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Labyrinthe

Labyrinthe

Titel: Labyrinthe Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Kate Mosse
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où elle avait caché manuscrit et parchemins. Avec ses braies, sa chemise et son banal chapeau de paille, elle ressemblait à un garçon comme un autre. Elle gardait dans la bouche de petits cailloux qui modifiaient la forme de son visage, et ses cheveux coupés étaient frottés de boue censée les rendre plus foncés.
    La colonne progressait. Alaïs gardait les yeux baissés, de crainte de croiser un regard qui aurait pu la reconnaître et de se voir ainsi dénoncée. À mesure qu'elle s'approchait des portes, la file s'amenuisait. Quatre croisés, la mine atrabilaire, montaient la garde, forçant parfois certaines personnes à se dévêtir pour montrer qu'elles ne dissimulaient rien de précieux.
    Alaïs se rendit compte que les gardes avaient arrêté le brancard sur lequel reposait Esclarmonde. Une étoffe de coton pressée contre la bouche, Gaston expliquait que sa mère était fort mal allante. Le garde tira la couverture qui la recouvrait et eut aussitôt un mouvement de dégoût. Alaïs contint un sourire. Elle avait cousu de la viande avariée dans une vessie de porc et bandé le pied de la gardienne de bandages sanguinolents. Le garde leur fit signe de se hâter.
    Sajhë voyageait bien en arrière en compagnie de Sénher et Na Couza et leurs six enfants, lesquels n'étaient pas sans ressemblance avec lui, après qu'elle eut, à lui aussi, assombri les cheveux avec de la boue. La seule chose qu'elle n'avait su déguiser était la couleur de ses yeux, aussi avait-il pour consigne de ne jamais les lever sans y être contraint.
    Le défilement reprit. C'est mon tour . Il était entendu qu'au cas où quelqu'un lui adresserait la parole, elle affecterait de ne comprendre mot.
    « Toi, manant ! qu'est-ce que tu portes là ? »
    Elle s'astreignit à demeurer tête basse, résistant à l'envie de porter la main à son bandage.
    « Hé, toi ! »
    La pique fendit l'air. Alaïs se recroquevilla, s'attendant à un coup qui ne vint pas. La jeune fille qui la précédait, elle, tomba brutalement sur le sol. À quatre pattes, elle récupéra son chapeau dans la poussière, puis leva un visage apeuré vers son tourmenteur.
    «  Canhòt.
    — Que dit-elle ? grommela le garde. Je n'entends un traître mot à ce galimatias.
    — Un chien. C'est un petit chien. »
    Avant que quiconque y comprît quoi ou qu'est-ce, le garde lui avait arraché l'animal des bras et l'avait embroché sur son épieu, éclaboussant de sang la robe de la jeune fille.
    « Allez, vite ! »
    L'adolescente était bien trop commotionnée pour esquisser un geste. Alaïs l'aida à se relever et l'encouragea à avancer jusqu'à franchir la porte, refrénant son envie de se retourner pour voir où en était Sajhë. Bientôt, elle fut hors des murs de la Cité.
    Je les vois, à présent.
    Sur un tertre surplombant la porte d'Aude se tenaient alignés les barons français. Non pas les plus titrés, puisque ceux-là devaient attendre la fin de l'évacuation pour entrer en triomphe dans Carcassonne, mais les chevaliers portant des couleurs de Bourgogne, de Nevers et de Chartres.
    Près du sentier, au bout de la rangée, un homme grand et mince montait un puissant destrier gris. Son visage avait gardé une blancheur laiteuse en dépit des longs étés du Midi. À côté de François qui se trouvait près de lui, Alaïs reconnut la robe écarlate qu'Oriane se plaisait à porter.
    Guilhem demeurait invisible.
    Continue de marcher en gardant les yeux baissés.
    Alaïs était maintenant si près qu'elle pouvait presque humer le cuir des selles et des harnais. Elle eut l'impression que le regard scrutateur d'Oriane l'incendiait.
    Un vieil homme en détresse aux yeux larmoyants vint lui tapoter le bras, afin de requérir son aide pour monter le raidillon. Alaïs lui prêta d'autant plus volontiers son épaule que c'était la chance qu'elle attendait. Ayant l'air, aux yeux du monde, du petit-fils aidant son aïeul, elle passa près d'Oriane sans être démasquée.
    Le sentier semblait ne jamais aboutir. Ils parvinrent enfin au pied des pentes en terrain plat, jusqu'aux zones ombreuses des bois et des paluds. Après que son éphémère compagnon de route eut retrouvé son fils et sa bru, Alaïs s'écarta de la colonne et courut se mettre à couvert sous les arbres.
    Sitôt hors de vue, elle cracha les cailloux qu'elle avait dans la bouche en frottant son maxillaire endolori. Retirant son chapeau, elle lissa ses cheveux en broussailles, lesquels, devenus

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