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La Violente Amour

La Violente Amour

Titel: La Violente Amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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pour
en venir à ses funestes fins. Que si on observe comment les choses se
passèrent, et se déroulèrent, il n’est personne, personne, mon ami, qui ne
peuve ni ne veuille aboutir à cette conclusion. Oyez-moi bien. Je revenais avec
mon frère Alexandre de Vanves, très conforté d’avoir trouvé mon bien de
campagne intouché, quand pour regagner Saint-Cloud, en passant par Vaugirard, à
une demi-lieue dudit village, entre quatre heures et cinq heures du soir (quoi
disant, M. de La Guesle, qui devait avoir de grandes habitudes de ponctualité,
porta la dextre à la montre-horloge qu’il portait en sautoir et caressa son
boîtier d’argent), je rattrapai sur le chemin, étant à cheval et eux à pied, un
religieux jacobin qu’emmenaient deux soldats. Ce jacobin, je ne me propose pas
de vous le décrire, puisque vous l’avez vous-même encontré.
    — Mais,
dis-je, furtivement, et seulement à la clarté de la lune.
    — Eh
bien, dit M. de La Guesle avec un flagrant déplaisir à devoir évoquer le
régicide, il était petit, chétif, une courte barbe noire, les cheveux à la
forme de ceux de son ordre, et de grands yeux.
    — Noirs,
brillants et fixes ? dis-je.
    — Noirs,
assurément, dit M. de La Guesle, et grands, ou paraissant tels dans une face
maigre. Mais point ne me ramentois-je les avoir trouvés brillants et fixes. Il
est de fait, poursuivit-il, que ce Clément les tenait le plus souvent baissés.
Vous savez quelle chattemitesse humilité affectent ces jacobins.
    — Et pour
sa mine ? repris-je, peu satisfait de cette description et voulant pousser
le conseiller à la préciser davantage.
    — Je ne
saurais en jaser plus outre, dit M. de La Guesle qui paraissait perplexe assez
de mon insistance. Je dirais de sa face qu’elle était ingrate. Faci e s
despicabilis [7] reprit-il en latin. Et à l’ouïr, je le trouvai non point sot, mais simplet, à
tous les coups inoffensif. Ha ! mon ami ! mon ami ! reprit-il
avec un long soupir, c’est bien là où le diable m’a trompé. Mais je poursuis.
J’eusse pu, quand j’encontrai ce religieux avec ces deux soldats, continuer mon
chemin sans m’en occuper, et plût au ciel que je l’eusse fait ! Mais étant
Procureur général du roi en son Parlement, et porté de par la conscience que je
mets à la décharge de mes fonctions à m’enquérir curieusement des faits et
gestes des sujets de Sa Majesté, partout où je le peux, je dis aux deux soldats
qui j’étais, et quis d’eux ce qu’ils faisaient avec ce jacobin. À quoi l’un
d’eux me répondit qu’ils étaient du régiment de Coublans, que ce religieux
s’était présenté aux avant-postes et avait déclaré qu’il avait sailli de Paris
pour venir trouver le roi et lui faire entendre quelque nouvelle concernant son
service, que de reste il avait présenté un passeport en règle signé du comte de
Brienne, et qu’à son vu, leur officier leur avait commandé de l’accompagner à
Saint-Cloud, ce dont, en ce qui les concernait, ils étaient bien marris, pour
ce que la route était longue et qu’ils allaient à pied, et devraient encore
faire à rebours ledit chemin pour regagner à la nuit leur cantonnement. Oyant
quoi, et le petit moine me paraissant las, lui aussi, de sa longue trotte, je
proposai aux soldats tant de par mon respect pour la robe dudit religieux que par
ma naturelle bénignité (dont le démon une fois encore se servit, étant
accoutumé à courber à ses propres sanguinaires fins, les vertus d’un honnête
homme, comme les vices d’un coupe-jarret) de prendre le jacobin en croupe et de
le mener moi-même à Saint-Cloud. Ce que, les soldats acquiesçant avec mille
merciements – ce que, reprit M. de La Guesle, sa gorge paraissant se nouer
à cette remembrance, ce que je fis, hélas…
    — Monsieur,
dis-je, voyant bien qu’après tant de temps écoulé M. de La Guesle se tourmentait
encore grandement en son âme d’avoir été celui par qui le malheur était arrivé,
le monde entier pense que si même Jacques Clément n’avait pas été pris sous
votre charge, de toutes manières, il aurait eu accès à Sa Majesté, le roi étant
si raffolé des moines.
    — Je le
crois aussi, dit M. de La Guesle, mais n’est-ce pas pour moi un sentiment
excessivement piquant, poignant et aggravant que l’ayant amené en mon logis à
Saint-Cloud, je l’aie, en cette soirée du 31 juillet, interrogé en
conscience et dans le dernier menu, sans trouver la moindre

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