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La Violente Amour

La Violente Amour

Titel: La Violente Amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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levé,
j’allai respirer au jardin la fraîcheur du jour et y trouvai La Guesle se
promenant avec ce monstre de moine, lequel, à vrai dire, sur l’instant, ne me
parut pas monstrueux le moindre, étant si petit et chétif, et causant avec le
laquais du seigneur de Bonrepaus qui se trouvait là, mangeant avec lui des
noisilles dont ils faisaient craquer la coque entre deux pierres. Et La Guesle
me disant à l’oreille qui il était, d’où il venait et qu’il voulait voir le
roi, je l’envisageai plus curieusement et ne vis rien en lui de remarquable,
sinon ses yeux, lesquels étaient grands, noirs, et brillants. Car pour le
reste, il était si malingre, maigrelet, estéquit et malfaçonné que personne
n’eût pu imaginer que ce rebut de la race des hommes pût jamais ébranler le
trône d’un grand royaume, mais la Dieu merci, ceci ne sera rien et Henri
montera dans dix jours à cheval, son intestin n’étant point touché.
    — Dieu
vous entende, Bellegarde ! dis-je, l’œil baissé.
    — Ha, dit
Bellegarde, que ne peux-je, sachant ce que je sais, revenir en arrière dans le
temps et me retrouver en ce jardin avec La Guesle et ce suppôt d’enfer que
j’eusse alors, perçant ses desseins de mon œil clairvoyant, incontinent dagué.
Mais j’étais alors aveugle comme tout un chacun, et Du Halde me venant dire que
Sa Majesté était désommeillée, je partis avec lui d’un pas alerte et ouvrant
lentement et largement le rideau, non sans quelque pompe et décorum dû à ce
geste, puisque par lui débute la journée de mon roi, je quis comme chaque matin
de Sa Majesté comment elle se portait. À quoi elle répondit joyeusement, tant
la pensée de retrouver son Paris et son Louvre. La ravissait, qu’Elle allait à
merveille. Et à Du Halde qui lui posait, après moi (car ainsi le veut
l’étiquette) la même question, elle répondit en gaussant, tant son humeur était
joueuse : « Bien, Du Halde, bien ! Et mieux encore, quand tu
m’auras fait apporter ma chaise percée. »
    « Ce que
Du Halde commanda à deux laquais de faire, mais le roi s’y asseyant nu, pour ce
qu’il dormait ainsi par les chaleureux étés, Du Halde lui mit sur les épaules
une robe de chambre et lui apporta les Essais de Michel de Montaigne
dont le roi était accoutumé à lire à son lever, sur sa chaise, quelques pages,
celles-ci le devant mettre en goût de raison et de bon langage pour le reste de
sa journée. Du Halde, dit-il, quiers-moi ce moine que La Guesle m’amène. J’ai
promis de le voir de prime.
    « Du
Halde les ayant en le jardin cherchés, revint avec La Guesle et ledit moine, et
les fit d’abord asseoir avec les quarante-cinq dans la galerie qui
dominait la chambre royale, ne voulant pas interrompre la lecture d’Henri. Mais
celui-ci, les ayant aperçus en levant le nez, donna le livre à Du Halde et lui
commanda de donner l’entrant au visiteur.
    « Cependant,
à peine passé le seuil, le Procureur La Guesle arrêta le jacobin d’un signe de
la main, afin qu’il n’approchât pas plus outre du roi, lui prit des mains le
passeport du comte de Brienne et la lettre du président Du Harlay et alla, de
sa personne, remettre ledit papier au roi, lequel les lit fort curieusement,
relisant, deux fois à ce que je vis, le billet du premier Président.
    « — La
Guesle, dit Sa Majesté, faites approcher ce jacobin.
    « Ce que
fit La Guesle, mais toutefois en se plaçant entre le moine et le roi. Et quant
à moi, je me tenais debout du côté opposite de La Guesle, j’entends à la dextre
d’Henri, ce qui était ma place ordinaire pendant les audiences, du moins quand
je me trouvais être là.
    « — Eh
bien, mon ami, dit le roi, qu’avez-vous à me dire ?
    « — Sire,
dit le moine d’une voix ferme et basse, que M. le premier Président se porte
bien et vous baise les mains. Ensuite que je voudrais répéter seul à Sa
Majesté, parlant à sa seule oreille, le message dont il m’a chargé.
    « — Qu’est-cela ?
s’écria alors La Guesle comme indigné, parlez haut, mon ami ! Il n’y a
personne céans en qui Sa Majesté n’ait confiance !
    « Mais
ces paroles n’ébranlèrent pas le jacobin d’un pouce, lequel, secouant la tête
de dextre à senestre, dit d’un ton humble et les yeux baissés, que c’étaient là
les instructions qu’il avait reçues, qu’il n’y faillirait pas, qu’il parlerait
à l’oreille de Sa Majesté, ou point du tout.
    « Oyant
quoi, et

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