Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La Sibylle De La Révolution

La Sibylle De La Révolution

Titel: La Sibylle De La Révolution Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nicolas Bouchard
Vom Netzwerk:
de ronde ? »
    Dans la nuit, l’eau de la Seine
brillait faiblement sur leur gauche. À droite, c’était le parc de Bercy.
    « S’il nous rattrape, nous
nous jetterons à l’eau, mieux vaut encore périr noyé que de tomber entre ses
mains. »
    Les jardins devenaient plus
luxueux, ils commencèrent à voir des maisons construites par de riches
aristocrates avant la Révolution. Le chemin de ronde n’était plus loin.
    Soudain, les battements de son
cœur s’emballèrent. Il avait entendu un bruit.
    — Plus vite, plus vite !
    — Je n’en peux plus…
    Puis, un nouveau cri résonna.
Un cri de bête fauve assoiffée de sang. Suraigu, comme une longue plainte à la
lune. À seulement une cinquantaine de pas derrière eux. Sénart n’avait plus
d’arme hormis le poignard avec lequel il avait tué Prunelle de Lierre. Il se
battrait jusqu’à la mort mais, avant, il le planterait délicatement dans le
cœur de la Sibylle. Elle ne souffrirait pas et tant pis si elle s’était trompée
pour une fois dans ses prédictions.
    Elle trébucha et, alors qu’il
se penchait pour l’aider, elle lui jeta un regard implorant.
    — Je t’en prie, ne fais pas
cela.
    Une fois encore, elle avait lu
dans son esprit.
    Un nouveau cri, Abaddon était à
moins de quarante pas, trente, vingt. Il pouvait presque entendre le souffle du
monstre sur leurs talons.
    Dix pas. En un seul bond il
serait sur eux…
    Il allait se retourner pour
faire face lorsque enfin ils furent à la Râpée. Là-bas se dressait le mur des
fermiers généraux.
    À cent cinquante pieds,
l’ouvrage allait jusqu’à la Seine et s’étendait à l’est jusqu’à perte de vue
vers les faubourgs de Rambouillet. Pourtant, Gabriel savait que rien ne
pourrait les sauver. La distance était trop grande. Il était trop tard. Il se retourna.
    — Attends, regarde !
    Marie-Adélaïde lui avait pris
le bras en lui désignant le chemin de ronde. Une quarantaine de soldats,
éclairés par de nombreuses lanternes, étaient disposés là et les tenaient en
joue avec leurs longs fusils. Il aperçut fugitivement une haute silhouette à
côté du peloton. Vadier !
    — Feu !
    L’ordre venait du maître du
Comité de sûreté générale ; il reconnut sa voix. Il ferma les yeux mais
les balles ne lui étaient pas destinées. Abaddon, qui se précipitait sur eux,
reçut au moins une vingtaine de projectiles qui l’arrêtèrent net, arrachant de
nouveaux fragments de muscle, déchirant ses vaisseaux sanguins à vif, brisant
l’os de son bras gauche. Et pourtant, le monstre avançait encore en poussant un
cri qui déchira la nuit.
    Sénart recula. Il serait trop
stupide de mourir ainsi, juste devant la porte qui les menait au salut.
    — La tête ! hurla-t-il.
Visez la tête !
    Une deuxième salve retentit.
Les soldats avaient suivi son conseil. Le cerveau du monstre éclata
littéralement, un de ses yeux protubérants fut arraché, sa mâchoire brisée
s’affaissa. Il tomba à genoux. Il bougeait encore. Le jeune homme s’approcha
avec prudence.
    « Aucune créature sur
terre ne peut vivre avec son cerveau aussi proprement répandu. » Pourtant,
l’œil unique de la chose le contemplait encore, son bras valide levé dans un
geste menaçant.
    — S’il n’est pas mort, je renie
tous les fondements de la Révolution !
    Vadier était là, à côté d’eux,
un sourire aux lèvres.
    — Citoyen Sénart, ravi de te
revoir. Toi aussi, ma chère Sibylle. Nous sommes arrivés juste à temps.
    La jeune femme, encore
essoufflée, s’était agenouillée et tremblait de tous ses membres. Sénart,
frigorifié lui aussi, tenta de la réchauffer. Pendant ce temps, le Grand
Inquisiteur s’approchait de la créature pour l’examiner :
    — Hum… voilà bien de quoi
effrayer l’esprit le moins superstitieux. Ce vieux fou de Fragonard n’est donc
pas bon qu’à empailler les chauves-souris ou à faire danser les fœtus, il sait
faire de la vraie médecine. Quel dommage que je ne puisse conserver un si beau
spécimen ! Je possède un très intéressant cabinet de curiosités,
savez-vous ? J’y ai même en exposition quelques écorchés de notre ami…
Mais cette chose-là ne fera que pourrir si on ne la traite pas très vite, et
j’ai peur que le cher maître ne soit plus disponible avant quelque temps.
    Il se retourna vers Duglas et
Lepoulet, qui arrivaient tous les deux.
    — Citoyens, jetez cette
charogne à la Seine. Si on la trouve, la milice des sections

Weitere Kostenlose Bücher