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La Violente Amour

La Violente Amour

Titel: La Violente Amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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voyant bien qu’il était tout à plein résolu à ne point céder, le roi,
avec sa coutumière bénignité (Dois-je encore le répéter ?) dit
« qu’on fasse donc comme ce religieux désire ». Et de la main, assis
qu’il était toujours sur sa chaise, nu et sa robe de chambre posée sur ses
épaules, il me fit signe de me reculer. Et autant à La Guesle, lequel recula
comme je le fis moi-même, mais quelque peu comme moi à contrecœur et sans nous
éloigner de plus d’un pas, trouvant offensante pour nous la bizarrerie de ce
moine.
    « Le
jacobin vint alors prendre ma place à la dextre de Sa Majesté, laquelle fit le
geste de tendre l’oreille vers lui et le, moine se baissant, le roi étant assis
pour approcher sa bouche de ladite oreille, j’entendis le roi demander à ce
monstre s’il avait d’autres lettres pour lui qu’il n’eût pas voulu montrer de
prime. Je n’ouïs pas la réponse du moine, mais le voyant fouiller de sa main
dextre en sa manche senestre, je m’apensai qu’il les avait cachées là et qu’il
allait les y prendre et les montrer au roi. Mais là-dessus je le vis faire un
mouvement fort brusque en direction du roi, et le roi criant « Ha !
mon Dieu ! » se dressa de dessus sa chaise. Je vis alors le manche
noir d’un couteau dans le bas-ventre du roi, duquel le sang jaillissait à flots
et le roi debout, hagard, regardant le moine avec stupeur et huchant « Ha
méchant ! Tu m’as tué ! » Et tout de gob arrachant le cotel de
son bas-ventre, le sang en jaillissant de nouveau, il en frappa le jacobin à la
face et à la poitrine.
    « Pour
moi me tirant alors de l’espèce de transe où m’avaient jeté la soudaineté et la
brutalité de cet acte inouï, je me ruai sur ce monstre, le saisis au collet et
La Guesle, saquant sur lui l’épée au poing, nous le jetâmes dans la ruelle
entre le lit d’Henri et celui de Du Halde, le roi debout, tenant ses boyaux qui
sortaient du ventre, et la face comme pétrifiée par l’horreur criant « Ha
méchant ! Que t’avais-je fait ? »
    « Ha
Siorac, mon ami, ce n’était partout que cris, gémissements, pleurs et
confusion, ceux des quarante-cinq qui se trouvaient dans la galerie accourant
comme dogues déchaînés, massacrant à coups d’épée le moine et le défenestrant,
M. de Bonrepaus courant çà et là en hurlant « Hé mon Dieu ! Qui a
amené ce misérable ! » Et le pauvre La Guesle criant comme fol
« C’est je ! C’est je ! Je n’y survivrai pas ! Je veux
qu’on me tue aussi ! »
    « Ha mon
ami, mon ami ! poursuivit Bellegarde, en posant sa tête contre la mienne,
comme si elle eût été trop lourde de son immense chagrin pour qu’il la pût seul
porter, tant de bonheur hier encore ! Henri en telle liesse de retrouver
Paris et son Louvre ! et ce jour d’hui tant de désolation !
    — Bellegarde,
dis-je, confortez-vous de grâce. Qui peut dire que la navrure sera fatale, les
médecins ne s’étant pas prononcés.
    — Ha !
dit Bellegarde, c’est raison parler. Il n’est que d’attendre la diagnostique.
    Il n’eut pas à
attendre prou, l’huis de la chambre royale s’ouvrant et Antoine Portail, suivi
de Pigret et de Le Febre apparaissant, la face imperscrutable.
    — Ha !
révérend docteur ! s’écria Bellegarde se jetant à lui, les yeux comme
collés aux siens, et le saisissant aux épaules, qu’en est-il de la navrure du
roi ?
    — Je l’ai
sondée, dit Antoine Portail qui était un grand et gros homme fort, les sourcils
noirs très épais et le regard perçant, et ajouta-t-il sans battre un cil, je
l’ai recousue. M. Le Grand, il importe que le roi repose maintenant en paix,
sans être exagité par les cris, les pleurs et le désespoir des siens.
Tenez-vous-le, je vous en prie, en cervelle, et pour l’amour de Dieu, dites-le
à M. Du Halde.
    — Mais qu’en
est-il de sa vie ? s’écria Bellegarde.
    — Sans
danger, si l’infection ne s’y met, dit Portail en jetant un regard de côté à
Pigret. J’ai dit au roi qu’il monterait à cheval dans dix jours.
    — Dieu
soit loué ! dit Bellegarde, et laissant le chirurgien aussi brusquement
qu’il l’avait accolé, il se rua vers la chambre de son maître.
    — Monsieur
Portail, dis-je sotto voce en m’approchant de lui, je suis, comme vous
savez, médecin du roi : me celerez-vous à moi aussi la vérité ?
    — Nenni,
dit Portail et ayant jeté un coup d’œil à l’alentour, il me dit à

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