Labyrinthe
dérobé l'anneau, et semblait manifestement déterminé à le récupérer.
Téléphone à Noubel.
Là encore, elle ignora les conseils que le bon sens lui dictait. Jusqu'à plus ample information, le policier n'avait pas bougé le petit doigt. Son subalterne était mort. Shelagh avait disparu. Mieux valait ne se fier qu'à soi-même.
Elle venait d'atteindre les marches d'escalier qui reliaient la rue Trivalle à l'arrière du parking de l'hôtel, pensant que, si on la guettait, ce serait vraisemblablement à l'entrée principale.
Les degrés étaient raides, en outre, un mur élevé interdisait toute vue sur l'aire de stationnement. En revanche, une personne en train de l'observer d'une fenêtre n'aurait pas manqué d'attirer son attention.
Il n'y a qu'une façon de le savoir.
Puisant son courage dans une profonde inspiration, elle monta rapidement les marches, galvanisée par l'adrénaline qui courait dans ses veines. Dès qu'elle fut en haut, elle scruta le parking. Il n'y avait que quelques voitures et autocars et très peu de gens.
Son véhicule de location se trouvait à l'emplacement où elle l'avait laissé. Quand elle s'y installa ses mains tremblaient tant elle craignait encore de voir surgir les deux hommes à travers le pare-brise. Leurs cris menaçants résonnaient encore dans sa tête. Ayant verrouillé les portières, elle tourna la clé de contact.
Son regard anxieux pointait dans toutes les directions à la fois, et ses phalanges étaient blanches de trop étreindre le volant. Elle attendit que le gardien soulevât la barrière afin de laisser passer une caravane pour se propulser à sa suite vers la sortie. Le gardien sauta en arrière en poussant un cri de protestation, sans qu'Alice y prît garde.
Elle poursuivit sa route.
52
Sur le quai de la gare de Foix en compagnie d'Audric, Jeanne attendait le train qui la conduirait en Andorre.
« Il reste dix minutes, dit-elle en consultant sa montre-bracelet. Il est encore tant de changer d'avis et de m'accompagner. »
Son insistance lui tira un sourire.
« Tu sais bien que c'est impossible. »
Elle eut un geste d'impatience.
« Tu as consacré trente ans à relater leur histoire, Audric. Alaïs, sa sœur, son père, son mari… Tu as passé ton existence en leur compagnie. » Elle se radoucit : « Mais qu'en est-il de ta propre vie ?
— Leur vie est la mienne, Jeanne, dit-il avec une tranquille dignité. Les mots constituent les seules armes contre les mensonges de l'Histoire. Nous devons nous assurer d'être les témoins de la vérité, à défaut de quoi ceux que nous aimons meurent deux fois. » Il se tut un instant. « Je ne trouverai de paix qu'après que la fin me sera révélée, ajouta-t-il.
— Huit siècles plus tard ? Il se peut que la vérité soit trop profondément enterrée. » Elle hésita : « Et peut-être est-ce mieux ainsi, il est parfois préférable que certains secrets demeurent celés. »
Le regard de Baillard se perdit vers les montagnes.
« Tu sais combien je déplore le chagrin que j'ai apporté dans ta vie.
— Ce n'est pas ce que je voulais dire, Audric.
— Découvrir la vérité et l'étaler au grand jour est la tâche à laquelle j'ai voué mon existence, Jeanne, poursuivit-il comme s'il ne l'avait pas entendue.
— La vérité, dis-tu ? Qu'en est-il de ceux contre qui tu luttes, Audric ? Que cherchent-ils ? La vérité ? Permets-moi d'en douter.
— Non, reconnut-il. Je pense pas que ce soit leur dessein.
— Alors quoi ? s'impatienta-t-elle. Je pars, comme tu me l'as recommandé. Quel mal peut-il y avoir à tout me raconter ? »
Le vieil homme hésitait, cependant.
Jeanne revint à la charge :
« La Noublesso Véritable et la Noublesso de los Seres , bien que de noms différents, appartiennent-elles à la même organisation ?
— Non. » Le mot s'échappa de sa bouche plus sèchement qu'il l'aurait voulu. « Non…
— Mais encore. »
Audric soupira :
« La Noublesso de los Seres était la gardienne attitrée des parchemins du Graal, et durant des milliers d'années, elle assuma son rôle, jusqu'à ce que les manuscrits fussent divisés. » Il s'interrompit, afin de choisir soigneusement ses mots. « À l'opposé, la Noublesso Véritable fut créée voilà cent cinquante ans, à un moment où le langage perdu des parchemins commença d'être décrypté. Le terme “Véritable” était une tentative délibérée pour conférer à l'organisation sa
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