques SA, a entre-temps arrêté
les autres membres du gouvernement dont Hitler ne veut pas. Röhm lui confirme que la police est
globalement favorable aux putschistes.
Hitler
atteint au comble de la joie. Il arrose la conclusion de son discours
avec des larmes réelles.
Je
vais accomplir maintenant ce que je m'étais juré de
faire il y a cinq ans, en 1918, lorsque j'étais aveuglé
et estropié à l'hôpital militaire : terrasser le s criminels
de l'armistice et faire en sorte que, des pitoyables ruines de notre
patrie, se dresse l'Allemagne dans sa puissance, sa liberté et
sa splendeur, Amen .
Amen, répond
la salle.
Ensuite,
Hitler se rend dans Munich pour vérifier l'état
d'avancement du putsch dans les casernes.
Après
minuit, Hitler rejoint sa petite chambre, il s'attendrit sur
lui-même. Il regarde autour de lui. Ce décor
élémentaire, un lit, une table, une chaise, une dizaine
de livres, et il se félicite d'être resté si pur.
C'est sans doute ce qui lui a permis de réussir.
A
cinq heures du matin, on le réveille pour lui apprendre que le
triumvirat Kahr, Lossow, Seisser l'a trahi. Les trois hommes lui
envoient eux-mêmes la nouvelle par le colonel von Leupold.
Le
général von Kahr, le général von Lossow,
le colonel von Seisser condamnent le putsch d'Hitler. La prise de
position arrachée par la force des armes à la brasserie
Bürgerbräu est sans valeur.
Il
met plus de dix minutes à croire le message : il avait tout
imaginé sauf qu'on pût le trahir.
Hitler
rejoint le vieux Ludendorff et les conjurés nazis. On
s'indigne. On décide de maintenir le défilé
prévu. On gagnera ainsi l'opinion publique. On effraiera les
adversaires.
Marchons
! crie Ludendorff. Rien n'est perdu.
Hitler
accepte en pensant que ni l'armée ni la police n'oseront tirer
sur l'antique Ludendorff. Il se promet de marcher à ses côtés
et demande que tous les manifestants se tiennent par les coudes.
Derrière
deux porte-drapeaux, Hitler, Ludendorff, Scheubner-Richter, Göring
se mettent en marche, suivis de colonnes de SA. Place Marie, ils se
font acclamer. Hitler reprend espoir.
L'avancée
se fait plus difficile. Des cordons de policiers refusent l'accès
au centre.
Un
coup de fusil part.
D'où
? D'eux ? Des policiers ?
Une
salve. La bataille commence.
Scheubner-Richter,
mortellement atteint, tombe. Il entraîne Hitler dans sa chute.
Son
garde du corps plonge sur Hitler pour le protéger de balles
qui vont se loger dans la cuisse de Göring. Hurlement.
Ludendorff gît à terre, lui aussi. Cris. Confusion.
Balles.
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