La Vallée des chevaux
était soulagée.
Elle retira le harnais et les sangles et l’examina avec soin pour voir si elle
n’était pas blessée. Les pattes avant écartées, reniflant bruyamment et
tremblant de tout son corps, Whinney se pencha vers Ayla avec un hennissement
plaintif.
— Repose-toi, lui conseilla Ayla quand elle cessa de
trembler. De toute façon, il faut que je m’occupe de ce harnais.
Il ne serait pas venu à l’idée d’Ayla de réprimander la jument
sous prétexte que celle-ci s’était cabrée, qu’elle s’était enfuie et avait
renversé son chargement. Elle n’avait pas le sentiment que Whinney lui
appartienne ou qu’elle doive lui obéir. La jument était une amie et une
compagne. Si elle s’était affolée, c’est qu’elle avait des raisons, Ayla avait
trop exigé d’elle. Elle devait apprendre à connaître les limites de la jument
plutôt que d’essayer de modifier son comportement. A ses yeux, lorsque Whinney
l’aidait c’est qu’elle le voulait bien, et elle-même se sentait libre vis-à-vis
de l’animal.
Après avoir ramassé ce qui était tombé des paniers, Ayla remania
complètement tout son système de sangles et de harnais, fixant solidement les
deux épieux aux paniers dans la position où ils avaient basculé, pointes en
bas. Puis elle posa et attacha la natte qui lui avait servi à envelopper le
renne sur les deux longues perches en bois, suffisamment haut pour qu’elle ne
touche pas le sol. Elle hissa la carcasse du renne sur ce travois et y posa
avec précaution le lionceau blessé. Whinney ayant retrouvé son calme, elle la
harnacha à nouveau.
Quand tout fut prêt, elle monta sur la jument et se remit en
route. Alors qu’elle avançait en direction de la vallée, elle songeait avec
étonnement à l’efficacité de ce nouveau système de transport. Comme seules les
pointes des épieux touchaient le sol, la carcasse du renne ne heurtait plus les
obstacles et Whinney traînait bien plus facilement son chargement. Néanmoins, Ayla
ne se sentit vraiment tranquille que lorsqu’elles eurent atteint la vallée.
Elle s’arrêta au pied de la caverne pour que Whinney se repose
et alla lui chercher à boire. Elle en profita aussi pour examiner le lionceau.
Même s’il respirait toujours, elle n’était pas sûre qu’il vive encore
longtemps. Pourquoi a-t-il été placé sur mon chemin ? se demanda-t-elle.
Au moment où elle avait aperçu le lionceau, elle avait pensé à son totem.
L’esprit du Lion des Cavernes voulait-il qu’elle prenne soin de lui ?
Puis une autre idée lui traversa l’esprit. Si elle n’avait pas
décidé d’emmener le lionceau, jamais elle n’aurait pensé à fabriquer ce
travois. Son totem avait-il choisi ce moyen pour l’amener à faire cette
découverte ? Était-ce un présent de sa part ? En tout cas, présent ou
pas, elle ferait tout ce qu’elle pourrait pour sauver la vie du lionceau.
11
— Ce n’est pas parce que je reste ici que tu es obligé de
faire la même chose, Jondalar.
— Qui te dit que c’est à cause de toi que je reste ?
demanda Jondalar sans réussir à dissimuler l’irritation qu’il éprouvait.
La remarque de son frère le touchait plus qu’il ne voulait
l’avouer, car elle contenait une part de vérité.
Il avait longtemps refusé de croire que Thonolan puisse
effectivement s’unir à Jetamio et s’installer chez les Sharamudoï. Mais cela ne
faisait plus aucun doute. Et du coup, lui aussi, il allait rester. Il n’avait
aucune envie de repartir seul. Sans son frère, le voyage du retour risquait de
lui sembler bien long.
— Tu n’aurais jamais dû partir avec moi, reprit Thonolan.
J’ai toujours pensé que je ne reviendrais jamais chez nous. Je ne savais pas
alors que j’allais rencontrer la femme de ma vie, mais j’avais l’impression
qu’il fallait que je voyage jusqu’à ce que je trouve une bonne raison de m’arrêter.
Les Sharamudoï me plaisent. Ça ne me gêne pas de m’installer chez eux et de
devenir un des leurs. Tandis que toi, Jondalar, tu resteras toujours un Zelandonii
où que tu ailles. Jamais tu ne te sentiras chez toi ailleurs. Retourne là-bas,
Grand Frère. Choisis une de ces femmes qui te courent après et rends-la
heureuse. Fonde une famille et raconte aux enfants de ton foyer le long Voyage
que tu as fait avec ton frère. Qui sait ? Peut-être qu’un des enfants de
ton foyer, ou un du mien, décidera-t-il un jour de prendre la route à son tour
pour retrouver
Weitere Kostenlose Bücher